À Knokke, la majorité se déchire sur un projet de tours: "J’ai l’impression que le bourgmestre veut passer en force avant la fin de l’été"
Le bourgmestre Piet De Groote et l’échevin Antoine Geerinckx, deux poulains de feu Léopold Lippens, s’opposent sur le projet immobilier.
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Publié le 25-05-2023 à 06h39 - Mis à jour le 25-05-2023 à 07h06
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Depuis un temps déjà, la plateforme citoyenne “Stop aux Tours” (”Stop de Torens”) se bat contre la prolifération “sauvage” de vastes immeubles à appartements dans la station côtière. Le but ? En finir avec les nouveaux immeubles défiant la skyline knokkoise. Les tours y sortent de terre comme des champignons.
Le projet Plaza, deux tours de 14 et de 11 étages dans le quartier Wielingen jouxtant la digue à Knokke, est la goutte qui fit déborder le vase. Certes, rien n’est fait puisque le projet est en attente de permis. Mais la grogne est palpable. “Une majorité d’habitants s’oppose aux excès immobiliers, cela fait plus de trois mois que l’on en discute et le bourgmestre Piet De Groote (”Gemeentebelangen”, NdlR) n’en démord pas, j’ai l’impression qu’il veut passer en force avant la fin de l’été”, s’indigne Antoine Geerinckx, échevin de l’Environnement de la commune depuis janvier 2023 et membre, lui-aussi de la liste “Gemeentebelangen” (“Intérêts communaux”).
Proximité avec le secteur immobilier
Décédé en février 2021 après 40 ans de maïorat, Léopold Lippens avait encouragé le jeune quadragénaire bilingue, co-fondateur du bureau de consultance en environnement CO2logic, à se lancer dans l’arène politique à Knokke, la ville où son père fut actif à ses côtés. Adoubé lui aussi par l’ancien bourgmestre Lippens, Piet De Groote succombe aux chants des sirènes du secteur immobilier qui voit grand et n’a pas l’intention de réduire sa voilure. C’est en tout cas l’avis d’Antoine Geerinckx qui s’en prend au bourgmestre estimant que ce dernier n’écoute pas vraiment la population ni la majorité de son collège échevinal. Selon l’échevin, la proximité de Piet De Groote avec le secteur de l’immobilier pose problème. Il dit que le maïeur knokkois serait aveuglé par des relations de copinage qui l’empêchent de viser le bien commun. Antoine Geerinckx regrette ce penchant pour le béton roi. “Le bourgmestre n’en fait qu’à sa tête, fulmine-t-il. À mon avis, il y a d’autres intérêts en jeu. Je refuse que Knokke soit envahie par des tours trop hautes. Notre belle ville balnéaire doit conserver ce qui fait son charme et son attrait.”
Contacté par La Libre, Antoine Geerinckx souligne que le collège échevinal s’est réuni au mois de mars pour discuter des projets immobiliers à venir. L’échevin prétend que le collège échevinal est surnommé le “Colimmo” (contraction de “Collège Immobilier”). Il perd sa crédibilité. Une majorité de ses membres se montre cependant opposée au projet de tours à construire. Seuls le bourgmestre Piet De Groote et l’échevin des Travaux publics Kris Demeyere (“Gemeentebelangen” également) le soutiennent.
Et ce camp se trouve aujourd’hui politiquement fragilisé. Mercredi en début de soirée, on apprenait que le premier échevin Kris Demeyere renonçait, temporairement et en accord avec le bourgmestre Piet De Groote, à exercer ses responsabilités échevinales. Depuis le mois d’avril, il était dans le collimateur d’Audit Vlaanderen qui a passé au peigne fin la gestion communale de la station balnéaire et s’est intéressé de près aux activités du premier échevin. L’organe de contrôle des dépenses publiques en Flandre soupçonne l’élu d’avoir servi d’intermédiaire auprès d’entreprises immobilières lors de la vente de terrains dans sa commune. Le gouverneur de Flandre occidentale aurait sommé le bourgmestre de clarifier la situation dans sa commune. Kris Demeyere affirme vouloir “s’absenter un court moment et rappelle avoir agi dans l’intérêt de sa belle commune”.
La majorité Gemeentebelangen est présent divisée, ce qui est du jamais vu à Knokke depuis plus de 40 ans… À un an des élections, les partis de l’opposition (N-VA, Vooruit, Groen et Vlaams Belang) jubilent. Ils y voient une possibilité de briser le monopole du parti au pouvoir depuis si longtemps.
Crise de confiance
Le bourgmestre rappelle qu’à ce stade, aucune décision n’a été prise au sujet des tours dans le quartier Wielingen. Piet De Groote se défend en affirmant “qu’il suit scrupuleusement les procédures et qu’il n’est redevable de rien à personne.” Il précise que le plan communal d’occupation des sols sera discuté en automne et que la construction de nouvelles tours n’y est plus prévue.
Argumentant sa position, Piet De Groote affirme que l’introduction d’un recours juridique n’est possible que lorsqu’un permis a été introduit. La question est de savoir si les pouvoirs locaux doivent s’opposer au chantier avec tous les moyens légaux avant même l’introduction du permis en sachant qu’une majorité des habitants n’en veulent pas. À ce stade, le bourgmestre refuse de prendre position concernant le projet en question. C’est ce que lui reproche précisément Antoine Geerinckx, sur la défensive. “Je ne me suis pas engagé en politique pour suivre aveuglement des intérêts douteux. Le projet Plaza-Wielingen n’est que la pointe de l’iceberg. Si cela passe sans le soutien du collège et des habitants de Knokke, alors ce sera sans moi”, conclut l’échevin, pugnace et déterminé.