En durcissant sa ligne politique, Alexander De Croo permet aussi de décrisper les relations entre l’Open VLD et le MR
Écologie, allocations de chômage… Le Premier ministre durcit le ton sur plusieurs thèmes et rappelle qu’il est aussi – et peut-être avant tout – un libéral flamand. En sortant de sa nécessaire réserve, le chef de la Vivaldi rassure également le MR, le parti frère de l’Open VLD.
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Publié le 25-05-2023 à 18h07 - Mis à jour le 25-05-2023 à 18h08
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Au fédéral, la poussière retombe doucement. La Vivaldi ne tombera pas ou, en tout cas, pas tout de suite. Si Ecolo et Groen, membres de la majorité fédérale, ont peu apprécié les propos du Premier ministre, mardi soir sur la VRT, ils n’en font pas un casus belli. Pour rappel, Alexander De Croo avait appelé à ne pas multiplier les normes environnementales au niveau européen. Le chef du gouvernement fédéral désignait la lutte contre le réchauffement climatique comme la préoccupation numéro 1 mais souhaitait plus de modération à l’égard des autres objectifs environnementaux.
Comme plusieurs leaders en Europe, dont Emmanuel Macron, il estime que le tempo “vert” est trop rapide et que les entreprises n’arrivent plus à suivre. C’est l’Europe industrielle qui serait menacée par cette charge normative.
Au sein de la majorité fédérale – la Vivaldi – ses partenaires écolos avaient jugé que ses propos étaient “hallucinants”. La coprésidente de Groen, Nadia Naji, était allée plus loin dans l’attaque en affirmant sur Twitter qu’il n’y avait pas de place au gouvernement fédéral pour les “climatosceptiques” (ce que n’est pas Alexander De Croo). Le PS de Paul Magnette s’était également montré irrité par la posture adoptée par le Premier ministre.
Une vision libérale classique
Jeudi, à la Chambre, durant la séance plénière, Alexander De Croo lui-même, répondant aux nombreuses interpellations des parlementaires, a justifié sa position. Il en a profité pour rejeter la notion de “décroissance”. La solution face aux dérèglements climatiques et environnementaux viendra, au contraire, d’une croissance économique plus vertueuse, bâtie en collaboration avec les citoyens, les PME et les grandes industries. Il a rappelé sa foi en la capacité de l’homme à innover technologiquement. En cela, Alexander De Croo s’inscrit dans la vision libérale classique, dans “l’écologie bleue” telle que la promeut le MR du côté francophone.
Cette attitude du Premier ministre, qui est la figure de proue de l’Open VLD, satisfait le parti de Georges-Louis Bouchez, voire le rassure. On vote dans un an et les deux formations semblent se réaligner politiquement. Si elle peut être comprise comme la volonté de repositionner l’Open VLD comme le parti flamand qui défend les entreprises, la récente sortie médiatique du Premier ministre sur l’environnement permet aussi de retisser des liens entre les libéraux du nord et du sud du pays.
Ces derniers mois, la famille libérale s’était déchirée sur plusieurs questions importantes. Par exemple, la députée MR Marie-Christine Marghem avait mis publiquement en cause la volonté d’Alexander De Croo d’aboutir à une solution dans l’épineux dossier de prolongation de réacteurs nucléaires. À demi-mot, elle sous-entendait que le Premier ministre était un peu trop proche des positions de Tinne Van der Straeten (Groen), la ministre fédérale de l’Énergie. La friture sur la ligne entre les deux formations libérales avait connu une catharsis lorsque l’Open VLD avait “chipé” Alexia Bertrand au MR en la désignant secrétaire d’État au Budget.
Cette crisette intralibérale appartient-elle au passé ? Il semble que oui. Depuis mardi, les poids lourds du MR soutiennent ostensiblement Alexander De Croo. Sur Twitter, le président du parti, Georges-Louis Bouchez, pourtant souvent critique, a défendu le Premier ministre : “Le défi climatique est l’enjeu du siècle. Pour être réussi, il doit aussi tenir compte de l’équilibre socio-économique. […] Il faut donc légiférer intelligemment et pas par dogmatisme. La gauche veut-elle la misère et les famines ?” Dans La Libre, jeudi, le vice-Premier ministre MR, David Clarinval, défendait également sans équivoque le chef du gouvernement fédéral.
De Croo, ce “leader de la droite flamande”
Cette fermeté politique affichée par Alexander De Croo n’est pas un fait isolé. Il y a trois semaines, il avait affirmé vouloir mettre sur la table de son gouvernement la vieille proposition de son parti visant à limiter les allocations de chômage dans le temps. Une position également défendue par Georges-Louis Bouchez. Cette déclaration du Premier ministre avait électrisé le 1er mai des socialistes francophones. Le président du PS, Paul Magnette, avait dénoncé cette attitude, estimant qu’Alexander De Croo était devenu “le leader de la droite flamande” et avait outrepassé son rôle de conciliateur en chef au sein du gouvernement fédéral.
Se sentant souvent seul à la table du gouvernement fédéral, le MR apprécie le retour de la ligne donkerblauw (bleu foncé) des libéraux flamands…