Les Engagés veulent la fin du statut de fonctionnaire statutaire: "Ces nominations rendent la fonction publique moins efficace"
Christophe De Beukelaer (Les Engagés), député bruxellois, se prépare à déposer une vaste proposition visant à réformer la fonction publique bruxelloise et à supprimer "un statut qui ne correspond plus au fonctionnement de la société"
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- Publié le 07-06-2023 à 13h41
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La proposition risque de faire hurler, dans les administrations.
“Nous devons arrêter les nominations de fonctionnaires statutaires en Région bruxelloise”, lance Christophe De Beukelaer (Les Engagés), député bruxellois. Il tempère. Mais à peine. “On ferait une exception pour quelques fonctions régaliennes, comme celle de juge. Cela concernerait les nouveaux engagements et les droits acquis seraient préservés. On laisserait ainsi s’éteindre le statut.”
Les statutaires, nommés après la réussite d’une sélection devant Travaillerpour.be (ex-Selor), ne peuvent être révoqués que dans des conditions extrêmement précises. Cela leur offre pratiquement une sécurité de l’emploi à vie. Les contractuels, par contre, occupent au sein du service public un poste qui n’est pas permanent (en CDD ou CDI).
”À la base, la règle était d’engager des statutaires et, de temps en temps, des contractuels pour des missions spécifiques”, pointe Christophe de Beukelaer. Mais petit à petit, le taux de contractuels a augmenté. Car les dirigeants des administrations se sont rendu compte que le statut est beaucoup trop rigide, lourd. Les directeurs des ressources humaines des administrations eux-mêmes nous disent que ces nominations rendent la fonction publique moins efficace."
Le député prévoit de déposer prochainement une proposition de texte au Parlement bruxellois. Son contenu émane en substance du nouveau manifeste des Engagés, dont la portée ne se limite pas aux fonctionnaires bruxellois.
"Une discrimination, vis-à-vis des contractuels"
”La différence entre ces régimes entraîne une discrimination, vis-à-vis des contractuels, et démotive les agents”, reprend le président des Engagés en Région bruxelloise.
Selon lui, la solution serait de n’engager que des agents contractuels. L’objectif de la proposition est aussi budgétaire. “Nous n’avons plus les moyens de nous offrir ce statut. Dans les communes bruxelloises, le taux de statutaires moyen se chiffre à 37 %. Mais il y a de grandes disparités : c’est 50 % à Bruxelles-Ville, 40 % à Molenbeek, contre 16 % à Saint-Gilles et 22 % à Ganshoren. Dans les CPAS, le taux moyen de statutaires est même de 20 %. Et pour cause : les communes qui se trouvent dans une situation financière plus compliquée ne peuvent plus se permettre ces nominations. Elles ont dû entamer une gestion plus dynamique de leurs équipes”, ajoute l'ancien échevin de Woluwe-Saint-Pierre.
La dynamique évolue dans le sens contraire au niveau régional. “Au SPRB (Service public régional de Bruxelles), le nombre de statutaires a augmenté de 21 % depuis le début de cette législature pour atteindre un taux de 68 % (1543 statutaires sur 2263 agents)”, souligne-t-il. Cette tendance n’est que la traduction de l’accord bruxellois de gouvernement. “Certains dirigeants politiques pensent qu’il faut faire plaisir en statutarisant des agents. Mais non. Il faut réformer ce système.”
Beaucoup de jeunes ne sont plus attirés par une sécurité d’emploi définitive et préfèrent un environnement de travail stimulant. Le monde a changé."
Christophe De Beukelaer dit ne pas craindre une diminution de l’attrait pour la fonction publique. Ni de défavoriser les jeunes fonctionnaires qui ne bénéficieront jamais des avantages de leurs aînés. “Beaucoup de jeunes ne sont plus attirés par une sécurité d’emploi définitive et préfèrent un environnement de travail stimulant. Le monde a changé. On doit pouvoir s’adapter extrêmement rapidement aux nouveaux métiers et aux nouvelles techniques. Il faut donc de la flexibilité, de la mobilité. Ce statut ne correspond plus au fonctionnement de la société.”
La suppression du statut des agents de la fonction publique serait contrebalancée. Les Engagés veulent supprimer la condition des prérequis scolaires lors de la sélection de candidats. Le diplôme ne serait plus qu’un critère de sélection parmi d’autres. “Le secteur public doit s’inspirer de ce qui se fait dans le privé. En Flandre, ils ne nomment plus de statutaires (Ndlr : ce sera théoriquement le cas dès 2024)”, reprend Christophe De Beukelaer, qui propose en outre de ne plus lier les barèmes aux diplômes. “Le seul facteur de progression dans la fonction publique, c’est l’ancienneté, ce qui n’est pas stimulant.”
Le député centriste plaide encore pour la mise en place d'une culture de la mobilité dans la fonction publique pour que les agents “évoluent selon les besoins de l’administration.”
Supprimer les cabinets ministériels
Cette grande réforme doit aussi permettre, dans son esprit, “la suppression des cabinets ministériels”.
”Il faut créer une fonction publique de l’excellence, pour que le ministre puisse faire confiance à l’administration. “
Les Engagés ne risquent pas, avec cette proposition, de se faire taxer de centristes mous… La réforme est même franchement libérale. “C’est avant tout une vision humaniste, pour l’épanouissement personnel et la méritocratie, recentre Christophe De Beukelaer. Nous la mettrons sur la table des négociations pour la formation d’un gouvernement bruxellois, en 2024”.