"Nous, on doit choisir: mourir de faim ou crever du coronavirus"
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Publié le 16-03-2020 à 16h01 - Mis à jour le 18-03-2020 à 12h28
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Le Barvis et tous les autres bars du parvis de Saint-Gilles, au centre de Bruxelles, sont fermés. Même le restaurant social de l’Ilot, une Asbl qui lutte contre le sans-abrisme depuis 60 ans, tourne à huis clos. A l’intérieur, on s’active, pour préparer des repas à emporter. A midi pile, une porte s’entrouvre: une table est glissée dans l’entrée, chargée des victuailles à distribuer aux personnes qui font une pseudo-file, en gardant plus ou moins un mètre de distance.
“C’est le seul endroit qui reste ouvert pour nous. Mais il faudrait des masques! On doit choisir entre mourir de faim ou crever du coronavirus”. Devant la porte, un assistant social, ganté de latex, désinfecte au spry les mains qui se tendent. L’homme empile des mandarines, une gaufre emballée et un yaourt sur la barquette de petites saucisses, purée, tomates. Il emporte un jus d’orange dans l’autre main.
Un repas chaud, tout de même. Marc approuve. “J’ai perdu mon appartement. Je viens ici depuis un mois. Je donnais un coup de main pour les dîners. Il y a onze tables de quatre. Tous les midis, ça faisait entre 40 et 50 personnes à la fois. Mais on ne peut plus rassembler des gens dans des espaces confinés. Alors, à la guerre comme à la guerre! Mais c’est très dur”, indique le quinquagénaire.

"On doit rester chez soi. Mais on n'a pas de chez-soi!"
Jérémie, 38 ans, vit à la rue depuis 2 ans. “Les instructions du gouvernement, c’est qu’on doit rester chez soi. Ben, faut avoir un chez-soi pour ça!”. Ancien chauffeur de bus désormais en invalidité à plus de 66%, Jérémie essaie de se laver les mains “le plus souvent possible”. Il venait prendre sa douche à l’Ilot, mais ce service aussi a dû fermer, à cause de l’épidémie de covid-19. Tout comme la Fontaine ou Rolling Douche... “Il faudra trouver des alternatives. Ca va être dur”.
Encapuchonné dans son anorak, Johnny, un abonné de longue date à l’Ilot, proteste à haute voix. “C’est quand même dommage qu’il n’y ait pas de chaises! Je vais m’asseoir où?”. L’ex-citoyen de Blankenberge, radié d’office par le CPAS côtier, n’a plus de revenu ni d’adresse. “J’ai 70 ans. Je sais que je suis à risque pour le corona”, dit-il moitié en français, moitié en flamand. “On verra ce qui arrive”.

