L’arrêté prolongeant le confinement est-il légal ? Pas sûr
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- Publié le 07-04-2020 à 23h37
- Mis à jour le 08-04-2020 à 08h38
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Pour combattre la propagation du coronavirus, de nombreux gouvernements ont, depuis la mi-mars, adopté des mesures de confinement de la population. Pour Me Stéphane Rixhon, non seulement ces mesures restreignent les libertés publiques des citoyens mais la manière dont le confinement a été prolongé jusqu’au 19 avril, par un arrêté ministériel du 3 avril, remet en cause la légalité du dispositif et, avec elle, la possibilité d’appliquer des sanctions (pénales notamment) en cas de violation du confinement.
Me Rixhon rappelle que la loi du 15 mai 2007 relative à la sécurité civile permet au ministre de l’Intérieur, en cas de circonstances dangereuses et en vue d’assurer la protection de la population, d’obliger celle-ci à s’éloigner de lieux exposés, menacés ou sinistrés et d’assigner un lieu de séjour provisoire aux personnes visées par la mesure. Il peut aussi interdire tout déplacement ou mouvement de la population.
Selon Me Rixhon, il n’appartient en principe pas à un ministre mais uniquement à la loi de limiter les libertés publiques et la loi ne peut pas confier à un ministre, mais uniquement au gouvernement, le soin d’exécuter les mesures qu’elle prévoit.
À ses yeux, un problème plus important encore se pose, s’agissant de la mesure de prolongation du confinement : l’absence de consultation de la section de législation du Conseil d’État, absence que l’État a justifiée par l’urgence. "Cette section est compétente pour formuler des avis juridiques sur toute une série de textes législatifs. Ces avis ne doivent pas forcément être suivis mais il est obligatoire de les demander, indique Me Rixhon. En effet, l’absence de demande entraîne l’illégalité de l’arrêté réglementaire, lequel pourrait ensuite être annulé par le Conseil d’État ou écarté par les cours et tribunaux."
On peut donc s’inquiéter de la légalité de l’arrêté de prolongation et, dans la foulée, d’éventuelles sanctions, administratives ou pénales.
Le gouvernement a invoqué l’extrême urgence pour justifier le fait qu’il n’a pas consulté le Conseil d’État, même dans le délai réduit de 5 jours, avant de prendre son arrêté de prolongation. Or, estime Me Rixhon, "si le 13 mars, date de l’arrêté installant le confinement, on pouvait invoquer l’évolution très rapide de la situation, le franchissement du seuil d’une pandémie, le temps d’incubation du virus et l’augmentation de la taille et du nombre de chaînes de transmission secondaires", une telle justification était devenue très discutable le 3 avril puisque le principe de la prolongation avait déjà été décidé une semaine plus tôt.