Prêts pour la phase 5 du déconfinement ? "Il faut une stratégie claire et efficace de dépistage des retours de vacances"
Les derniers chiffres complets fournis par Sciensano montrent que du 3 au 10 juillet, la moyenne des contaminations s’élevait à 95,3 par jour.
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- Publié le 14-07-2020 à 20h58
- Mis à jour le 15-07-2020 à 15h41
Face à cette hausse de 11 % par rapport à la semaine d’avant, "tout dépend du nombre de tests effectués, analyse le Pr Yves Coppieters (ULB). Il faut regarder le nombre de cas par rapport au nombre de tests. La semaine passée (sauf le week-end) on était entre 9 000 et 10 000 tests par jour. Un nombre assez stable, ce qui montre qu’il s’agit d’une réelle augmentation des cas. Cette semaine, on semble plutôt à 6000 tests par jour (le nombre de cas non consolidé est de 112, 105, 101 et 74 du 11 au 14 juillet, NdlR). Donc, c’est clair que si le nombre de tests diminue et que le nombre de cas reste stable ou augmente, c’est inquiétant avec le risque que l’incidence augmente (11 cas pour 100 000 habitants, à présent, NdlR). C’est ce qui pourrait arriver dans les jours à venir. Il faut ainsi souligner l’importance du testing. Il faut absolument maintenir tout l’été cette capacité de tests de 9-10 000 tests, voire plus avec le retour des vacances, par jour. Car si on ne garde pas cette capacité de testing tout au long de l’été, alors, on risque de sous-évaluer les transmissions dans la population. C’est aux pouvoirs publics à mobiliser des ressources humaines pour continuer ce testing de dépistage malgré les vacances."
Depuis la mi-juin, la moyenne journalière a fluctué entre 95 et 82 cas. On se trouve donc "toujours sur un plateau bas" de l’épidémie, mais plus dans une fluctuation baissière comme il y a plusieurs jours. "On a en fait maintenant les effets du déconfinement. Ils ne sont pas terribles, mais ils ne sont pas nuls non plus. Associés à un petit relâchement des gestes barrières, cela explique les remontées." Pour l’épidémiologiste, "on pourrait se trouver à la veille d’un rebond, mais pas d’une seconde vague" qui serait une réaugmentation des cas sous forme d’un doublement tous les X jours. "Ce n’est pas possible car on a le testing, les gestes barrières, les masques, une population informée et prudente… Un rebond - une hausse du nombre de cas, qui pourrait, à un moment donné, ne plus être tout à fait sous contrôle - c’est tout à fait possible, surtout si on diminue le nombre de tests. En cas de rebond, il faut être capable de le maîtriser par le testing et les autres outils de prévention. Il faudra aussi déployer une fois pour toutes la stratégie de suivi de contact (dont l’efficacité a aussi été critiquée par les experts au Parlement flamand lundi, NdlR), en lequel les gens ont peu confiance. Il faudrait par exemple des suivis de contact beaucoup plus proches des gens, via des relais associatifs ou communaux."

Est-on prêt pour la phase 5 du déconfinement ?
Dans l’état actuel, est-on prêt pour la phase 5 du déconfinement (élargissement des réunions à l’intérieur et à l’extérieur, etc.) discutée ce mercredi ? "C’est compatible avec l’état de l’épidémie s’il y a une stratégie claire et efficace de dépistage des retours de vacances et d’accueil des touristes sur notre territoire. C’est le paramètre qui change en Belgique par rapport à la phase 4."
Pour limiter la hausse actuelle, quelles mesures les autorités peuvent ou doivent-elles prendre ? "Outre assurer les capacités de suivi des contacts, la deuxième chose, c’est d’insister dans la communication autour des gestes barrières, et pas seulement là où c’est une obligation. Il faut réinsister au niveau des restaurants, des bars, du monde du travail, puisque les transmissions se font surtout chez les moins de 50 ans, dans la population active. Il semble y avoir à présent moins de télétravail (- de 50 %). Si les mesures barrières sont moins appliquées dans le monde professionnel, ce sera une situation favorable à la recirculation du virus. Que les gens portent les masques le plus possible, et adoptent les gestes barrières, y compris l’hygiène des mains."
Pour le reste, en termes de normes et de mesures, on est quasi au maximum, selon le médecin. "On pourrait encore rendre le masque obligatoire dans les salles de gym ou d’autres lieux clos par exemple, mais il faut travailler sur la communication. Je pense que les autorités doivent aussi réinsister sur les populations à risque, sans faire de discrimination à l’âge. Il ne faut pas tomber dans le piège des jeunes transmetteurs face aux plus âgés qui sont les populations plus fragiles. Mais il faut expliquer aux groupes les plus à risque que le fait qu’il y ait peu d’hospitalisations et moins de décès actuellement, c’est grâce à eux, parce qu’ils analysent leurs risques, continuent l’auto-confinement, et appliquent au mieux les gestes barrières."