"Les modèles de simulation ont des limites et des incertitudes"
- Publié le 24-10-2020 à 07h04
- Mis à jour le 24-10-2020 à 08h18
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Avec 3 649 patients hospitalisés en date du 23 octobre, dont 573 en soins intensifs, la Belgique continue d’assister, impuissante, à la poussée épidémique qui met chaque jour un peu plus les hôpitaux sous haute tension. Si l’on remonte dans le temps, au moment de la première flambée de mars-avril, c’est (presque) comme si l’on était revenu au 28 mars : à l’époque, 3 717 lits étaient occupés par des patients Covid-19, dont 789 en soins intensifs. Et, à l’époque, la Belgique était entièrement confinée depuis dix jours, ce qui n’avait pas empêché la progression de l’épidémie jusqu’au 6 avril (et ses 5 759 hospitalisations dont 1 260 en soins intensifs).

Prévoir, pas si simple
La comparaison s’arrête là. Car, si les chiffres sont semblables (avec une différence de 216 hospitalisations en moins en soins intensifs à l’heure actuelle, ce qui n’est pas rien), il est difficile de prévoir l’impact des mesures déjà prises (port du masque, fermeture de l’Horeca, couvre-feu) sur la progression actuelle de l’épidémie. Et ce, quelle que soit la façon dont on modélise l’évolution de la situation.
"Les modèles de simulation ont des limites et des incertitudes", explicite Niko Speybroeck, épidémiologiste et professeur à l’Institut de recherche santé et société (IRSS) de l’UCLouvain. "Ce qui est surtout compliqué à savoir, c’est comment le comportement de la population va changer dans le temps ou pas. Et quelles seront les interactions dans la population en fonction des mesures. Il est très compliqué de prévoir comment cela va évoluer. Même si on utilise un modèle de simulation qui est très bien fait."
Mais ne pouvait-on pas prévoir, au moins grossièrement, cette flambée qui contraint tous les hôpitaux belges à ménager 60 % des lits en soins intensifs pour des patients atteints du Covid-19 ? "Les modèles de simulation sont utiles pour tester des scénarios et dire : qu’est-ce qui se passerait si…, tempère Niko Speybroeck. Même si on a vu dans les médias, dans des articles scientifiques, plusieurs modèles qui ont été développés pour la Belgique et qui avaient déjà, pendant l’été, en mai et en juin, montré que si on ne faisait rien on allait avoir la courbe qu’on voit maintenant."
Une vilaine courbe qui n’a pas entraîné de nouveau confinement au niveau fédéral… mais a sans aucun doute poussé la Wallonie à resserrer durement la vis pour les semaines à venir. Et pour cause : toutes les provinces wallonnes sont dans le rouge en ce qui concerne le taux d’incidence (nombre de cas de Covid-19 sur les 14 derniers jours pour 100 000 habitants) : ce taux s’élève à 1383 dans le Hainaut, 1499 à Namur, ou encore 1909 à Liège. De même, ce taux est particulièrement élevé en Brabant wallon (1484) et Bruxelles (1470). Ailleurs, si les chiffres sont légèrement moins élevés, l’incidence continue d’augmenter de façon assez uniforme : +96 % en Flandre orientale, + 109 % en Flandre occidentale, +100 % dans le Limbourg…
Au niveau européen, la Belgique est toujours le second pays souffrant du plus haut taux d’incidence, derrière la République tchèque.
Augmentation des décès
Malheureusement, les décès augmentent également (environ 35 décès par jour actuellement, soit une hausse de 55 %), avec une majorité de décès survenus à l’hôpital (environ 26 à l’heure actuelle, soit une augmentation de 50 %), et environ 8 décès journaliers en maison de repos (+ 59 %). Un chiffre à surveiller de près : presque la moitié des décès liés au Covid-19 ont eu lieu dans les homes.