"C'est ça qui manque au niveau politique", "pas le bon exemple"...: l'infectiologue Leïla Belkhir recadre les décideurs
L'infectiologue aux cliniques universitaires, Leïla Belkhir, a pointé du doigt la "cacophonie" de ces derniers jours au sujet d'un assouplissement des mesures à Noël. Le ministre-Président bruxellois, Rudi Vervoort (PS), a estimé quant à lui que les experts n'étaient pas les derniers à afficher publiquement leurs dissensions.
- Publié le 10-12-2020 à 10h11
Les tensions sont palpables depuis quelques jours au sein du gouvernement au sujet d'un possible assouplissement des mesures sanitaires pour les fêtes de fin d'année. Si plusieurs partis de la majorité gouvernementale avaient plaidé en ce sens précédemment, c'est surtout le MR qui s'est retrouvé sous le feu des critiques ce week-end, après que Pierre-Yves Jeholet ait demandé que se tienne un Comité de concertation ce 18 décembre pour procéder à une évaluation de la situation.
Revenant sur son tweet auquel plusieurs experts avaient vivement réagi, le ministre-Président de la Fédération Wallonie-Bruxelles a ajouté qu'il n'était pas question pour lui d'alléger les règles, mais bien de discuter de l'évolution des chiffres - qui n'est plus aussi favorable que lors des semaines précédentes. Une précision que les experts, Philippe Devos et Leïla Belkhir, présents sur le plateau de la RTBF ont saluée, même si l'infectiologue aux cliniques universitaires Saint-Luc a regretté les discours divergents des politiques, ces derniers jours. "Je pense qu'une fossé se creuse mais que l'on appelle les Belges à être solidaires, a-t-elle fustigé. Je trouve que parfois ce n'est pas l'image reflétée au niveau politique. Quand on voit parfois vos messages sur Twitter, toute cette cacophonie, ce n'est pas le bon exemple." Donnant l'exemple de médecins ne partageant pas un avis similaire au sujet d'un patient, Leïla Belkhir a argué qu'ils ne se permettraient jamais d'émettre des doutes à l'égard de l'opinion de leur confrère devant le malade. "On règle le problème entre nous et ensuite on vient avec un message clair devant le patient, a-t-elle ajouté. C'est ça qui manque au niveau politique. Toutes ces discordances ajoutent de la confusion." "Les experts ont aussi régulièrement étalé leur division"
La remarque de l'infectiologue n'a pas plu à Rudi Vervoort (PS). Le ministre-Président bruxellois a estimé que le comportement des scientifiques n'était également pas irréprochable, parlant d'une "erreur collective". "Les experts de la santé n'ont pas non plus toujours été à l'unisson et ont aussi régulièrement étalé leur division, a fait remarquer le socialiste, pointant les divergences notamment entre néerlandophones et francophones. Je pense que nous avons des approches différentes dans ce pays. On n'a pas une opinion publique homogène."
Leïla Belkhir a alors défendu la cause des experts de la santé, qui "ne sont pas des élus". "Vous avez une légitimité de parole plus grande que beaucoup d'hommes politiques", lui a immédiatement répondu Rudi Vervoort sur le plateau de la RTBF.
De son côté, Pierre-Yves Jeholet a estimé que tout le monde - les politiques comme les experts - devait prendre ses responsabilités. "Nous n'avons pas tout bien fait, il faut avoir l'humilité de le dire, a-t-il conclu. Mais depuis le mois de mars, toutes les décisions que nous avons prises au niveau politique et que nous devons assumer ne sont pas faciles."
Ce n'est pas la première fois que le ton monte entre experts et politiques, qui ont parfois tendance à se rejeter la balle. L'ex-présidente du GEES, Erika Vlieghe, avait vivement fustigé les propos qu'avait tenu Jan Jambon à son égard durant le mois de juillet, jugeant que ce dernier tentait de lui faire dire des choses qu'elles n'avaient jamais formulées.