La réforme qui donne un vrai statut aux travailleurs du sexe hérisse certaines associations de femmes
Associer systématiquement la traite à la prostitution, c’est un raccourci, rétorque le ministre de la Justice.
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Publié le 07-07-2021 à 19h45 - Mis à jour le 07-07-2021 à 20h13
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La réforme des incriminations du Code pénal en matière sexuelle préparée par le ministre de la Justice, Vincent Van Quickenborne (Open VLD), vise à faire sortir la prostitution de la zone grise où évoluent les travailleurs du sexe.
Ce projet, soutenu par Utsopi (le syndicat qui réunit les travailleurs et travailleuses du sexe dans les bars, les vitrines, les salons de massage, en rue, à domicile...), veut permettre aux prostitué(e)s qui le souhaitent d’être protégé(e) s par un contrat de travail. Le texte clarifie aussi la notion de proxénétisme. L’actuel article 380 du Code pénal ne permet pas à deux prostituées de travailler ensemble en s’associant ou de louer un appartement ensemble, assimilant ces situations à du proxénétisme. Le texte précise ce qu’il faut entendre par proxénétisme - c’est-à-dire l’exploitation de la prostitution d’une autre personne en en tirant un avantage "anormal". La réforme veut aussi dépénaliser le racolage de rue et la publicité pour les offres à caractère sexuel dans un cadre privé.
Ce projet a réveillé les ardeurs des abolitionnistes, qui refusent toute reconnaissance de la prostitution, qu’ils voient comme une rampe de lancement pour la traite des êtres humains et la mise en danger de mineurs. Une trentaine d’associations de femmes appelaient mercredi midi à une mobilisation contre le projet devant le cabinet de la Justice. "Les victimes de violences sexuelles seront encore plus maltraitées et les auteurs mieux protégés", estiment-elles.
Le projet est en cours de finalisation
Interrogé en commission de la Justice, le ministre Van Quickenborne a rappelé qu’il avait consulté les centres spécialisés dans l’accueil et la prise en charge des victimes de la traite des êtres humains, ainsi que le syndicat Utsopi. Les personnes qui exercent de façon volontaire les métiers du sexe ne sont pas des criminels ; il importe en revanche de créer un cadre dans lequel ces activités peuvent se dérouler de façon plus sûre et plus transparente, a-t-il dit.
"Poser un jugement moral sur ces activités sexuelles qui ont lieu entre adultes consentants est aujourd’hui dépassé, ajoute-t-il. Associer automatiquement prostitution et traite des êtres humains est un raccourci auquel je ne peux souscrire. Les situations rencontrées dans le secteur de la prostitution sont très diverses et on ne peut pas catégoriser les choses de façon aussi simpliste. Par contre, il est clair que la traite des êtres humains à finalité sexuelle doit être combattue. Nous avons essayé de trouver une juste balance dans le projet de loi entre la nécessaire lutte contre la traite des êtres humains et une ouverture vers la création d’un statut encadrant l’exercice de la prostitution."
Le texte sera présenté dans les jours qui viennent au Conseil des ministres. Le débat devrait s’ouvrir en commission à la rentrée parlementaire de septembre.