Le casse-tête du relogement à Pepinster : "Nous avons identifié approximativement 44 maisons qu’il va falloir détruire"
Publié le 30-07-2021 à 21h01 - Mis à jour le 09-08-2021 à 21h35
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À Pepinster, deux semaines après le drame, si l’aide est toujours urgente, elle s’est davantage structurée. Entre le hall de sport métamorphosé en supermarché et le nettoyage en continu des rues encore encombrées, "on ne constate pas d’essoufflement de la solidarité, chacun donne le maximum", souffle Sonia Midré, chargée du service à la population de l’administration communale. Au travail malgré son poignet cassé, elle montre l’étendue des dégâts. La Vesdre et la Hoëgne ont complètement dévasté le centre-ville de Pepinster situé à leur confluence. Laconique, Sonia nous lâche : "Par ici, c’est le quart-monde."
Le relogement solidaire
La commune est quasi coupée du monde. Certaines routes d’accès sont surveillées par la police, les lignes téléphoniques fixes et le wi-fi ne fonctionnent pas. La commune a perdu la quasi-totalité de ses véhicules communaux. La modeste administration municipale, de plain-pied, a été totalement submergée.
Même problème pour le CPAS, également ravagé. "Les dossiers de plus de 200 personnes suivies sont perdus", se désole Marie-France Bréda, la directrice générale du CPAS de Pepinster. Installée provisoirement dans l’ancien hospice de la ville, sur les hauteurs, elle explique le processus de relogement des personnes touchées.
"Dès la décrue, nous avons eu de nombreuses propositions de volontaires pour l’accueil de sinistrés. Au début, c’étaient des propositions de dépannage pour quelques jours, voire une semaine. Désormais, nous avons un peu plus structuré les demandes et les propositions, en précisant bien la durée possible de l’hébergement proposé."
Car ce sont désormais de logements longue durée que les sinistrés ont besoin. Les maisons en bord de Vesdre, quand elles n’ont pas été emportées, sont étalées au sol ou encore coupées en deux. Celles qui n’ont souffert que des inondations commencent à dévoiler un nouveau fléau : la moisissure.
Pour faire face à la demande, la commune a mis à disposition certains appartements vacants le temps de la reconstruction, qui n’est pas vraiment à l’ordre du jour.
Une difficile reconstruction
Sur les hauteurs, le collège communal a installé son centre de crise à quelques encablures du centre-ville. Entre cageots de nourriture et sac de vêtements, l’échevine à l’Urbanisme Nathalie Levèque (MR) nous reçoit. "C’est ici que nous avons relogé les habitants les premières nuits." Là non plus, il n’y a plus ni téléphone fixe ni wi-fi. "On fonctionne à la 4G et au feutre." Elle expose la situation : "La crise du logement existait déjà avant dans la commune, désormais cela ne va qu’empirer."
À Pepinster, l’on est encore le nez dans le guidon et il est difficile de prendre de la hauteur. "On prend les problèmes un à un. À présent, c’est la délicate question de la sécurisation des bâtiments que nous devons aborder." De nombreuses maisons tordues par les éléments menacent en effet de s’effondrer.
"Nous avons identifié approximativement 44 maisons qu’il va falloir détruire. Mais le problème que nous rencontrons est qu’il faut informer les habitants que nous allons devoir détruire leur maison." Certains habitants restent injoignables et risquent ainsi de revenir chez eux sans plus rien n’y trouver.
"La deuxième urgence est de trouver des logements pour nos citoyens." Pour l’instant, ces malheureux peuvent profiter de l’aide d’autres citoyens. Mais cette solution exceptionnelle ne pourra pas tenir dans la durée. Que faire ? "La question n’est pas tant si l’on veut reconstruire, mais si l’on peut reconstruire. Certaines maisons étaient bâties selon des lois d’urbanisme aujourd’hui obsolètes. D’autres ont été construites malgré un avis défavorable de la commune."
Une possible reconstruction sur les berges de la Vesdre semble ainsi peu probable. Si des habitants ne souhaitent pas quitter ce qui constitue leur noyau de vie, d’autres ont été profondément affectés par les événements. Le simple ruissellement de l’eau provoque des réactions saisissantes : "Une dame m’a confié qu’elle préférerait qu’on lui annonce la destruction prochaine de sa maison, de peur de devoir y retourner."
Sans la volonté des sinistrés, ni celle du pouvoir public, la reconstruction en zones si hydrophiles est compromise. Il faudra penser à une reconstruction en périphérie, "en réinvestissant l’ancienne zone industrielle". Mais qui dit périphérie, dit décentrement et exil du centre-ville. En ligne de mire, c’est la dévitalisation de la vie communale et des pertes d’emploi éventuelles. Pour la commune et les habitants, ce dilemme urbanistique sera l’objet de débats. Mais plus tard, car pour l’heure, on panse encore à Pepinster.