"Ouvrir une pension de luxe pour chats, c’était vraiment mon rêve"
Charlie, Smoky, Thérèse… De nombreux Belges ont accueilli un nouvel animal de compagnie pendant la pandémie. Parce qu’il les rend heureux, pour combler la solitude, pour déstresser. Ce serait le cas de près d’une famille sur quatre, dit une étude. Deux sur dix, selon une autre. Dans notre pays, il y a au moins un animal dans 52 % des familles. Au fil des générations, chiens, chats et autres rongeurs ont pris une place considérable dans nos vies. La Libre vous propose d’explorer ce phénomène de société à travers six reportages.
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Publié le 01-08-2021 à 16h56 - Mis à jour le 03-08-2021 à 19h50
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Leurs portraits trônent en grand dès la porte franchie. Eux, ce sont les chats de Sarah, la propriétaire de l'Hôtel Hailie, une pension de luxe pour petits félins, calée entre un magasin de bricolage et une grosse salle de sport en plein centre-ville, à Uccle. Tous ces chats-là, elle les a adoptés ou chouchoutés en tant que famille d'accueil. C'est d'ailleurs en socialisant chez elle des chats sauvages recueillis par l'association Ever' y Cat, afin de les rendre aptes à l'adoption, que son intérêt s'est transformé en passion dévorante.
"J'ai voulu très vite m'engager pour les animaux. À l'époque où je travaillais en grande surface pour gagner ma vie, j'ai donc commencé à être bénévole dans cette association consacrée à la misère féline dans les rues de quatre communes bruxelloises", raconte la Bruxelloise. Cette expérience l'a fortement marquée. "J'ai vu de telles horreurs", témoigne-t-elle. "J'ai beaucoup pleuré. Je voulais absolument retrouver une vision plus positive basée sur l'amour de maîtres qui s'occupent bien de leurs chats." C'est alors que l'occasion se présente. L'ancien patron de l'hôtel cherche à remettre. Et Sarah saute sur l'opportunité en mars 2020, malgré la pandémie. Paralysée un temps par la crise, son activité a pris son rythme de croisière en juin dernier.
"Ouvrir une pension de luxe pour chats, c'était vraiment mon rêve. J'ai vécu une très mauvaise expérience avec une pension à laquelle j'avais confié mon chat Bengale. Je l'ai récupéré malade et perdu, peu de temps après. J'avais des idées précises de ce que je voulais faire et j'ai pu les concrétiser." Ici, les chats sont vraiment les rois. C'est d'ailleurs inscrit sur la vitrine. Tout est conçu pour leur bien-être.
Pristi se joint à notre conversation
Sarah nous accueille dans son petit bureau, collé derrière la vitrine. Juste la place nécessaire pour recevoir un visiteur. Pas un mètre carré n’est volé aux félins, dont le royaume commence juste derrière la porte vitrée qui sépare l’accueil du couloir. On va y avancer avec précautions, non sans avoir enfilé des couvre-chaussures roses. On n’est jamais trop prudents.
Aux murs, on distingue ce qu’on pourrait prendre pour de petites étagères vides. Ce sont en fait des niches dans lesquelles les chats sautent pour s’y lover. Pas là, on leur a fait peur. Pompom détale. Nous dépassons un petit salon de détente muni entre autres d’un grand écran plat. Cette pièce ouverte fait partie des espaces communs à tous les pensionnaires.
Les chambres se répartissent de part et d’autre du corridor. Pour préserver la tranquillité de ses protégés, Sarah a fermé quelques-unes des portes. Celles-ci aussi sont vitrées. Ils nous voient, nous aussi. Pas farouche pour un sou, Pristi se joint immédiatement à notre conversation. Ce jeune chat d’un an, très haut et très blanc, ne va pas nous lâcher d’un pouce. C’est pourtant son premier séjour.
Sarah poursuit la visite guidée. "L'hôtel compte une dizaine de chambres classées en quatre catégories : basique, standard, large et luxe." Elles diffèrent par leur surface et leur équipement. Petit ou grand arbre à chat, un ou deux paniers, etc. On voit des gamelles, des petits jouets et des litières bien propres partout. Le prix varie de 18 à 25 euros la nuit. Des tarifs particuliers sont prévus si plusieurs chats de la même famille occupent la même pièce. La nourriture est fournie par les propriétaires ou facturée en plus. Pour le reste, c'est du all inclusive, y compris les nouvelles envoyées aux maîtres selon leurs meilleures convenances, tous les jours, tous les deux ou trois jours ou une fois par semaine. "Je passe énormément de temps à faire des petits films, ça rassure les familles", raconte encore Sarah, qui, décidément, ne ménage pas ses heures. "Je reste avec les chats toute la journée dans leurs espaces, je ne suis pas tranquille quand je ne les vois pas." Entre ses missions de reporter, les deux nettoyages quotidiens, les repas à la carte pour chaque chat et les câlins, la journée passe vite même si elle compte parfois douze heures… "Je ne changerais d'emploi du temps pour rien au monde", assure-t-elle, épanouie.
Gamin, Vladimir et Syrius pointent un bout de truffe
Là, nous sommes arrivés au jardin. Parfaitement isolé et parsemé de fauteuils, de plantes, d'une petite piscine, d'une fontaine à eau et de tout un tas de jouets, le lieu est spacieux. "Certains chats ont droit aux sorties collectives, d'autres ne sortent qu'individuellement. Cela dépend des instructions des maîtres et du comportement de l'animal." Pour venir à l'hôtel, le chat doit être vacciné, stérilisé, pucé et, surtout, sociable.
C'est le cas de Gamin, Vladimir et Syrius qui pointent un bout de truffe. "Ce sont trois vieux clients. Ils reviennent ensemble souvent car leurs maîtres voyagent beaucoup." Ce sont d'ailleurs les disponibilités de l'Hôtel Hailie qui déterminent leurs dates de vacances ! "C'est comme ça pour beaucoup de clients puisque nos places sont limitées", témoigne la propriétaire. Les séjours oscillent généralement entre une semaine et deux mois. "Attention : le plaisir des chats est aussi important que celui des maîtres. Leur séjour ici doit être agréable pour eux. Les parents (sic) de Pristi (NdlR : qui est toujours près de nous) ont dit qu'ils voulaient lui offrir une colonie de vacances."
La demande dépasse l’offre. Tout est complet jusqu’à fin septembre. Sarah rêve de s’agrandir. Déjà.