Qui sont ces 8% de malades du Covid hospitalisés et pourtant totalement vaccinés?
Les patients vaccinés à présent hospitalisés sont immunodéprimés ou avec comorbidités. C'est ce que révèle un tour d'horizon des patients Covid hospitalisés dans différents établissements du pays.
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Publié le 19-08-2021 à 19h38 - Mis à jour le 19-08-2021 à 22h15
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Au CHU de Liège, la situation en chiffres des patients Covid ce jeudi 19 août à 9 h du matin était la suivante : 15 patients confirmés. Dont 10 hospitalisés dans les unités de soins Covid non USI (soins intensifs) : 4 sont vaccinés, 6 sont non vaccinés. Les 4 vaccinés (entre 60 et 75 ans) sont asymptomatiques et hospitalisés pour une autre raison (stabilisation diabète, autre pathologie non respiratoire… et cluster en maison de repos et soins). Sur les 6 non vaccinés, il y a des jeunes (nés en 83 et deux en 63) et une patiente née en 1936, qui avait refusé le vaccin. En outre, trois patients confirmés aux unités de soins intensifs (USI) : dont deux non vaccinés et un dont le statut vaccinal n’est pas connu. Et enfin, deux patients confirmés en US non Covid dont le statut vaccinal n’a pu être précisé.
Photographie instantanée, cet état des lieux communiqué dans le détail par l’institution liégeoise reflète assez bien les autres cas de figure récoltés dans divers hôpitaux du pays.
Tour d’horizon
Ainsi, à l'UZBrussel, ce même jour, 18 patients Covid étaient hospitalisés, dont trois aux soins intensifs. "La plupart des patients ne sont pas vaccinés et certains n'ont reçu qu'une seule dose au moment de l'admission", nous a-t-on dit au service communication.
Médecin intensiviste, chef de service aux Cliniques de l'Europe, site St-Michel, le docteur Vincent Collin compte aujourd'hui trois patients hospitalisés dans son service SI pour infection au Covid, dont aucun des trois n'est vacciné. "Il s'agit le plus souvent de patients allochtones, qui ont refusé de se faire vacciner par conviction ou parce qu'ils ont une vision différente de la vaccination, nous confie-t-il. Peut-être y a-t-il aussi un défaut d'information. Il faut à tout prix arriver à convaincre cette population."
Au Centre hospitalier universitaire et psychiatrique de Mons-Borinage, seul un patient était encore hospitalisé. "Les patients hospitalisés sont des personnes non vaccinées ou vaccinées de manière incomplète (seule 1 dose a été administrée)", a précisé la responsable du service communication.
Quant au CHU Saint-Pierre, centre de référence Covid, il s'agit du seul établissement hospitalier que nous avons contacté à ne pas avoir souhaité nous communiquer ces chiffres. Cette volonté de ne pas transmettre les données relatives au nombre de patients hospitalisés ainsi que leur profil a été prise "par la direction, depuis le début de la pandémie", nous a-t-on dit, en confirmant que ces chiffres étaient en revanche transmis quotidiennement à Sciensano. "Ce data reporting à Sciensano, quotidien, ne comprend pas d'information sur le statut vaccinal", nous a-t-on cependant confirmé par ailleurs.
Immunodéprimés et comorbidités
Aux Cliniques universitaires Saint-Luc, le Pr Pierre-François Laterre, chef du service des soins intensifs, a, quant à lui, souhaité commenter les chiffres du jour pour l'institution bruxelloise. Pour ce qui est de la situation actuelle, "nous avons, en unité Covid, 12 patients hospitalisés (soit environ le double d'il y a un mois), dont 2 sont 'full vaccinés' et 1 ayant reçu seulement la première dose de vaccin. En soins intensifs, il y a actuellement 11 patients, dont deux vaccinés complets."
"Une des patientes complètement vaccinée et admise aux soins intensifs a été vaccinée il y a plus de six mois, ce qui pose la question de la durée de la couverture vaccinale. Si elle n’a pas de traitement immunosuppresseur, elle est en revanche diabétique, obèse, hypertendue… Elle présente donc un certain nombre de comorbidités. Un autre patient vacciné complet en soins intensifs est immunodéprimé."
"On sait que chez ces patients, la prise vaccinale est moins bonne. Dans ce groupe-là, en effet, beaucoup ne développent pas ou peu d’anticorps, ce qui est assez logique dans la mesure où l’on atténue la réponse immunitaire pour traiter le patient malade. Or c’est précisément ces personnes immunodéprimées que l’on veut protéger. Après les personnes âgées, ils ont été, parmi les patients à risque, ceux qui ont bénéficié précocement des vaccins. Ceci pose deux questions : celle de l’efficacité du vaccin chez les personnes à risque et celle de la durée de la réponse."
Chez toutes les autres personnes qui ne sont pas immunodéprimées, "nous voyons essentiellement des non vaccinés, pour la plupart avec des comorbidités. La vaccination semble bien réduire l'incidence des formes sévères, poursuit le spécialiste. Mais aussi, cela veut dire que l'on va garder dans le futur, malgré la couverture vaccinale, une proportion de la population restant à risque sur du long terme."
Sur une période couvrant les six dernières semaines, on peut estimer, selon lui, à environ 8 % le pourcentage de personnes complètement vaccinées et malgré tout hospitalisées, dont la toute grande majorité est constituée de personnes présentant des comorbidités ou une immunodépression. Ainsi que des publics allochtones (environ 92 % des hospitalisations). "Beaucoup sont en effet encore méfiants vis-à-vis du vaccin. Ou alors, dans certaines populations, il y a un déni de la maladie", regrette le Pr Laterre.