La pénurie de soignants empêchera-t-elle l’obligation vaccinale ?
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Publié le 23-08-2021 à 19h50 - Mis à jour le 23-08-2021 à 20h17
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Vu les freins qui existent dans certaines professions de santé et certaines institutions, on se dirige vers une obligation de vaccination contre le coronavirus pour le personnel soignant. On n’y est pas encore, mais le Comité de concertation, réuni vendredi dernier, demande sous quelles modalités la vaccination pourrait être imposée à tous les prestataires de soins, y compris aux travailleurs indépendants, tant dans le secteur ambulatoire que dans les établissements de soins.
Les autorités ont annoncé une large concertation à ce sujet, dans une série d’instances comme le Conseil national du travail ou le Conseil supérieur pour la prévention et la protection au travail. Mais quelle sera l’attitude des syndicats à la table ?
"Rien de scandaleux"
Sur le principe même d'une obligation, Yves Hellendorf, secrétaire national pour le non-marchand à la Centrale nationale des employés (CNE), ne voit aucun problème : "Il n'y a rien de scandaleux. Le politique a le droit d'imposer la vaccination. D'ailleurs, les étudiants infirmiers sont obligés de se faire vacciner contre l'hépatite B et cela ne fait pas polémique." Mais le syndicaliste est plus dubitatif sur la mise en œuvre d'une telle obligation. "Si, dans une maison de repos, 10 % du personnel refuse la vaccination, que fait la direction ? Elle les écarte ? Elle les licencie ? On n'a déjà pas assez de personnel soignant… J'ai entendu un soignant dire : 'Si on m'oblige, je m'en vais.' Je ne sais pas quelle est la solution."
Yves Hellendorf se pose aussi la question du rapport coût-bénéfice. "Cela vaut-il la peine d'instaurer une obligation dans un hôpital flamand où 95 % des soignants sont vaccinés ? Y a-t-il un risque réel de relancer l'épidémie ? Dans une maison de repos bruxelloise où il y a 40 % de vaccinés, cela a plus de sens." Plutôt qu'une obligation généralisée, le syndicaliste verrait d'un bon œil un dispositif plus fin. "Mais il semble que l'on ne va pas dans cette direction", déplore-t-il, tout en soulignant que, si on ne libère pas les brevets des vaccins et qu'on ne vaccine pas dans le monde entier, les variants risquent bien d'entraîner une obligation vaccinale à répétition.
"On nous interdisait le masque et maintenant…"
Permanente CNE en charge du non-marchand à Bruxelles, Evelyne Magerat considère également que, d'un point de vue déontologique, le soignant doit se faire vacciner. Mais sur le terrain, "même si la majorité des soignants est vaccinée", elle constate que "certains n'acceptent pas cette obligation : ils disent qu'au début de l'épidémie on les a envoyés au casse-pipe sans protection ou presque. Certains se sont vu interdire le port du masque parce qu'on n'en avait pas assez. D'autres ont été obligés de travailler alors qu'ils étaient contaminés. Et ici, on leur impose la vaccination ! On n'avait pas assez de masques, alors on nous interdisait de le porter. Maintenant on a beaucoup de vaccins, alors il faut se faire vacciner. C'est un peu coercitif".
Evelyne Magerat souligne que "dans les institutions où il y a eu une bonne information au sujet du vaccin, sans culpabilisation, ni jugement, on a vu un taux élevé de vaccination". "Dans une institution que je connais, il y avait un médecin disponible 24 h/24 pour répondre aux questions des soignants. Et là, cela s'est bien passé. D'autres directions ont fait de la répression : ce n'est pas ce genre de discours qui parviendra à convaincre."