La Belgique restitue à l'Égypte deux statuettes pillées qui étaient exposées à Bruxelles

Le Service public fédéral Économie a restitué officiellement aux autorités égyptiennes deux statuettes qui avaient été pillées en 2015 et étaient exposées dans une galerie bruxelloise, lors d'une réception organisée jeudi en fin de matinée à Bruxelles, en présence du ministre de l'Emploi Pierre-Yves Dermagne et de l'ambassadeur égyptien Khaled El Bakly.

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La Belgique restitue à l'Égypte deux statuettes pillées qui étaient exposées à Bruxelles
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"Nous y sommes", a soupiré de satisfaction l'ambassadeur El Bakly, avant de regarder les deux figurines sous différents angles. Les statuettes, exposées sur une table, sont gardées par deux inspecteurs munis de gants spéciaux.

L'Inspection économique a commencé à enquêter sur le marché de l'art, depuis maintenant trois ans, plusieurs rapports montrant que ce secteur économique était lié à des incidents de blanchiment d'argent ou de financement du terrorisme. "C'était très clair: certains marchands d'arts étaient coupables de pratiques criminelles répréhensibles, allant de la pratique commerciale trompeuse, à la fraude pure et simple, en passant par la conception de faux documents", a résumé Pierre-Yves Dermagne.

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Entre-temps, une vingtaine d'enquêtes judiciaires ont été ouvertes par la Direction générale de l'Inspection économique, sous le contrôle de magistrats. "Nous nous occupons de petits dossiers, mais aussi de très gros, pour lesquels plusieurs centaines de pièces ont été saisies. Au final, cela concerne environ un millier d'objets d'art, sans que cela signifie qu'ils seront forcément tous restitués", a précisé l'Inspection économique. Les experts se chargent ensuite de déterminer s'il s'agit de faux, de pièces exportées illégalement, ou d'une erreur d'appréciation au départ. Souvent, les objets concernés proviennent d'Égypte et d'Italie, mais aussi du Yémen, de Libye et d'Irak. Pour ces derniers pays, comme c'est souvent le cas avec les découvertes archéologiques dans les zones de conflits, il pourrait s'agir d'un moyen de financement du terrorisme.

La découverte des deux statuettes égyptiennes rentrent dans le cadre des différentes enquêtes. Elles ont été saisies dans une galerie d'antiquités bruxelloises à la suite d'un signalement Interpol émanant des Carabinieri italiens. Les pièces provenaient en effet d'une fouille illicite menée dans le gouvernorat de Gizeh en 2015. Avertie de la présence des statuettes en question sur le sol belge, la République égyptienne a alors demandé à pouvoir récupérer son patrimoine historique. La Direction générale de l'Inspection économique, chargée de l'enquête, sous la houlette du parquet de Bruxelles, n'a pas réussi à identifier le propriétaire légitime des figurines. Par conséquent, elles sont remises aux autorités égyptiennes.

Les deux objets d'art possèdent une valeur historique importante.

La première, un ouchebti, est une statue funéraire en bois peint mesurant 17 centimètres de haut. Il s'agit d'un petit serviteur placé dans la tombe pour aider les défunts à réaliser divers travaux dans l'au-delà. C'est pourquoi, l'ouchebti, porte souvent un chapitre du Livre des Morts, qui l'enjoint d'obéir au défunt, ainsi que des outils pour pouvoir exécuter ses travaux. Compte tenu de la coiffure du personnage, qui représente vraisemblablement une femme, et du style de la statue funéraire, l'ouchebti date probablement de l'époque ramesside, située dans la 19e ou 20e dynastie du Nouvel Empire (1539 à 1077 av. J.-C.).

L'autre statuette est une figurine en bois d'un homme debout de 43 centimètres de haut, les bras le long du corps et la jambe gauche avancée. Des hiéroglyphes sont écrits à la surface du socle. Comparée à des statues funéraires similaires, cette pièce est d'une qualité remarquable. Elle a probablement appartenu à un dignitaire. Le pagne et le style de la figurine sont caractéristiques des premiers règnes du Moyen Empire (1980 à 1760 av. J.-C.). "La statue debout regarde devant elle, comme si elle regardait l'au-delà", a décrit l'ambassadeur égyptien, avec philosophie.

Cet événement était l'occasion de rappeler que les marchands d'art seront bientôt tenus, selon un nouvel arrêté royal, de s'enregistrer comme tels via un guichet d'entreprise, et d'en appliquer les différentes obligations inhérentes. À ce titre, le secteur de vente d'objets d'art devra mener des analyses de risques des clients avec lesquels un accord commercial est conclu, de même que le flou relatif à l'identité des propriétaires de pièces vendues à un prix supérieur à 10.000 euros ne pourra plus exister, sous peine d'amendes pouvant aller jusqu'à 1,25 million d'euros. Le règlement impose également de déclarer les soupçons de blanchiment d'argent et de financement du terrorisme à la Cellule de traitement des informations financières (CTIF).

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