"Un bouton nucléaire sur lequel il vaut mieux ne pas appuyer", "Du petit-lait pour les antivax", "Le purgatoire": la presse belge se positionne à la veille du Codeco
Voici ce que disent les médias francophones et néerlandophones du pays au sujet des mesures sanitaires évoquées ces derniers jours par les politiques et les experts.
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Publié le 16-11-2021 à 11h07 - Mis à jour le 16-11-2021 à 11h25
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Les autorités se réuniront une nouvelle fois, ce mercredi 17 novembre, pour resserrer la vis en Belgique. Au vu du rebond épidémique que connait notre pays, des mesures plus restrictives semblent inévitables. Mais doit-on aller aussi loin que ce qui a été évoqué par les experts du Gems (groupe d'experts chargés de conseiller le gouvernement), ces derniers jours ? Les médias belges se montrent divisés sur le sujet. Revue de presse.
Dans nos colonnes, nous rappelons à quel point la situation est délicate pour les médecins généralistes et pour les hôpitaux. "Certains évoquent des mesures pour "sauver Noël", alors qu'en réalité il faut sauver des vies maintenant et éviter que les victimes collatérales ne se multiplient cet hiver", avertissons-nous. Citant les règles sanitaires qui seront débattues au sein du Comité de concertation ce mercredi, La Libre appelle les autorités à trouver un "équilibre subtil". "D'autant qu'il serait étonnant que les mesures ne soient pas prolongées jusqu'à l'arrivée d'un traitement efficace ou jusqu'à la fin de l'hiver. Soit bien après Noël…", conclut notre journal.
Nos confrères de la DH estiment qu'il y a déjà "une leçon à apprendre" de la situation que nous connaissons actuellement. "Le vaccin n'est pas la solution miracle, la panacée qui nous permettra d'en finir avec la pandémie. Ça c'est une chimère, qu'il faut poignarder", soulignent-ils, invitant les autorités à faire preuve de "davantage de transparence et moins de fausses promesses".
"De l'huile sur le feu"
"Ça faisait longtemps et ça ne nous manquait pas", écrit L'Avenir , qui regrette de voir se répéter un scénario que l'on ne connait que trop bien. Concernant les mesures qui entreront possiblement en vigueur, le quotidien pointe que, bien que certaines soient "indolores", d'autres résonnent "comme un grand cri d'incompréhension". L'Avenir s'oppose ainsi dans son édito à toute nouvelle fermeture de secteurs. "Quel message enverrait-on, alors, aux nombreux citoyens qui ont écouté le message fédéral venu leur enjoindre de participer à l'effort vaccinal collectif si les décisions liberticides qui prévalaient – justement – avant le vaccin se révélaient identiques à celles prises après lui? Et, plus encore, aux antivax… qui boiraient du petit-lait et pourraient voir leurs rangs gonfler sans avoir besoin de recruter?"
Du côté du Soir, on fait part également du "grand ras-le-bol" de la population. "La capacité de faire face est sérieusement entamée dans une population qui a accumulé les dégâts psychologiques, sociaux et économiques", indique le média francophone. Le Soir estime également que les derniers événements amplifient la "recherche accrue du bouc émissaire". "L'annonce du retour du virus vient jeter de l'huile sur le feu des divisions dans une population qui s'est radicalisée entre vaccinés et non-vaccinés", détaille l'éditorialiste.
L'Echo se focalise davantage sur une mesure de plus en plus évoquée par nos hommes et femmes politiques: l'obligation vaccinale. Le quotidien financier la compare à "un bouton nucléaire sur lequel il ne vaut mieux pas appuyer". "Prônons plutôt la montée en puissance des outils existants", insiste L'Echo, citant notamment le masque, le Covid Safe Ticket et les tests antigéniques. "Des pistes existent, elles sont autant de contrats plus efficaces, plus réalistes et plus apaisés entre les autorités et la population."
Le problème des "chamailleries"
De l'autre côté de la frontière linguistique, on regrette que, comme à chaque nouvelle vague, de nouvelles tensions aient éclaté entre politiques et experts, comme on peut lire dans De Morgen. Le média flamand cible plus particulièrement la fuite du rapport du Gems, qui a suscité la colère de ses membres. "Cette colère est compréhensible. Une fois de plus, les experts sont présentés comme des êtres inhumains qui prennent plaisir à nous priver de liberté", écrit l'éditorialiste. Il pointe toutefois que la transparence concernant les avis rendus par les experts ne devrait pas poser problème. "N'est-ce pas précisément leur nature secrète qui contribue à leur donner un statut qu'ils n'ont pas ? Comme si ces avis confiaient une mission secrète aux politiciens qui ne peuvent que l'exécuter", détaille le quotidien.
Même son de cloche du côté de Het Laatste Nieuws, qui fustige également les disputes entre scientifiques et politiques. "Cela donne des vertiges de suivre toutes les opinions émises sur la quatrième vague", tancent nos confrères. "(...) Les chamailleries ne donnent pas lieu à davantage de clarté, à une base de soutien plus large ou à de la confiance." HLN estime ainsi qu'il faut commencer à penser à long terme, car ce rebond pourrait ne pas être le dernier. "Il est temps de rendre les soins de santé plus résistants en cas de tempête, afin que le pays ne soit pas ballotté à chaque fois que nous naviguons en eaux troubles."
Un "tabou" que l'on aurait dû briser plus tôt ?
"Il est stupéfiant de voir à quelle vitesse le virus fait taire les discussions", s'étonne De Standaard, se souvenant du débat autour du couvre-feu et plus récemment de celui concernant le Covid Safe Ticket. C'est l'obligation vaccinale qui semble désormais agiter les esprits. "Jusqu'à récemment, cela n'était guère envisagé, mais les circonstances ont évolué. Les personnes non-vaccinées représentent une lourde charge pour la société. Ils sont surreprésentés dans les hôpitaux et accroissent la nécessité de mesures préventives telles que les masques buccaux", regrette le média flamand, qui dénombre toutefois des inconvénients à cette obligation vaccinale. C'est pourquoi il invite les politiques "à bien réfléchir avant de prendre des décisions".
Het Nieuwsblad déplore quant à lui que l'on ait attendu jusqu'à aujourd'hui "pour briser le tabou" de la vaccination obligatoire. "Elle peut faire plus que résoudre le problème", commentent nos confrères, qui ne voient aucun problème juridique à une telle mesure. Ils suggèrent que cette obligation vaccinale aurait pu empêcher la quatrième vague. Surtout, elle permettrait de mettre un terme à la division inquiétante que l'on constate actuellement au sein de la société. "Les non-vaccinés sont considérés comme les instigateurs des vagues successives. Ils ont élevé leur liberté personnelle au-dessus du bien commun et poussent tout le monde dans la misère encore et encore. Cette polarisation est dangereuse", met en garde Het Nieuwsblad.
Het Gazet van Antwerpen revient sur les mesures évoquées, comme le port du masque dès 9 ans et lors de concerts. "Ce n'est pas agréable mais si ces inconvénients permettent au secteur de la musique de survivre et à nos enfants de ne pas prendre davantage de retard dans leur apprentissage, ce n'est qu'un petit prix à payer pour conserver notre liberté", constate le journal anversois. Il rappelle, qui plus est, que l'année dernière, à cette même période, nous étions "en enfer". "Aujourd'hui, nous sommes dans un purgatoire assez soft."