Il y a bien plus de cas de maltraitance dans les crèches flamandes que du côté francophone
En novembre 2022, 27 crèches flamandes avaient déjà été fermées sur l’année pour des cas de maltraitance. En Fédération Wallonie-Bruxelles, on évoque plutôt une moyenne de deux fermetures annuelles dans de telles circonstances.
Publié le 24-05-2023 à 11h28
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Ce vendredi, Céleste, une petite fille d’un an s’est étranglée avec le cordon d’un store et a dû être transférée d’urgence à l’hôpital. Elle est malheureusement décédée dans la soirée. Cela s’est passé à la crèche de Valensart au Sart Tilman à Liège. Une crèche parfaitement aux normes selon l’ONE (les stores à cordon ne sont pas interdits), et qui accueille essentiellement des enfants des membres du personnel du CHU de liège.
Ce n’est pas la première fois qu’un décès ou un enfant blessé est signalé dans une crèche. Mais, depuis peu, c’est plutôt des cas de maltraitance qui ont émergé, alors que dans ce cas-ci à Liège, il n’en est nulle question. Tout au plus, l’enquête qui débute seulement devra déterminer s’il s’agit biend’un accident ou s’il y a tout de même d’éventuels défauts de prévoyance.
Pour être plus précis, c’est principalement en Flandre que les cas de maltraitance, parfois avec décès, ont émergé ces derniers temps. Début 2022, un bébé est décédé des suites de blessures subies à dans une crèche gantoise. Dans les semaines et les mois qui ont suivi, divers abus en cascade ont fait surface, assez souvent dans des crèches où des problèmes avaient déjà été signalés par le passé. Le résultat est effrayant : en novembre 2022, 27 crèches flamandes, que l’on dit plus libres et moins contrôlées, avaient déjà été fermées sur l’année pour des cas de maltraitance. En Fédération Wallonie-Bruxelles, on évoque plutôt une moyenne de deux fermetures annuelles dans de telles circonstances.
Du côté de l’ONE, on explique ce faible chiffre par un intense travail en amont en matière de prévention. C’est l’Office qui délivre les autorisations d’exploiter une crèche, qu’elle soit située au domicile d’une gardienne ou dans un endroit extérieur. “Et depuis 2019, les normes à respecter sont encore plus strictes”, nous décrit Sylvie Anzalone, porte-parole de l’ONE.
Il y a d’abord ce processus en quatre étapes où les agents ONE accompagnent constamment les milieux d’accueil qui veulent ouvrir une crèche. “Une fois ouverte, chaque crèche reçoit chaque année au moins deux visites d’agents accompagnateurs ONE. C’est la norme minimale lorsqu’il n’y a aucun signalement particulier, lorsque rien ne laisse passer que quelque chose ne va pas”, poursuit la porte-parole.
Les agents vérifient les compétences, le nombre d’enfants par rapport à la capacité d’accueil, l’infrastructure, la sécurité des espaces intérieurs et extérieurs, les équipements, les jeux à disposition, et ils observent le travail de puéricultrices. “S’il y a des plaintes, des signalements, on va y aller plusieurs fois. Si on détecte une anomalie, ça peut être par exemple simplement l’écart entre les barreaux du lit qui ne serait pas aux normes, on aura beau nous dire qu’il a fallu remplacer des lits endommagés en urgence, il faudra vite y remédier et on donnera un délai. Pareil si, autre exemple, on constate des lacunes pédagogiques. Si malgré les rappels, il n’y a pas d’amélioration, l’ONE peut retirer ou suspendre l’autorisation. Pour les cas présumés de maltraitance, ce n’est facile pour l’ONE d’intervenir directement, on croule souvent sous les recours. Là, c’est la police qui intervient.”
Actuellement, il y a 1 246 crèches (hors milieux d’accueil familiaux), animées par environ 2 600 accompagnantes, en Fédération Wallonie-Bruxelles.
De nombreux cas de maltraitance dans les crèches
Les décès ou accidents de bébés dans les crèches reviennent souvent dans l’actualité.
En voici quelques exemples…
À Charleroi, une affaire de 2016 est en cours devant le tribunal correctionnel pour non-assistance à personne en danger. Mais tout reste possible quant au jugement futur : homicide involontaire, délaissement d’enfant, privation d’aliment… Trois puéricultrices sont inculpées. Il s’agira déterminer qui lui a donné à boire en insuffisance et qui a placé le bébé sur le ventre après avoir reçu le biberon.
Dans la crèche de Gand, évoquée ci-dessus, un bébé de 6 mois a été grièvement blessé il y a un an. Il est mort à l’hôpital du syndrome du bébé secoué. La gérante est inculpée d’homicide involontaire. Le père de la gérante, de coups et blessures ayant entraîné la mort sans intention de la donner. Des rapports d’inspection depuis 2015 ont montré que des parents accusaient le père de violences physiques envers les enfants, mais la gérante a toujours nié qu’il se passait quelque chose. L’homme nie avoir secoué l’enfant.
Autre cas : celui par exemple qui a conduit l’agence flamande Opgroeien à ordonner en novembre 2022 la fermeture d’une crèche d’Audenaerde en Flandre. Têtes dans les toilettes et gavage d’enfants ont été évoqués. Selon des témoignages de parents relayés à l’époque par nos confrères de Het Laatste Nieuws, “les enfants qui pleuraient trop restaient au lit toute la journée”.
La même semaine, une deuxième crèche située en Flandre a aussi été fermée en raison de soupçons de maltraitance à Keerbergen. La licence a été révoquée pour deux mois après une alerte concernant un enfant attaché au lit avec un ruban adhésif.
Toujours en 2022, le tribunal correctionnel de Namur s’est penché sur le cas de deux puéricultrices poursuivies pour maltraitance. Le parquet avait requis des peines de prison de 2 mois de prison. Les faits reprochés aux prévenues, la directrice de la crèche et une de ses employées, se sont déroulés entre 2011 et 2015 pour l’une et 2013 et 2016 pour l’autre. Le dossier a vu le jour en raison des dénonciations formulées par une stagiaire, corroborées par des constatations de l’ONE et de la police et par les plaintes de parents.
Un papa qui venait rechercher sa fille de 10 mois en avril 2012 avait constaté que celle-ci avait été enfermée dans les toilettes par la directrice de la crèche car elle empêchait les autres nourrissons de faire la sieste. Les policiers se sont rendus sur place plus tard en toute discrétion et ont assisté à une scène lors de laquelle la deuxième prévenue hurlait sur un bébé, avant de l’empoigner par une jambe pour le replacer sur la table à langer. D’autres faits de privation de soin et de négligence sont évoqués : rations de nourriture insuffisantes, enfants non changés ou lavés à l’eau froide, hurlements incessants des encadrantes, enfants isolés à cause de leurs pleurs, gavage des nourrissons jusqu’à ce qu’ils vomissent, enfants livrés à eux-mêmes,… Au final, le tribunal a constaté le dépassement du délai raisonnable et a déclaré les poursuites irrecevables. L’instruction n’avait pas connu d’avancements pendant près de 5 ans.
Céleste, une enfant de la crèche du Sart Tilman, décède : l’ONE n’interdit pas les stores à cordon
Suite au décès de Céleste, rien ne permet à ce stade d’affirmer s’il y a eu négligence ou s’il s’agit d’un accident. L’enquête n’en est qu’à ses débuts. En attendant, la crèche demeure fermée. Les normes ONE étaient respectées. Le bâtiment n’a que cinq ans et est contrôlé régulièrement. Aucune plainte n’est jamais parvenue à l’ONE concernant cet établissement.
Aucune norme ONE n’interdit les stores à cordon. Il y a juste qu’aucun cordon ne peut pendre en dessous d’1m50 de hauteur. “Il est vrai que les stores sont un matériel encouragé pour se protéger du soleil et comme semi-occultants durant les siestes”, nous précise Sylvie Anzalone, porte-parole de l’ONE.
Les puéricultrices bénéficient d’un soutien psychologique de la part du CHU mais ont interdiction de prendre contact avec les parents et de se rendre à l’enterrement sur ordre de police.