Face aux ambitions croissantes de Strasbourg, les autorités belges s’organisent pour renforcer l’attractivité de Bruxelles comme capitale de l’Europe
Le groupe de travail “Bruxelles 2030”, composé du chef de cabinet du Premier ministre et de celui de Rudi Vervoort, a été créé fin 2022 pour renforcer la position de Bruxelles comme capitale européenne. Il s’est réuni deux fois depuis janvier.
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- Publié le 28-05-2023 à 08h01
- Mis à jour le 28-05-2023 à 08h11
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Strasbourg, Strasbourg, Strasbourg. Ainsi La Libre résumait-elle le discours tenu par la Première ministre française Elisabeth Borne en novembre dernier, à l’occasion du 70e anniversaire du Parlement européen… à Strasbourg. Selon la cheffe du gouvernement français, c’est en effet dans cette ville alsacienne que “bat le cœur de la démocratie européenne”.
”Dans le monde entier, quand on dit “l’Europe a décidé”, on dit “Brussels has decided”, rétorquait Alexander De Croo dans la foulée. Bruxelles a beau abriter les sommets européens, le Conseil de l’Union européenne, un des deux sièges du Parlement et la Commission, l’Europe ne dispose pas de capitale à proprement parler. Ses institutions sont disséminées entre la Belgique donc, mais aussi le Luxembourg (siège de la Cour de Justice européenne), la France avec Strasbourg (qui abrite un des deux sièges du Parlement européen) et l’Allemagne avec Francfort (siège de la Banque centrale). Or, les États concernés, et la France en particulier, entendent bien renforcer leur politique de siège.
L’actualité de ces derniers mois a été interprétée comme un signal d’alarme par les autorités belges. La Commission, même si elle ne déménagera pas de Bruxelles, prévoit en effet d’y réduire son patrimoine immobilier.
”Cette situation est potentiellement une menace pour l’avenir de la position internationale de notre capitale”, soulignait la Chancellerie du Premier ministre dans une note interne destinée au Conseil des ministres, rédigée fin 2022. Dans ce document, le “16” proposait la création d’une cellule “Quartier européen 2030” visant à soutenir Bruxelles, alors que “le Luxembourg et Strasbourg mènent une politique de siège très active, parfois aussi hostile à l’égard” de la Belgique.
Un groupe de travail à haut niveau
”Plutôt qu’une cellule, c’est un groupe de travail à haut niveau, composé du chef de cabinet du Premier ministre et de celui du ministre-Président bruxellois Rudi Vervoort. Ce groupe s’est réuni deux fois depuis janvier”, nous précise le porte-parole d’Alexander De Croo. Sa mission est claire : ancrer durablement les institutions européennes à Bruxelles.
”La position de Bruxelles comme siège de l’Europe n’est pas remise en question, à part par les Français, et surtout en période électorale”, temporise pour sa part Pascal Smet, secrétaire d’État bruxellois en charge des Relations européennes. Ce sont pourtant ses services qui, avec la Chancellerie, ont rédigé la note dans laquelle ils constatent que “le Luxembourg souhaite attirer en particulier les organes de la Commission et que Strasbourg souhaite jouer un rôle de plus en plus important pour le Parlement européen.”
”Nous ne devons pas être nerveux, mais vigilants. Il faut nous efforcer d’offrir un bon service aux institutions. Car rien n’est acquis pour toujours, précise Pascal Smet. Le commissaire européen Johannes Hahn, responsable du Budget , nous l’a dit récemment : les relations entre les institutions européennes et la Région Bruxelles-Capitale sont excellentes. Surtout depuis qu’Alain Hutchinson (commissaire du gouvernement bruxellois chargé des relations avec les Institutions européennes) a été nommé, il n’y a pratiquement plus eu de couacs.”
Le déménagement prévu cette année de fonctionnaires des agences européennes dans le quartier Nord rencontre toutefois une vive réticence de la part du personnel concerné, en raison de la mauvaise réputation du quartier liée au trafic de drogue.
La liste des doléances européennes est bien connue des autorités belges. Elles ont été évoquées le 6 septembre 2022 par les membres du Bureau du Parlement européen, lors d’une rencontre avec le Premier ministre. Le Bureau a évoqué un certain nombre de leurs points d’attention bruxellois, comme le manque de logements et de possibilité de reconversion d’espaces de bureaux, la nécessité d’une zone neutre devant le Parlement, mais aussi d’un pont piétonnier et cyclable entre la place Schuman et la place du Luxembourg. En outre, le Bureau estime que l’aile Paul-Henri Spaak du Parlement européen doit être rénovée de toute urgence. Un message reçu cinq sur cinq par les autorités fédérales et bruxelloises.
Une liste de 17 projets
Le groupe de travail Bruxelles 2030 a également listé les 17 projets qui permettront de dynamiser le quartier européen. Parmi ceux-ci figurent la création d’une cinquième école européenne, à Neder-over-Hembeek, mais aussi le réaménagement de la place Schuman en un lieu de rencontre pour les Bruxellois, ou encore la reconversion d’immeubles de bureaux en logements résidentiels dans le quartier Schuman. Citons aussi le dossier du nouveau centre de congrès européen en face du Berlaymont. Il leur faudra toutefois s’accommoder de la lourdeur proverbiale des procédures urbanistiques bruxelloises.