Concours Reine Elisabeth: et pour conclure en beauté, deux sopranos, deux mondes

La perfection de Julia Muzychenko-Greenhalgh, la joie explosive de Carole-Anne Roussel.

Martine Mergeay
third laureate Julia Muzychenko-Greenhalgh (C) pictured during the finals of the Queen Elisabeth voice Competition 2023, at the Brussels' Flagey concert hall, Saturday 03 June 2023. BELGA PHOTO NICOLAS MAETERLINCK
Julia Muzychenko-Greenhalgh

La fièvre monte au Bozar, et c’est dans une ambiance survoltée que démarre cette fin de finale, ouverte sur l’entrée sensationnelle de la soprano russo-allemande Julia Muzychenko-Greenhalgh (en photo d'illustration principale), 28 ans, glissée dans une spectaculaire robe de satin rose poudre, décolleté généreux, épaules nues, manches bouillonnées, le grand jeu. Bon choix que l’air de Manon – “Profitons bien de la jeunesse” – (Massenet), inscrit dans le droit fil des moyens et du tempérament de la soprano (même si sa diction française est discutable). La voix est exceptionnelle – longue, brillante, souple, notant toutefois une certaine stridence dans le suraigu -, la conduite est parfaitement maîtrisée et les effets aménagés avec habileté (le public, subjugué, applaudit à chaque fin de phrase…). L’extrait de La Fille de la neige de Rimski-Korsakov est carrément sublime, avec ses longues phrases legato, suspendues, aux aigus pianissimo et expressifs, et on regrette un peu que la chanteuse reste dans la même ambiance avec une mélodie de l’opus 21 de Rachmaninov, tant on aimerait explorer chaque facette de son talent. L’occasion en sera heureusement donnée avec “E strano”, l’air mythique de Violetta dans La Traviata, de Verdi. L’introduction est sobre, recueillie (si l’on peut dire) et, aux moments où la passion déferle, sentiment amoureux, déni, sursaut, tout y est, en ce compris la puissance, le déploiement des couleurs, la maîtrise absolue des vocalises (seul le contre mi-bémol final sera un peu tendu, et encore…) et même l’émotion. La seule réserve portera sur le caractère convenu du jeu scénique et, en amont, de l’esthétique générale de l’interprétation.

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