Steve Hiett, la star tranquille
Star du festival de Hyères 2014, Steve Hiett était le président du jury pour la photographie. Et, dans le même temps, reparcourait, avec humilité, son parcours d’artiste photographe.
Publié le 14-05-2014 à 09h34
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Star du festival de Hyères 2014, Steve Hiett était le président du jury pour la photographie. Et, dans le même temps, reparcourait, avec humilité, son parcours d’artiste photographe.Aurore Vaucelle Envoyée spéciale à Hyères Parmi la foule ultrasapée de la Villa Noailles, façon modeux en vacances, un petit bonhomme se promène, les mains croisées dans le dos, en K-Way à carreaux. Jean-Pierre Blanc, président du festival de Hyères passe dans les différentes expos, fait une présentation élogieuse des artistes, et puis vient le tour de Steve Hiett, exposé dans la salle de squash de la Villa. Tout le monde se précipite, pousse un peu pour voir l’œuvre du grand Hiett. Dans la foule, un petit monsieur refuse d’entrer, tergiverse, dit que franchement tout ça n’est pas nécessaire. C’est Steve Hiett lui-même, qui refuse, un peu ronchonnant, tout ce flonflon autour de sa rétrospective.
Pourtant, le vénérable Hiett mérite bien un peu de strass, lui qui a compté et continue de compter (!), dans la construction de l’esthétique de la mode. Dans la fabrication de l’image de mode. Curieusement, tout ceci ne l’avait pas effleuré au départ. A Raphaëlle Stopin, responsable de la section photographie à la Villa Noailles, il a raconté que, lui, quand il était petit, il voulait plutôt être chauffeur de bus. Histoire de pouvoir regarder défiler le paysage tranquillement. Et puis, sans doute parce que ce n’est pas supersimple d’expliquer à ses parents qu’on veut regarder le paysage en guise de profession, il choisit la peinture. Pas plus facile à justifier auprès du parent inquiet, vous me direz.
Mais il n’est pas fait pour tenir un pinceau, lui, ce qu’il aime "c’est l’odeur de la peinture et l’idée de peindre" . Il bricole des photomontages avec ses potes créatifs jusqu’à ce que la musique lui tombe dessus. Et là, il se dit qu’il a vraiment tout compris. C’est parti. Tournée, disque, concert et puis, le ciel lui tombe sur la tête. De façon incongrue, il se prend un coup de jus sur scène. Guitare pas contente. Stoppé net en pleine note, il se retrouve à photographier la tournée depuis le bus (encore un bus), à travers les vitres, et voilà que le photographe est né. Un début de photographe qui explique sans doute pourquoi son cadre est toujours un peu décalé. Pas parfait, singulier. Le "Blow Up" d’Antonioni, inspiré d’un photographe mangé par son art ne transforme pas Hiett en un photographe à big ego.
Il part pour Paris. Les pigments dans le ciel de la capitale française le séduisent et s’il travaille en studio, comme la photo de mode y invite, il sort de plus en plus dans la ville. Les citadines deviennent son sujet de prédilection, le tout dans un décor dans lequel il se fait maître de la couleur. Le flash derrière, la fille devant : une technique qui fera date, et qui est devenue une marque de fabrique. Plébiscitée par "Vogue", "Harper’s Bazaar", ou "The Face".
Léchée, propre sur elle peut-être certes mais pas que. Ou alors c’est parce qu’on n’a pas bien vu. Dans la photo de Mister Hiett, plane une ambiance à mi-chemin entre réalité et fantasme du réel. Les filles sont sublimes, les jambes infinissables, le regard profond, la mine mélancolique. Steve Hiett a le don d’ajouter à sa photo de mode un artefact, un objet, une rumeur, qui fait douter. Qui amène à se demander ce qui se passerait si on traversait le cliché. Ah, non, la photo de mode, avec Steve, ce n’est pas qu’une histoire de chiffons assurément.
Les expositions de la Villa Noailles sont ouvertes au public jusqu’au 25 mai. Alors, vite on se dépêche.