Des Brasseurs résolument anticonformistes
Après vingt ans d’activités soutenues en voies de traverse par rapport aux autoroutes commerciales de l’art, Les Brasseurs, véritable institution artistique liégeoise sous la houlette de Dominique Mathieu, fermait ses portes en 2013, faute de lieu.
Publié le 24-11-2014 à 19h11 - Mis à jour le 24-11-2014 à 19h12
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A Liège, réouverture du centre d’art Les Brasseurs dans un espace Art déco.Après vingt ans d’activités soutenues en voies de traverse par rapport aux autoroutes commerciales de l’art, Les Brasseurs, véritable institution artistique liégeoise sous la houlette de Dominique Mathieu, fermait ses portes en 2013, faute de lieu. Nomades, les protagonistes intervenaient épisodiquement en festivals et autres événements temporaires. Pendant ce temps, ils étaient quelques-uns à rêver d’une réouverture et donc à s’activer. Recherche d’un nouveau lieu, formation d’une équipe, soutien financier indispensable. Un an plus tard, en cette fin novembre, le défi est relevé. Cinq jeunes imbibés d’art, passionnés, résolus à réussir bien que lucides sur les difficultés à vaincre, viennent d’inaugurer Les Brasseurs bis au centre de Liège, non loin du Bal et à deux pas de l’ancien espace. Un ancien magasin, les établissements Jean Box, construits au début du XXe siècle en style Art déco. Un vaste espace de près de 400 m2 avec escalier monumental et mezzanine, situé à quelques minutes de la place Saint-Lambert. Un lieu aux multiples possibilités avec une double et large vitrine éclairée la nuit.
Continuité d’esprit
Le positionnement de cette nouvelle équipe est clair. Elle avance dans la continuité de l’esprit qui a toujours présidé aux Brasseurs et renforce même son opposition à la conformité ambiante. Elle se pose résolument en soutien de la création, plutôt jeune, audacieuse jusqu’à l’expérimental, indépendante du mercantilisme qui entend de plus en plus régir la production, la diffusion, la monstration de l’art, jusqu’à investir les institutions officielles. Le projet inclut une dimension éducative avec ateliers, animations diverses, et mise sur "l’authenticité". L’équipe, dirigée artistiquement par Yannick Franck, y va d’une déclaration sans ambages : "Convaincus que le compromis est la mort de l’art, nous nous engageons à suivre un chemin résolument désintéressé et intègre. […] Nous nous revendiquons d’une philosophie solaire et généreuse, garante d’un esprit conscient, frais et dynamique, résolument anticonformiste".
Dans cette ligne, quasiment de combat, les difficultés ne manqueront pas. La première sera d’assurer le financement adéquat de la programmation et du fonctionnement. En tête de liste des objectifs, récupérer la dotation complète que la Fédération Wallonie-Bruxelles accordait aux Brasseurs. Elle a été drastiquement réduite. Un beau dossier pour la nouvelle ministre en période annoncée de vaches maigres !
En second, poursuivre sur le même principe de fonctionnement avec le privé et sur une programmation conçue par cycles. Le septième, pour les quatre ans à venir, est : "Septième Ciel".
Résister aux sirènes
Première nouveauté dans la programmation : un espace vitrine de 84 m² réservé à la jeune création, géré indépendamment et en connexion avec le milieu professionnel de l’art et de l’enseignement. En cette "une" publique pour l’ouverture, un canot en bouées de sauvetage réalisé par Cathy Weyders. Impact garanti. Message reçu.
L’exposition d’ouverture, qui réunit cinq plasticiens, ne fait pas mentir les intentions affichées ni la thématique du jour : "Résister aux sirènes". Marie Zolamian montre les dessins d’enfants palestiniens évoquant leur situation, tandis que le second Liégeois, Jonathan De Winter, a construit - bricolé plus exactement - deux sculptures habitables d’où déferle une musique chaotique. Le Barcelonais Marc O’Callaghan a réalisé de grands dessins sur toile fourmillant de symboles et références, alors que la pièce "Transcendental Geology" met en scène un ouvrage qui fait éclater les horizons. Quant à Karl Van Welden (Gand), il évoque en vidéo la force d’attraction de Mars, planète et dieu de la guerre.
--> Les Brasseurs Art contemporain, 26/28 rue du Pont, 4000 Liège. Jusqu’au 17 janvier. Du mardi au samedi de 14 à 18h. Fermé du 23/12 au 04/01.