Denis Meyers a commencé la destruction de son oeuvre titanesque à Ixelles

Texte : Jonas Legge / Photos : JC Guillaume

Plusieurs fois reportée, la destruction des anciens locaux de Solvay, à Ixelles, a officiellement débuté ce jeudi matin. Avec elle, c'est une oeuvre en tant que telle qui va disparaître puisque, depuis 16 mois, l'artiste Denis Meyers avait investi les lieux pour son projet "Remember-Souvenir".

Le résultat de ce travail titanesque : près de 30.000m2 de murs, plafonds, fenêtres et autres radiateurs recouverts des mots (surtout des verbes à l'infinitif) et des personnages aux traits si caractéristiques de l'artiste. Pour y parvenir, le typographe a vidé 2.500 bombes aérosols.

Symboliquement, Denis Meyers a lui-même donné les premiers coups de pelleteuse avant de céder la main aux ouvriers.

"C'était prévu qu'il soit détruit, je n'aurais d'ailleurs pas eu cet accès et cette liberté si le bâtiment n'était pas voué à disparaître", confie l'artiste à LaLibre.be. "En ce moment, mon sentiment est donc mitigé. Je suis triste de voir partir 16 mois de ma vie et l'équivalent de 20 ans de carnets de dessins reproduits sur des murs. Mais je suis aussi euphorique car c'est la touche finale de ce projet. Dans les jours et semaines qui viennent, quand le bâtiment sera détruit, ce sera moins marrant…"

Denis Meyers admet également qu'il ne sera pas facile de tourner la page après s'être exprimé sur un tel terrain d'expérimentation. "Ne plus retrouver un tel projet à l'avenir est une crainte. Je n'ai qu'à me remettre en question et me lancer des défis. Il n'y a pas que l'ampleur qui compte. Ce qui importe, c'est le contexte, l'histoire à raconter, les gens à toucher…"

Le typographe se réjouit que, grâce à "Remember-Souvenir", sa démarche et ses capacités ont évolué. "J'ai beaucoup parlé de moi dans ce projet, il est temps de retranscrire les histoires d'autres personnes sur les murs. Je souhaite enfiler une casquette d'écrivain-dessinateur, comme je l'ai fait à l'Île Maurice avec Moris Dime. Je souhaite également sortir de l'ombre une partie du patrimoine belge."

"Remember-Souvenir" ne disparaît pas complètement

Une fois la destruction accomplie, les promoteurs Immobel et BPI pourront s'atteler à la construction d'appartements de standing. "Remember-Souvenir" ne va cependant pas complètement disparaître puisqu'un imposant ouvrage imprimé sera édité avant la fin de cette année et un documentaire vidéo sera monté prochainement.

Pour rappel, en mai dernier, pour saluer la performance de Denis Meyers, "La Libre" s’était associée au graffeur pour proposer une édition collector du journal (voir ici).

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