Joachim, street artiste en pleine lumière
Publié le 12-04-2017 à 14h44 - Mis à jour le 12-04-2017 à 14h46
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Après avoir métamorphosé Lier, le Belge a couvert de fresques un nouveau lieu d’exposition à Bruxelles.Art clandestin et illégal à ses origines, le street art s’institutionnalise et devient objet de commande. Il suscite encore régulièrement la polémique, voire le scandale, quand il s’affiche sans autorisation sur les murs des villes (comme les récentes fresques à connotation sexuelle apparues sur les murs de Bruxelles). Mais certains artistes travaillent aussi en concertation avec les autorités - au risque de paraître hérétiques aux yeux des street artistes puristes.
Joachim - son nom d’artiste - appartient à cette nouvelle génération qui travaille en pleine lumière. "J’ai pratiqué le street art de façon clandestine, précise-t-il. J’ai même été arrêté quelques fois. Mais quand tu travailles de cette manière, tu dois agir vite : je n’étais jamais satisfait de mes fresques."
Ces deux derniers mois, Joachim a recouvert de fresques un ancien club de sports, place du Châtelain, à Bruxelles, avant sa rénovation en nouvelle espace d’exposition de la galerie Huberty&Breyne. A l’instar de Denis Meyers qui avait investi en 2016 les anciens bureaux Solvay à Ixelles avant démolition, Joachim a œuvré en sachant que son travail serait éphémère.
Intitulé "Till Death Do Us ‘Art’" (jeu de mots sur l’expression anglophone "Jusqu’à ce que la mort nous sépare"), sa série de fresques vibre de couleurs, de silhouettes dynamiques, d’emanata (ces petits traits qui suggèrent un mouvement ou une émotion). Il joue avec les contraintes de l’espace - en utilisant des vitres intérieures ou en intégrant avec humour un extincteur dans une composition.
Une vocation née à l’âge de six ans
C’est à l’âge de six ans que Joachim a découvert le street art, à Anvers. "J’étais dans un bus avec ma grand-mère. Nous sommes passés devant un mur couvert de graffitis. Ma grand-mère m’a expliqué ce que c’était. J’ai décidé à cet instant que je voulais moi aussi faire du street art."
C’est dans son école d’art qu’il a rencontré pour la première fois des street artistes et qu’il les a suivis sur le terrain, forgeant son style. On y retrouve une influence manifeste de Keith Haring - un des pionniers du genre, à New York. "J’aime son côté obsessionnel. Il a produit en quelques années une œuvre que d’autres mettent une vie à réaliser. Son génie, c’est sa simplicité, et un trait immédiatement reconnaissable. Ses silhouettes sont identifiables entre toutes. On pense que c’est facile de les reproduire, mais si vous essayez, vous n’y arriverez pas."
A l’instar d’Haring, on peut raccrocher un Joachim au mouvement de la figuration libre. Ses personnages et motifs symboliques évoquent la bande dessinée, mais aussi le large corpus de la culture populaire - ce qui relie Joachim et les artistes habituellement présentés chez Huberty Breyne.
Nourri aussi d’art moderne - il cite autant Van Gogh, que Magritte, Pollock ou Rothko - Joachim a gagné en notoriété internationale depuis cinq ans.
Lier Up
L’année dernière, il a mené à son terme son projet le plus ambitieux à ce jour : Lier Up, série de quatorze fresques murales, développée avec les autorités de sa ville natale. "Je suis allé voir le bourgmestre et je lui ai proposé de créer un parcours de fresques, comme à Bristol." Joachim a repéré les façades qui l’intéressaient et a été voir les propriétaires des bâtiments. "J’ai été surpris de recevoir près de 80 % de réponses positives."
Le travail au Châtelain fut cette fois légèrement différent. "Dans la rue, explique Joachim, les street artistes recherchent l’adrénaline. Moi, je suis plus en quête d’exprimer toute une série d’images et de formes. Je peins d’abord pour moi. Peindre sur un mur ou un sol, c’est un combat, contre la surface, les matériaux. On peut préparer des esquisses, mais il faut rester spontané et instinctif. Il faut éviter de trop réfléchir à ce que l’on fait."
Chaque nouveau projet le fait évoluer. "C’est imperceptible, comme avec un enfant. Si tu le vois tous les jours, tu ne notes pas qu’il grandit. Mais si tu le revois après six mois, tu verras combien il a changé."
- "Till Death Do Us ‘Art’", du 26/04 au 19/05. Huberty&Breyne Gallery, 33 place du Châtelain, 1050 Bruxelles.