Expo : la venue d'Olafur Eliasson crée l'événement à Ostende
Publié le 13-08-2017 à 13h53 - Mis à jour le 13-08-2017 à 13h54
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Il expose des œuvres intimes et poétiques à la Fondation 11 lijnen, à Oudenburg. A partir du 8 septembre, au milieu des champs.
Olafur Eliasson, l’artiste islando-danois né en 1967, résidant à Berlin, nous invite chaque fois à de vrais voyages aux limites de nos perceptions. Son gigantesque « soleil » installé en 2003 dans la Turbine Hall de la Tate à Londres fut un triomphe. La foule venait s’y réchauffer. Comme furent des succès, ses cascades installées sous le ponts de New York, ses icebergs déposés sur la place de Copenhague et Paris, pour alerter sur le réchauffement climatique et la rivière de 180 tonnes de moraines glaciaires venues d’Islande qui avaient envahi les salles du musée Louisiana à Copenhague. L’an dernier, il occupait Versailles, proposant entre autres, une énorme cascade suspendue dans le vide !
L’artiste est la tête à Berlin d’une vraie entreprise de plus de 90 personnes de 25 à 85 ans (techniciens, informaticiens, scientifiques, etc.) qui inventent et produisent des installations et des architectures, souvent spectaculaires, mais toujours avec un consonance écologique, ou jouant sur nos sensations.
Olafur Eliasson, père de deux enfants adoptés en Ethiopie, s’est aussi fortement impliqué dans les bouleversements climatiques de la planète et dans l’avenir de l’Afrique. Dans de nombreux musées du monde (et désormais aussi à Ostende), on vend sa « little sun », lampe solaire qu’il a imaginée, au profit des villages africains privés d’électricité. Il en déjà amené plus de 200000 en Afrique.
Sa venue à Ostende le vendredi 11 août, était donc un événement.
Intime
On se demandait ce qu’il ferait à la Fondation 11 lijnen, petit lieu privé, si intime. Un peu après Jabbeke, avant d’arriver à Ostende, elle se trouve dans le village d’Oudenburg. En s’aventurant sur un chemin étroit entre des chevaux de trait qui vous fixent placidement et des paysans à vélo, on découvre un vrai petit bijou. Derrière une grille et une haie de saules, une ferme carrée à l’ancienne, avec sa grange qui déborde de ballots de paille géants. La ferme date de 1690. Avec son mari, Griet Dupont, pédopsychiatre a décidé de transformer le lieu en un mixte original : ferme, lieu d’art et lieu de vie. La ferme continue sans bétail.
Griet Dupont, elle, a toujours été fascinée par l’art. Le couple a fait appel au grand architecte portugais Alvaro Siza, prix Pritzker en 1992, qui fut tout de suite séduit par la beauté du site, son horizontalité, l’infini des ciels, la brume sur les prés, la qualité de la lumière, le calme. Il a largement conservé les volumes et les façades anciennes en brique. L’extension faite reprend les mêmes volumes mais avec une toiture en plomb et des bardeaux verticaux de cèdre rouge. Chaque fenêtre offre une vue comme un tableau sur le paysage de Flandre.
Terminée en 2001, la maison se transforma depuis, partiellement, en galerie d’art.

Retour à la campagne
« Cet environnement a une grande qualité de contemplation et offre une possibilité de ralentir », explique l’artiste. Hans Ulrich Obrist en a assuré le commissariat: « C’est la quatrième fois, nous dit-il, que j’y organise une exposition et chaque fois les artistes sont pris par le ‘génie du lieu’, son côté unique. Aujourd’hui dans le monde, il y a de plus en plus de musées d’art contemporain dans les villes et qui se ressemblent souvent. On sent la nécessité de retourner vers la campagne, de retrouver l’échelle de la nature. S’il y a bien un architecte qui a étudié la ville, c’est Rem Koolhaas, or, aujourd’hui, il étudie les campagnes. »
Pour cette expo inaugurée vendredi mais ouverte au public le 8 septembre, Olafur Eliasson a réalisé 36 très beaux mobiles suspendus au plafond, poétiques (il en montre 18). Comme des oeuvres de Calder ou Panamarenko, ce sont chaque fois des petites sculptures avec des éléments d’alchimiste: météorite, bloc de lave, bois flotté ou fossilisé, prisme de verre, fil d’acier, verre coloré. Dans chacune, il y a un aimant qui la transforme en boussole indiquant le nord. Le tout forme un exercice ludique, alphabet de formes et d’instruments de navigation imaginaires. Evoquant tantôt le microscopique, tantôt les planètes.
Sur les murs, il a disposé sur des bois flottés venus de Sibérie toute une série de plaques de verre superposées et colorées. Ils les appellent « Deep ocean void », anticipant le moment où la mer envahira les polders belges. Le verre a été réalisé à partir du sable issu de la fonte des glaciers du Groenland. Dans chaque plaque, un trou et derrière un soleil. La lumière joue sur les transparences et invite à la contemplation.
On montre aussi son grand livre fait de plaques de verre colorées.
Dans l’autre salle, trois grandes aquarelles et dessins, des monochromes vert, bleu et rouge, à la limite du visible, créant des formes et des reflets éphémères.
Sur la pelouse de la Fondation, il avait dessiné pour l’inauguration un labyrinthe de poudre des glaciers, comme on dessine les lignes d’un terrain de football. Un labyrinthe pour se perdre dans l’art au milieu des champs et quitter l’agitation du monde….
Olafur Eliasson, « Recalibrating the senses ». De 11 lijnen, Groenedijkstraat, 1, Oudenburg, à partir du 8 septembre jusqu’au 28 octobre, ouvert les vendredi et samedi de 14h à 18h et sur rendez-vous. www.de11lijnen.com