L’histoire de la Jonction, le cauchemar des Bruxellois
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Publié le 16-06-2018 à 10h24 - Mis à jour le 16-06-2018 à 10h46
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Revenir sur la Jonction Nord-Midi, traumatisme s’il en est, permet de réfléchir à Bruxelles aujourd’hui.
Dans l’imaginaire des Bruxellois, la construction de la Jonction Nord-Midi reste « le » traumatisme qui a saccagé la ville, le premier symbole de la « Bruxellisation ». Même 66 ans après son inauguration en 1952 par le roi Baudouin, on évoque encore les quartiers anciens détruits, la coupure induite entre haut et bas de la ville, l’urbanisme sauvage.
Une très intéressante exposition au Civa, à Bruxelles, revient sur l’histoire de la Jonction et des lieux emblématiques construits sur son parcours: gares du Midi, Centrale et du Nord, Mont des Arts et Bibliothèque Albert Ier, Cité administrative. Elle expose une histoire plus nuancée, avec comme commissaire Audrey Contesse, avec 150 documents rares d’époques dont 80 % n’avaient jamais été montrés et 60 projets anciens et avortés. Une histoire qui peut éclairer les enjeux actuels de l’urbanisme à Bruxelles au coeur de cinq débats prévus au Civa, entre le 4 juillet et le 10 septembre. Le premier portera sur « Mont des Arts et Gare centrale ».

On découvre des plans historiques, des dessins d’architectes souvent très audacieux, des films d’époque et, au centre du parcours, l’immense maquette construite par l’artiste-architecte Luc Deleu en 1986, imaginant un TGV suspendu sur toute la ville.
Dès la naissance de l’Etat belge, on construisait les premières gares à la parisienne, avec un large parvis donnant sur une place: en 1846, la gare du Nord de François Coppens et en 1869, celle du Midi d’Auguste Payen. Mais, comme à Paris, ce sont des gares cul-de-sac, à rebroussement.
A la fois pour limiter la taille de ces gares, pour faciliter le trafic de passage et pour construire une gare « centrale » au coeur de la ville, on imagine une jonction Nord-Midi.
La tour de Lucien de Vestel
On a réfléchi à cette jonction pendant 70 ans, de 1836 à 1903, demandant aux plus grands architectes d’imaginer un tracé. On peut voir par exemple, celui dessiné par Henri Lacoste. C’est finalement le tracé de l’ingénieur Frédéric Bruneel qui est repris en 1903 dans la convention entre la ville de Bruxelles et l’Etat belge.
On traversera bien la ville par un tunnel et on créera une gare Centrale à la Putterie.
Mais les travaux tarderont et se heurtèrent à la difficulté du sol. Au départ, on croyait pouvoir construire sous le sol mais en 1935, il fallut changer de méthode et ouvrir une tranchée à ciel ouvert de 2 km de long, la « saignée » dont l’imaginaire bruxellois se souvient, détruisant de vieux quartiers, parfois insalubres, il est vrai.
On revoit les projets pour les gares dont celui très beau de Lucien de Vestel en 1936 avec sa tour fine et immense point de repère dans Bruxelles. Et bien sûr, la gare Centrale étudiée par Horta et qui, elle, se fond dans le paysage d’une zone vouée à devenir centre de commerce. Horta étudiant aussi tout le quartier du Ravenstein.
Revenir sur cette histoire (y compris le Quartier Nord) c’est voir comment de nombreux projets furent étouffés par des intérêts privés et des bagarres sur le foncier.

On évoque encore le destin de la Cité administrative avec son jardin de Pechère. La première pierre fut posée en 1958 et la dernière tour achevée en 1983, et tout fut déjà revendu à un promoteur en 2001. Le destin de cette zone reste ouvert et on évoque la désignation prochaine d’un architecte allemand et du paysagiste vedette belge, Bas Smets.
On évoque aussi l’histoire du Mont des Arts et du jardin Vacherot détruit, celle du Botanique menacé, et le rôle joué par le protestation des habitants.
« Unbuilt Brussels #2, (Re)compose the City », Civa, Bruxelles, jusqu’au 14-10