Mwenze Kibwanga au cœur de la brousse
Publié le 25-01-2019 à 19h05 - Mis à jour le 22-01-2020 à 14h37
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En parallèle avec la Brafa et le Winter Bruneaf. Un ensemble qui danse et se joue des lignes. C’était au temps de la colonie et d’Elisabethville, poumon d’acier de l’industrie congolaise. Dans la riante cité du Katanga, un ancien militaire français, peintre amateur, Pierre-Romain Desfossés y créa, vers 1950, une école d’art sous l’appellation du Hangar.
Outre Bela Sara, son homme à tout faire, qui peignait en se servant de ses doigts, Desfossés y attira une pléiade de natifs avides de monter de quels traits et couleurs ils se félicitaient.
Fils de tisserands, Mwenze Kibwanga, né à Kilumba en 1925 et mort à Lubumbashi en 1999, s’y révéla l’un des plus novateurs. En entrant au Hangar, il avait déjà suivi des cours de dessins et s’avéra rapidement un pilote de la confrérie.
Renonçant aux principes de base inculqués durant son écolage, Mwenze se mit à développer un style personnel très particulier fait de hachures, de lignes condensées par strates pour animer les traditions du quotidien.
Sa faconde à développer ce jeu de lignes, parfois entrecroisées, conféra à ses compositions une dynamique qui surprend encore de nos jours par sa vivacité et la sensation de vie qu’expriment ses compositions.
Un chef de file
Avec le recul du temps et la superposition des modes qui ont entouré la créativité africaine, Mwenze Kibwanga, à l’instar de son compère Bela Sara orfèvre en joyeux chromatismes, nous apparaît en précurseur d’une peinture africaine qui, trop longtemps, balbutia ses conformismes hérités de la colonisation.
Pas de cela avec Mwenze qui, sans se soucier d’autre appartenance, aura produit un art traditionnel conforté d’audaces graphiques surprenantes. Une trentaine de pièces à conviction témoignent pour lui en cette exposition réunie par Pierre Loos.
Scènes de la vie en brousse, du village à la forêt, des traditions de la chefferie à la chasse à l’antilope, des festivités coutumières aux danses endiablées pour assagir les divinités.
Mwenze succéda à son mentor à la mort de celui-ci et fut promu professeur à l’Académie des Beaux-Arts d’Elisabethville. En 1958, à l’occasion de l’Expo internationale de Bruxelles, il décora le pavillon du Congo.
Heureuses sarabandes
Ce qui ressort de l’art de Mwenze Kibwanga, c’est la hardiesse de son trait virevoltant, les jeux de couleurs qu’il maîtrise à la perfection, la dynamique insufflée aux compositions et la bonhomie souriante avec laquelle il réussit à nous faire entrer dans la danse.
Mwenze Kibwanga fut, à sa manière, un sorcier des jeux de lignes, un rapporteur ingénieux du vécu du commun de ses semblables, un chantre de la nature avec sa faune, sa flore, sa mythologie et ses mystères.
Évoquant son art, il disait très simplement : "Je commence à fixer le sujet très simplement sur la toile ou le carton, sans croquis préalable. Mes sujets sont variés : je représente les hommes, les animaux, les poissons, les oiseaux. J’exploite également des thèmes religieux, des scènes de marché, de danseurs…"
La présente exposition offre un survol de son art à travers le temps, de ses premiers portraits (avant le Hangar) à ses peintures les plus enlevées. On y voit aussi quelques-uns de ses dessins empreints de la même vitalité.

Mwenze, le génie du trait (art moderne). Où Galerie SR, 37, rue Ernest Allard, 1000 Bruxelles. Infos : Galerie Ambre Congo : 0475.966.354 Quand Jusqu’au 30 janvier. Mercredi 23, de 14 à 20h ; du jeudi 24 au samedi 26, de 11 à 19h ; dimanche 27, de 11 à 17h.