Les œuvres troublantes de Roger Ballen
Il a toujours fallu avoir le cœur bien accroché pour entrer dans l’univers cauchemardesque de Roger Ballen. C’est encore le cas cette fois dans l’exposition que propose la galerie Stielglitz 19 à Anvers.
Publié le 25-09-2019 à 16h17 - Mis à jour le 12-11-2020 à 11h35
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Il a toujours fallu avoir le cœur bien accroché pour entrer dans l’univers cauchemardesque de Roger Ballen. C’est encore le cas cette fois dans l’exposition que propose la galerie Stielglitz 19 à Anvers.
Bizarre
Ceux qui ne connaissent de ce photographe américain installé en Afrique du Sud que les images de style documentaire des "petits Blancs" prises vers la fin de l’apartheid seront passablement surpris. Sa série "Platteland" qui pouvait se lire au milieu des années 1990 comme un travail dans la lignée de Walker Evans ou, mieux encore, d’une Diane Arbus, semble bien lointain. Fini les portraits au scalpel des déshérités consanguins dans les maisons déglinguées d’un improbable arrière-pays, désormais l’œuvre de Ballen s’inscrit entre l’art brut et l’installation.
Au fil du temps, le côté surréaliste, voire parfois complètement déjanté, des "décors" devant lesquels posaient les gens qu’il rencontrait lors de ses longs voyages de prospection en tant que géologue a pris de plus en plus le dessus. Ceci au point de faire passer au second plan, et même de faire disparaître, les personnages bizarres auxquels on associait volontiers son travail. C’était le cas dans son livre Shadow Chamber paru en 2005 à propos duquel l’auteur déclarait : "Discerner un fait de la fiction dans cette œuvre peut être tout simplement impossible ; […] s’embêter avec un tel discernement peut ne pas être seulement futile, mais passer à côté de la question."
Allumée
Cette prise de distance par rapport au réel s’est accentuée dans Boarding House paru chez Phaidon en 2009. À Anvers, on trouve des images de "Asylum of the Birds", une série réalisée 6 ans plus tard dans un intérieur théâtral créé par ses soins, plein de graffitis, de dessins, d’animaux et d’objets de récupération. On y trouve aussi un bel ensemble de la série "No Joke", fruit de sa collaboration pour le moins allumée avec Asger Carlsen, un artiste danois basé à New York. Des collages concoctés à distance et dans lesquelles le duo plonge au plus profond de la psyché humaine. Des œuvres qu’on nous présente comme "viscérales, vicieuses, humoristiques, explicites et tendrement intimes à la fois".
Le galeriste prévient : "Ces œuvres ressemblent à des visions d’un rêve que vous n’avez jamais eu mais que vous reconnaissez instantanément avec le corps et l’esprit." On ne s’étonnera donc pas que la Halle Saint Pierre à Paris, un lieu dédié à l’art brut, expose jusqu’au 31 juillet 2020 "Le monde selon Roger Ballen", une rétrospective d’ampleur de ce photographe passé chez les artistes.
Roger Ballen Photographie Où Anvers, Stieglitz 19, Klapdorp, 2. www.stieglitz19.be Quand Jusqu’au 19 octobre, du jeudi et samedi de 14h à 18h et vendredi de 15h à 18h.
