La nature qui se meurt, nouvelles « Natures mortes »
Artistes et designers, dans une forte expo, très écolo, « Nature morte, Nature vivante », au Grand Hornu. Les artistes sont comme les canaris d’antan au fond des mines, annonçant les coups de grisou à venir. Ils nous alertent, montrent la catastrophe écologique qui s’annonce et plaident pour un nouveau lien avec la nature et le cosmos.
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Publié le 23-11-2019 à 07h39 - Mis à jour le 23-11-2019 à 07h40
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Artistes et designers, dans une forte expo, très écolo, « Nature morte, Nature vivante », au Grand Hornu.
Les artistes sont comme les canaris d’antan au fond des mines, annonçant les coups de grisou à venir. Ils nous alertent, montrent la catastrophe écologique qui s’annonce et plaident pour un nouveau lien avec la nature et le cosmos.
Tomas Saraceno nourrit des araignée qui réalisent pour lui de grandes sculptures. Hicham Berrada cultive des plantes la nuit et crée des paysages mutants et chimiques. Il y a 40 ans déjà, Joseph Beuys présentait à la Documenta de Kassel, en guise d’oeuvre d’art, la plantation dans toute la ville de 7000 chênes. La Biennale de Lyon en cours, interroge notre monde et notre rapport perdu à la nature anticipant déjà l’effondrement à venir de la société de consommation.
Le centre du design au Grand-Hornu (CID) a déjà montré plusieurs expositions très fortes sur ce thème, exprimant bien que le design ne peut pas n’être qu’une discipline pour consommer davantage. Il y a un an, dans Halte à la croissance, des designers réfléchissaient aux objets pour une décroissance intelligente.
Françoise Foulon, co-commissaire de cette expo actuelle souligne que nous sommes entrés dans « une crise écologique sans précédent qui remet en cause le rapport que l’homme entretient avec son environnement et révèle l’impasse catastrophique du consumérisme. »
Nature morte, nature vivante expose les travaux de 40 artistes et designers qui expriment à la fois cette mort de la nature et la puissance de régénération qu’on y trouve. L’idée classique de la Nature morte dans l’art prend ici une toute autre dimension, celle de la nature qui se meurt.
Des oeuvres loin d’être tristes, qui sont souvent très belles et toujours très singulières.

Fleurs fanées et belles
Andrea Branzi crée une boîte d’une grande poésie en pierre trouvée. Alexi Williams a moulé en résine des branchies de poumons d’animaux pour en faire des branches d’arbres, exprimant que ce sont les arbres qui nous font respirer.
Ariel Schlesinger a déposé une longue branche morte au bout de laquelle une petite flamme surgit comme une tension entre le mort et le vivant, comme le buisson ardent de la Bible.
Une de plus belles oeuvres est à l’entrée et n’a l’air de rien: un vase avec un bouquet de jonquilles fanées qui tombent. Mais quelque chose intrigue le visiteur qui comprend alors que tout est fait avec une incroyable maestria par des verriers de Murano et que Lilla Tabasso a voulu ainsi saisir le moment court entre la vie de la nature et sa mort.
Une des caractéristiques de toutes les oeuvres présentées est le brillant travail qui a présidé à leur création.
Les designers italiens de Formafantasma que tout le monde s’arrache aujourd’hui ont travaillé le charbon de bois et son ambiguïté: sa fabrication détruit l’environnement mais son produit sert à filtrer l’eau ! Ils en font de beaux objets usuels noirs.
Des artistes créent des oeuvres vivantes qui évoluent avec le temps comme Michel Blazy qui fait pousser des avocatiers dans des déchets de notre consommation (vieux ordinateurs, chaussures, radios), exprimant l’espérance que le temps pourra réparer nos erreurs et ramener la nature dans nos poubelles.
Maarten Vanden Eynde crée de nouveaux récifs coralliens qu’il expose, réalisés avec des déchets en plastique tirés des océans.
La Nature morte est traditionnellement associée à la Vanité et à la mort: tout passe, tout lasse, tout casse. Le Studio Wieki Somers expose nos objets domestiques, grille-pain, aspirateurs, etc., entièrement recouverts de cendres venues de la crémation d’animaux .
L’espoir cependant reste que la nature sera plus forte que notre folie. Des designers (Various Artists) font pousser des oliviers bonsaï sous l’eau, anticipant la montée des océans.
Sur le sol, presque invisible contre un mur, on voit une mauvaise herbe, un pissenlit qu’on aurait envie d’arracher. Mais il est en bronze peint (Tony Matelli) et est la métaphore de ces « mauvaises herbes » que certains rêvent d’arracher qui ont noms migrants de tous bords, mais qui sont les signes d’une régénération possible.
Nature morte, nature vivante, Centre d’innovation et de design, Grand-Hornu, jusqu’au 8 mars