Sara Bjarland transcende les rebuts de notre société de consommation
Actuel à souhait, le travail de Sara Bjarland (Helsinki, 1981) se fonde sur la résurrection de déchets abandonnés. Fournisseur de prédilection ? La rue.
Publié le 24-01-2020 à 12h34 - Mis à jour le 24-01-2020 à 12h35
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Actuel à souhait, le travail de Sara Bjarland (Helsinki, 1981) se fonde sur la résurrection de déchets abandonnés. Fournisseur de prédilection ? La rue. Elle fouille les amas d’ordures que les citoyens du nord d’Amsterdam sortent mensuellement, lors du ramassage des encombrants.
De ses opérations-sauvetages qui riment avec recyclage, elle ramène de nombreux objets cassés et délaissés : fragments de mobilier, accessoires de jardin en plastique, vieilles serpillières, stores vénitiens…
L’artiste ne les envisage pas comme les témoignages résiduels (souvent considérés comme abjects) de notre société de consommation mais avec son regard unique et artistique. Elle les observe comme autant de motifs esthétiques lui permettant de questionner les rencontres et les chevauchements entre le naturel et l’artificiel, le vivant et l’inanimé, l’objet et l’organisme. Elle y voit de précieux véhicules de sens, y lit tout le potentiel sensible et poétique.
Inspiration et résurrection
Sur ces objets, l’artiste n’intervient pas ou très peu. Sara Bjarland tente de ne pas en modifier l’aspect, les réemployant dans l’état où ils se trouvent. Parfois, la décontextualisation suffit, comme pour cette tige de construction en acier qu’elle a simplement suspendu au mur. Elle a immédiatement été séduite par la courbe de cette barre de métal, infestée de rouille et recouverte par endroits de formations de balanes et coquillages en raison de son immersion prolongée. Une silhouette très pure mais aussi très graphique que l’artiste transcende juste par son acte : la fixer au mur et l’observer avec le même regard que celui que l’on pose sur une œuvre d’art.
La galerie présente plusieurs pièces réemployant des morceaux de séchoirs que l’artiste complète de quelques branches en bronze d’un réalisme troublant et d’une subtilité inouïe. Voilà bien la force de l’artiste : pouvoir imaginer des combinaisons inattendues d’une grande finesse avec des éléments d’une tout autre nature. Les frontières s’estompent, la matière inerte reprend vie.
Cette exploitation permet également de réaffirmer l’ampleur du champ des possibles. Car s’il est question du temps qui passe sur les choses et de l’obsolescence, plus ou moins programmée, mais inéluctable de toute utilité, il est aussi question d’une vraie forme de résurrection. Acte salutaire.
Avec Sara Bjarland, une vielle chambre à air se change en trompe d’éléphant ou en mue de serpent, une plante de noix de coco fermement ancrée sur ses racines se transforme en insecte étonnant. Les références ne manquent pas. Et quand, dans sa série partant de fragments de séchoirs, les fines branches s’entremêlent aux tiges de métal, on pense sans trop de mal à la délicatesse des phasmes et à leurs articulations fragiles.
Sara Bjarland, Constant Eruptions Sculptures et installations Où Hosptreet Gallery, rue Saint Georges 109, 1050 Ixelles www.hopstreet.be Quand Jusqu’au 22 février, du jeudi au samedi de 13h à 18h.
