Déconfinement: une réouverture des musées hautement symbolique
Le Roi et la Reine ont visité le Musée des Beaux-Arts, Sophie Wilmès s'est rendue à Bozar et Bénédicte Linard dans une bibliothèque. Ils voulaient marquer ainsi leur soutien au secteur culturel.
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Publié le 19-05-2020 à 13h59 - Mis à jour le 20-05-2020 à 14h13
Le Roi et la Reine ont visité le Musée des Beaux-Arts, Sophie Wilmès s'est rendue à Bozar et Bénédicte Linard dans une bibliothèque. Ils voulaient marquer ainsi leur soutien au secteur culturel.
La culture a été omniprésente durant tout le confinement mais uniquement via Internet. La réouverture des musées en Belgique (et souvent à l’étranger), ces lundi et mardi, marquait dès lors une étape très symbolique: on peut enfin revoir les oeuvres elles-mêmes. En attendant de pouvoir retrouver aussi les cinémas et les salles de spectacles.
C’est un moment qu’ont voulu marquer le Roi et la Reine en visitant mardi matin le Musée des Beaux-Arts de Bruxelles. Ils souhaitaient soutenir ainsi le secteur culturel de notre pays qui a été fortement frappé par cette crise. Ils sont restés de 9 h à 10 h (l’heure d’ouverture où une vingtaine de personnes attendaient déjà). Ils ont pu découvrir le circuit aménagé selon toutes les règles de sécurité sanitaire à travers la section Art ancien du musée et ses chefs d’oeuvres de Bosch, Rembrandt et Bruegel à Rubens et Van Loon. Y compris le tableau de Bouts qui évoquait déjà une épidémie, celle de la peste. Le couple royal a pu discuter quelques instants dans le hall avec le personnel. Il était suivi par une visite spéciale pour quelques artistes: Thomas Lerooy, Jeff Kowatch, Agnès Guillaume et le jazzman Steve Houben.

À Bozar, c’est la Première ministre Sophie Wilmès qui est venue durant deux heures et a tout visité avec Paul Dujardin, y compris les salles de spectacles vides. On compte déjà plus de mille réservations (il faut mettre le masque) pour les expositions (prolongées jusqu’au 21 juillet): Keith Haring, Mondo Cane de Thys & De Gruyter. Et ouverte ce mardi une belle exposition neuve, de Jacqueline Mesmaeker, 92 ans, Ah, Quelle Aventure !, réalisée avec le CC Strombeek Bever, et conçue comme une promenade poétique. Le couronnement d’une carrière.
Dans le même souci de poser un geste symbolique fort, la ministre de la Culture Bénédicte Linard avait choisi de visiter dès lundi une bibliothèque rouverte (celle d’Ixelles) et ce mercredi, elle visitera pour sa réouverture la Bibliotheca Wittockiana à Bruxelles et sa belle expo des gravures (et peintures) de Kikie Crevecoeur avec son exposition Entre les pages.
Côté flamand aussi, le ministre-président Jan Jambon était venu déjà lundi au Musée M de Louvain, visiter la très belle nouvelle exposition consacrée aux sculptures de pleurants de Rodin, Constantin Meunier et Georges Minne (on y reviendra). Le musée explique que sa réouverture fut un véritable succès, tous les créneaux horaires disponibles pour les visites ont en effet été déjà réservés jusqu’au 24 mai et 900 billets d’entrée ont déjà été vendus.

Tour d’horizon
Les expos reprennent donc quasi partout et suivent un même protocole: réservation en ligne, port conseillé du masque, limitation du nombre de visiteurs (pas plus qu’un visiteur à la fois pour 10 m2), respect de la distanciation physique (1,5 m), suspension des visites de groupes. Toutes conditions auxquelles nous nous sommes tous habitués. En échange, les visiteurs ont la chance d’être quasi seuls face aux oeuvres.
L'exposition Toutankhamon à Liège avait aussi rouvert dès lundi avec 60 visiteurs en une journée (1000 par jours auparavant). Tout s'est très bien passé et les réservations reprennent de plus en plus (lundi, on en comptait déjà 1250). Parmi ces premiers visiteurs, des familles, des couples.
Au Wiels (lire ci-dessous), on peut retrouver la magnifique expo Wolfgang Tillmans et celle toute différente qui révèle le talent poétique et politique, fragile et beau, de la jeune artiste vietnamienne Thao Nguyen Phan. Là aussi, tout fut parfait, avec, précise-t-on des « visiteurs enthousiastes de retourner voir des expos ».
À la Villa Empain (Fondation Boghossian) rouvrait ce mardi l’expo Mappa Mundi. ou comment les artistes regardent le monde à travers des « cartes » souvent très singulières. Comme ailleurs, le commentaire est : « Cela s’est très bien passé ». Il y avait déjà une vingtaine de visiteurs ce matin. Il y a une centaine de réservations en moyenne par jour, la capacité maximale étant de 150 par jour.
Au Mac’s on peut à nouveau se plonger, avec des milliers d’images et de dessins, dans l’univers de l’artiste américain Matt Mullican. Une cosmologie autant mentale que très visuelle. Il y a eu mardi une première dizaine de visiteurs « très heureux » dont … deux venus à vélo.
Au BPS 22 on peut retrouver la première exposition monographique de l'excellente Latifa Echakhch. On se souvient de ses salles qu’elle tapissait de bleu stencil. Là aussi on parle de visiteurs « très impatients de retrouver les oeuvres d’art » et d’une réouverture sans souci.

Au Wiels, distance, prudence – et vibration artistique
Pour le monde de la culture, c’est un début, une lueur parmi le brouillard de questions et d’inquiétude. Le déconfinement, amorcé dans les librairies – rouvertes au titre de commerces – et les bibliothèques, passe désormais par les musées et centres d’art.
À Forest, près de 80 visiteurs ont franchi mardi le seuil du Wiels pour la réouverture. Comme partout ailleurs, les mesures sanitaires sont de mise. Vivement recommandée, la réservation en ligne – une formalité très largement pratiquée – n’aura été omise que par deux personnes le premier jour, sans d’ailleurs compromettre leur visite.
Un premier poste d’accueil précède le guichet d’admission, avec des indications simples et précises : port du masque, désinfection des mains à l’entrée, distance minimale requise, nombre maximal de visiteurs, sens de circulation. Si la buvette habituelle reste close pour l’instant, les majestueuses plantes vertes qui peuplent le hall du Wiels servent de sentinelles au parcours fléché qui s’amorce.
Ascenseur en montée, escalier en descente
La visite est balisée. Ascenseur jusqu’au 3e étage pour Wolfgang Tillmans et Today is the first day (sic). Et descente graduelle par l’étroite cage d’escalier, jusqu’à Monsoon Melodyde Thao Nguyen Phan.
Un mardi après-midi, on goûte dans le calme à ces deux univers plastiques. Les silhouettes se croisent de loin, se posent éventuellement sur les sièges soigneusement espacés. Par-dessus les masques, les regards font le plein de cette vibration si particulière de l’art en présence des corps. On songe naturellement à la danse dont Anne Teresa De Keersmaeker avait habité ces vastes plateaux en 2015 avec Work/Travail/Arbeid. On rêve de plus belle à ce que les metteurs en scène, chorégraphes, performeurs vont imaginer pour ces premiers lieux de culture déconfinés. M.Ba.