À Namur, au Delta, exploration rétrospective de l’art déjanté, halluciné de Peter Saul
À peine entamée et déjà fermée pour cause de coronavirus, la première rétrospective en Belgique de Peter Saul (États-Unis, 1934) s’ouvre à nouveau à vous. Vous serez surpris, comme nous le fûmes, par cette peinture qui sort du cadre de nos habitudes picturales.
- Publié le 30-05-2020 à 15h02
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À peine entamée et déjà fermée pour cause de coronavirus, la première rétrospective en Belgique de Peter Saul (États-Unis, 1934) s’ouvre à nouveau à vous. Vous serez surpris, comme nous le fûmes, par cette peinture qui sort du cadre de nos habitudes picturales.
Une première impression, trop hâtive, expéditive, nous ferait dire que voilà peinture abominable. Elle est le signe tangible d’une ère du temps, d’une volonté anarchique de débrider l’art traditionnel, de le court-circuiter au point de le désavouer à force de pousser sur le clou de cette "Bad Painting" qui disait bien ce qu’elle voulait dire. À force de s’y impliquer, de tenir compte de tenants et aboutissants valorisés par une réflexion sur les accointances de l’art avec la société, on comprend mieux une peinture qui vous délivre un message coup de poing.
Dernier représentant du Pop Art américain, Peter Saul a occupé la scène, de façon marginale, depuis les Fifties. Un bail respectable. Cette exposition florilège, d’abord montée aux Abattoirs de Toulouse, "Peter Saul. Pop, Funk, Bad Painting and More", vous convie à le comprendre, le percer à travers 80 peintures, dessins, archives.
De Paris à la Californie
D’emblée libérée des fantasmes d’un art de complaisance, la peinture de Peter Saul rugit dans les brancards. À l’époque, toute la peinture américaine s’émancipe. Attaquant tous azimuts, elle se politise par la bande. Les premiers travaux de Saul sont inventifs, spirituels, sympathiques.
Cela va vite changer et nous conforter dans l’idée que cela n’est pas trop notre tasse de thé. Ce qui, en soi, n’a aucune importance ! Son art se chamboule, s’attrape la queue en tournant autour de toiles qui sont autant d’investigations de la société américaine, de la guerre au Vietnam, du "bon goût". Pour devenir, au bout du compte, de plus en plus fluo et déjanté.
Venant à la suite de l’exposition d’Evelyne Axell, cette expo de Saul précise la coloration Pop des premières expos du Delta. De l’une à l’autre, on est loin de parallèles évidents. Peter Saul nage à travers les poncifs américains, à travers une peinture qui écartèle formes et couleurs.
Deux étages pour un parcours
Au premier, les travaux de Saul de 1958 à 1964. Son art traverse l’histoire de l’art, celle de la société. Né d’un père anglais et d’une mère américaine, élevé au Canada, milieu scolaire très dur, il avait 15 ans quand il décida de devenir artiste. Parti en Europe, il découvrit les Comic’s, le Pop… Débusquer l’envers du décor.
Au deuxième étage, place au Pop, en Europe d’abord, et mises en parallèle intéressantes à plus d’un titre : "Si l’on passe par le comique, on peut montrer les pires choses ! Dans mon art, il y a toujours eu beaucoup d’humour. Il arrive aux gens de trouver mon art très perturbant. Je ne le vois pas ainsi, le concevant plutôt comme une blague !"
Le funk et ses monstres de toutes les couleurs, le punk et ses grandes peintures d’Afro-américains, couleurs crues, et, au troisième, ses "Bad Painting"… Portraits de Castro, Bush, Dali, Reagan… L’humour devient grinçant, onirique, brutal. Sa Joconde défie les lois…
Peter Saul - Rétrospective Peinture Où Le Delta, 18, avenue Golenvaux, 5000 Namur. www.ledelta.be et 081.77.55.64 Quand Jusqu’au 23 août, du mardi au vendredi, de 11 à 18h ; samedi et dimanche, de 10 à 18h.
