Quelle histoire
À la Patinoire Royale et à la Box Galerie, deux expositions entre références à l’histoire et intemporalité.
- Publié le 20-01-2021 à 17h25
- Mis à jour le 28-01-2021 à 14h03
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En septembre 1839, l’industriel et très industrieux Marcellin Jobard qui venait de tester à Bruxelles la toute récente invention que l’on n’appelait pas encore "photographie", écrivait dans Le Courrier belge, un des journaux dont il était propriétaire : "Le premier essai du daguerréotype fait hier sur la place des Barricades en sept minutes d’exposition, à l’iode et à la chambre obscure, a parfaitement réussi à l’exception de l’Arbre de la Liberté qui était agité par un grand vent. Aucun des personnages ou des chevaux qui sillonnaient la place et la rue de Notre-Dame-aux-Neiges n’est resté sur la plaque."
On y pense forcément en regardant les cinq tableaux photographiques du tandem Felten-Massinger exposés en ce moment à la Patinoire Royale à Saint-Gilles.
Intemporelles
Sur leurs clichés pris avec une "caravana obscura" - en fait une caravane de camping transformée en camera obscura (1) - des voitures passant à l’avenue Louise, on ne voit que le filé des phares ; des grues en activité ne reste net que le mat central. Et pour cause, le temps de prise de vue nécessaire avec un tel appareillage variait entre 20 minutes et plusieurs heures.
"Variait", écrit-on car le papier inversible dont ces deux artistes se sont servis durant deux décennies n’est plus fabriqué. Par leur technique, ces photographies nous rappellent donc tout autant les origines et la fin de l’argentique. Par leur taille, elles nous rappellent aussi l’essor du format tableau dans la photographie plasticienne des années 1980-1990. En tant qu’images, elles sont intemporelles.
Élégance
Si l’histoire, et particulièrement celle de l’art, semble ainsi nous resservir sans cesse les mêmes plats, c’est tout simplement parce qu’elle nous sert de grille de lecture du présent. À l’instar des photographies de Felten-Massinger, celles Franck Christen dont on peut voir une rétrospective à la Box Galerie évoquent d’autres temps. En l’occurrence - du moins pour celles en noir et blanc - ces années 1990 qui renouèrent avec l’écriture dépouillée du Modernisme. Face à l’expressionnisme exacerbé - que ce soit celui des photojournalistes ou des plasticiens - de jeunes photographes redécouvraient en effet alors les vertus de l’épure à la manière d’un Edward Weston ou de ses compères de la Straight Photography. Comme en attestent ici quelques images, la mode n’y fut pas insensible. Et pour cause, comme le souligne Alain d’Hooghe, l’élégance est le maître mot pour définir cet ensemble qui, pour sa part en couleur, s’ouvre au classicisme de la nature morte et du paysage stylisé.
(1) Dans une des parois de la caravane préalablement vidée, on a percé un petit trou (le sténopé) par lequel la lumière extérieure pénètre. L’image ainsi apparue s’imprime sur le papier photographique inversible couleur placé face au sténopé. La taille du papier varie entre 120 cm et 280 cm.
"Impressions lumineuses" de Felten-Massinger Photographie Où La Patinoire Royale - Galerie Valérie Bach, 15 rue Veydt, 1060 Bruxelles. www.prvbgallery.com Quand Jusqu’au 27 février, mercredi de 14h à 19h et du jeudi au samedi, de 11h à 19h. "Franck Christen" Photographie Où Box Galerie, chaussée de Vleurgat, 102, 1050 Bruxelles. www.boxgalerie.be Quand Jusqu’au 27 février, du mercredi au samedi de 14h à 19h.
