La 10e Biennale de photographie en Condroz, une délicieuse promenade photographique
Chaque week-end d’août, la 10e Biennale de photographie en Condroz invite à la découverte de jeunes auteurs. Mais également à la balade dans une splendide région.
- Publié le 06-08-2021 à 17h58
- Mis à jour le 20-08-2021 à 15h10
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/VMO65A7AMNERDCYHK3PSC2OXVM.jpg)
Il ne faut pas avoir entamé depuis longtemps le parcours de la 10e Biennale de photographie en Condroz pour réaliser combien la région jouxtant la vallée du Hoyoux est magnifique. Ce n’est donc pas un hasard si ses paysages et son patrimoine ont été mis au centre de cet événement au même titre que la photographie. Il est vrai que, le parcours ayant été complètement redessiné pour prendre en compte les entités de Clavier, Marchin et Modave, les organisateurs ont saisi l’occasion de documenter au mieux dans le guide destiné au public chacun des endroits hébergeant des œuvres.
Poétique
Ainsi, en débutant la visite à l'église des Forges, on apprend que l'on se trouve sur l'emplacement des anciennes Tôleries Delloye-Matthieu qui occupaient encore 1 556 ouvriers en 1951. L'usine aujourd'hui en déshérence fait singulièrement écho au lieu de culte délabré et aux travaux qui y sont exposés. Celui - plus poétique que documentaire - de Sandrine Elberg sur la fonte des glaciers ; ceux - entre évocation énigmatique et aura religieuse - d'Elise Corten, de Nick Verhaeghe, Dries Segers et Anton Kusters, quatre des soixante jeunes photographes flamands dont le travail avait été remarqué au printemps dans l'exposition "Onderspore n " au Centre culturel d'Hasselt.
La suite du parcours emprunte le Ravel (cela vaut la peine de venir avec son vélo) réalisé sur le tracé de l’ancienne ligne 126 du chemin de fer qui reliait Statte à Ciney. Des vestiges de ce passé ferroviaire ne manquent pas, notamment l’arrêt de Vyle-Tharoul mis en service en 1933 à la demande du député socialiste Georges Hubin, ceci pour les ouvriers des carrières de Vierset dont il était le patron. Certainement aussi pour ses propres voyages à Bruxelles.

Mythes et légendes
En suivant le Hoyoux, une première halte laisse découvrir, dans un ancienne centrale hydro-électrique, un travail de belle tenue ayant trait, comme le note son auteur, Maxime Brygo, "à des relations singulières à l'eau, à divers mythes et légendes, à des récits de navigation". À quelques encablures, le laminoir de l'entreprise Dufrenoy-Delloye & Cie reconverti en atelier de réfection de meubles accueille des dessins et montages de Diane Delafontaine réalisés pour certains à partir de la collection de photos anonymes de Thierry Massin. Un peu plus loin, dans le jardin du moulin de Bars (un endroit idyllique), un pavillon de pêche abrite quant à lui des collages subtils de Katherine De Brauwer traitant de la mémoire.
De grandes images accrochées sur la façade de la scierie de Barse annoncent la très belle installation conçue par Lore Stessel pour une salle dont les machines servirent à scier les pierres de la carrière des Avins jusqu’en 1958. Dans deux salles adjacentes, les photographies de Julie van der Vaart et les tirages de diapositives dégradées de Michel Mangon semblent filer la même métaphore de la fragilité.
Régal
Au milieu du parcours, le hameau de Pont-de-Bonne offre un lieu d’accueil et de (petite) restauration dans une limonaderie qui eut son heure de gloire entre 1899 et 1964 sous le nom de "Source du vieux château de Modave". Notons que c’est à l’arrière de ce havre de tranquillité, dans une clairière avec vue sur cascade, que se déroulent les concerts du samedi soir.
En le quittant non sans avoir vu les résultats de deux animations (1) et l'exposition de Clyde Lepage, on passe par la carrière Cuvelier et par le tunnel de Rômont, deux endroits idoines pour les travaux d'Erika Meda et de Layla Saâd. La route monte ensuite et sillonne une campagne plus vallonnée. Au hameau de Linchet, il ne faut pas manquer les cyanotypes d'Aline Héau dans un bien beau jardin et le film-installation de Stéphanie Roland dans la lignée de ses recherches sur les "îles fantômes" .

Seigneuriale
Quelques coups de pédales plus loin, à Terwagne, on achève le parcours à pied tant les dernières expositions à découvrir sont proches. De la maison d'Agnès Paris, où l'on se régale des bouquets de fleurs coupées photographiés par Jacky Lecouturier, à l'imposante cense seigneuriale (avec les propositions d'Eva Faché, de Joris Deleersnijder et de Patrick Taberna) il n'y a que quelque pas. Idem pour l'église où Colin Delfosse et Julie David de Lossy exposent leur documentaire Mariophanie (voir Arts Libre 16-09-2020) et pour la ferme Derivaux où quatre autres jeunes auteurs de "Onders poren " ferment la marche. Ou presque puisqu'il ne faut vraiment pas manquer au Foyer Saint-Hubert le résultat remarquable de la résidence proposée à Katherine Longly et détournée par celle-ci en un atelier pour des jeunes du coin. Où l'on découvre ce que cela fait de vivre sa jeunesse dans ces quelques villages que l'on vient de visiter avec un si grand plaisir.
(1) Ici ailleurs, un atelier Maxime Brygo et Mes racines, mon refuge, une proposition du Pivot (Bruxelles), en association avec les CPAS de Marchin et Modave.
Nouvelles vagues
Durant la présentation de cette biennale très justement intitulée "Nouvelles vagues ", Christophe Danthinne (directeur du centre culturel) et Emmanuel d'Autreppe (directeur artistique de l'événement avec Olivier Cornil et Lise Bruyneel) ont tenu à rappeler que les résultats de différentes animations du centre culturel durant ces deux dernières années sont exposés tout au long du parcours. Autant de traces du remarquable travail de ce centre culturel qui s'appellera désormais le Oyou. Ils ont également souligné l'engagement de la biennale auprès des jeunes photographes. Avec raison.

On pointera particulièrement dans cette 10e édition la formidable installation d’Erika Meda dans la carrière Cuvelier de fragiles images imprimées sur pierre ainsi que le troublant travail de portrait et de paysage de Clyde Lepage dans sa région natale (1). Ceci sans oublier l’impressionnante série de photographies poétiques et sombres - sans noirceur aucune cependant - de Layla Saâd. Pour une part, des vues de la vie en squat dont l’impression sur bâche convient on ne peut mieux au tunnel de Rômont où elles sont disposées. Trois prometteuses découvertes sans aucun doute.
(1) Travail édité pour l’occasion par Yellow Now sous l’intitulé "Paeza Sovni".
À savoir
Quoi :"Nouvellesvagues", 10e Biennale de photographie en Condroz, www.biennaledephotographie.be.
Où : La Limonaderie (Pont-de-Bonne), rue des Eaux 2, 4577 Modave.
Quand : Chaque week-end d’août, de 10 h à 19 h.