De la peinture, mais en fait non
Chez Art22 Gallery, les images à la lisière du réel de Charlotte Mano.
Publié le 24-09-2021 à 17h17
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"L'anagramme d'image, c'est magie", disait Charlotte Mano à propos de son travail photographique "Thank you Mum" primé par la Fondation HSBC l'an passé. Un jeu de mot dont on sent à travers des images d'autres séries exposées chez Art22 Gallery à Bruxelles qu'il reste d'actualité pour l'artiste. Très clairement, comme elle le dit elle-même, montrer l'intéresse beaucoup moins que suggérer. À un point tel que non seulement ses images ressemblent peu à des photographies, mais que cette distance par rapport au réalisme devient un questionnement central dans son œuvre.
Déréalisation
C'est ce que souligne par ailleurs le galeriste : "Le travail photographique de Charlotte est avant tout un travail plasticien qui fait référence de façon permanente à la photographie dans sa définition étymologique : l'écriture de la lumière. Ce travail, s'il se déploie aussi en apparence autour de plusieurs thématiques (le corps, l'espace, l'obscurité) ne cesse de questionner l'image : son pouvoir de représentation et de transparence, mais aussi ses limites."

Ce principe de déréalisation de ce qui a été vu, on ne peut mieux traduit par l'intitulé "Peinture mais en fait non" d'un travail plus ancien de l'artiste, est d'évidence à l'œuvre de bout en bout dans cette exposition. Les clichés de la série "Portraire" sont en effet des instantanés de modèles vivants réalisés en studio au travers un voile de tulle. De plus, leurs impressions ont été réalisées sur un papier photographique japonais à base de fibre de murier dont la texture veloutée renforce l'illusion peinture. L'idée pour Mano étant "d'arriver à la dématérialisation du portrait dans ce qu'il a de descriptif, et ce, à travers un certain voile de pudeur".
Sensibilité
De la même façon, dans "Visions Scotopiques" les nus photographiés dans une pénombre extrême sont-il recouverts de la texture granuleuse de pixels surdimensionnés par la montée dans la sensibilité des capteurs. Au point qu’on a l’impression de se retrouver avec du grain argentique. Enfin, dans "Nocturnes", un ensemble réalisé presque entièrement par une nuit de pleine lune rousse de février 2017, les yeux des personnages de ce qui semble être un récit fantastique sont étrangement lumineux. Un peu comme ceux du gibier surpris par les phares des chasseurs.
Tout ceci nous donne trois séries en cohérence les unes par rapport aux autres. Cohérence soulignée par l’articulation de la présentation chez Art 22 Gallery. On notera que la série "Portraire" est exposée également à la Biennale Internationale de Photographie d’Ostende et ce, jusqu’au 24 octobre.
"Vision" de Charlotte Mano Photographie Où Art 22 Gallery, place du Jeu de Balle, 56 et 67, 1000 Bruxelles. www.art22.gallery Quand Jusqu'au 25 octobre, vendredi, samedi et dimanche, de 10h30 à 16h30.
