“Restituer tous les restes humains venus des colonies ! ”
Les chercheurs ont identifié dans les institutions belges des restes de 30 000 individus. Recommandations.
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Publié le 29-03-2023 à 15h18
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Partout en Europe et singulièrement dans les anciens pays colonisateurs se pose la question du statut des restes humains que ce soient les résultats de fouilles préhistoriques, d’antiquités diverses (momies par exemple) ou de restes humains importés durant la colonisation.
En France, une étude a chiffré à 150 000 les restes humains dans les collections publiques dont plusieurs centaines provenant des anciennes colonies. On sait que la France a déjà restitué par exemple des crânes maoris.
En Belgique, le cas du crâne de Lusinga Iwa Ng’ombe a déjà défrayé la chronique. Ce chef Tabwa fut décapité par les Belges et son crâne ramené en Belgique par Emile Storms comme butin de guerre à la fin du XIXe siècle. Il a fait l’objet, en 2018 d’une demande de restitution auprès du Roi par sa famille.
Le projet Home a été lancé fin 2020 et a diffusé ses résultats ce mercredi. Il regroupe des chercheurs de plusieurs musées (Africa Museum, musée d’Art et d’Histoire, institut des sciences naturelles) et universités. Ils ont identifié les restes de plus de 30 000 individus conservés dans les institutions qui ont participé à l’enquête, dont les restes de 383 individus provenant du Congo alors belge et 150 du Rwanda.
Mercredi aussi, le comité consultatif de bioéthique sollicité dans ce cadre a émis ses conclusions qui rejoignent largement celles du projet Home. Ces recommandations devraient nourrir les textes législatifs nécessaires. La balle est donc maintenant chez le secrétaire d’État à la politique scientifique, Thomas Dermine.
Recommandations
Voilà les principales recommandations qui valent autant pour les collections publiques que privées :
- D’une manière générale, les restes humains doivent être traités “avec respect, dignité et décence”.
- La recherche scientifique sur ces restes est autorisée quand elle permet de mieux connaître l’histoire de l’espèce humaine (exemple : les restes d’ancêtres de l’homme comme Lucy) mais pas dans un but illégitime comme jadis la soi-disant justification d’une différence des races. 27 % des restes humains répertoriés sont relatifs à la préhistoire.
- Quand ces restes humains sont exposés au public il faut veiller à la préservation de l’intégrité du corps et des parties de corps et de leur dignité (exemple : la très belle exposition sur l’Égypte qui s’ouvre au Cinquantenaire a veillé à ne pas montrer des momies, juste une petite main momifiée portant une bague, présentée avec une grande dignité).
- Pour les restes humains issus des pays colonisés (singulièrement RDC et Rwanda), collectés en leur temps dans un contexte de violence et dans le but d’établir une hiérarchie des races, ils ne doivent plus être exposés.
- Tous ces restes humains en lien direct avec la période coloniale sont potentiellement restituables sans condition si une demande est venue du pays ex-colonisé et dans un “dialogue éclairé, sincère et serein”.
- Tout commerce de restes humains devrait être interdit par l’Union européenne, estime le comité de bioéthique. On se souvient qu’en décembre dernier la vente de trois crânes humains issus de la période coloniale en salle de ventes belge avait suscité un tollé et amené l’hôtel de ventes à retirer les crânes.