Le XXe siècle sublimé par les plus grands photographes
Au Palazzo Grassi, 400 trésors photographiques venus des archives du groupe de magazines Condé Nast.
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Publié le 02-04-2023 à 13h44 - Mis à jour le 02-04-2023 à 14h07
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Au Palazzo Grassi à Venise, on peut découvrir plus de 400 photographies couvrant tout le XXe siècle, choisies dans les archives du groupe de presse magazine Condé Nast qui possède Vogue, Vanity Fair, The New Yorker, … Des titres qui ont été toujours à la recherche de la meilleure photographie. Ces œuvres ont été récemment acquises par la collection Pinault.
Exposer à Venise ces trésors en parallèle à l’exposition Icônes à la Punta della Dogana (lire par ailleurs), c’est pratiquer le grand écart, entre le glamour des photos d’un côté et le minimalisme des artistes à la Punta et montrer tout l’éclectisme de cette collection Pinault.
Le titre Chronorama indique que l’accrochage sera chronologique mais aussi très visuel comme un diorama. On parcourt tout le siècle avec chaque fois un chapitre par décennie. Les photographies et les illustrations du début du XXe siècle étaient destinées à ces magazines, mais au Palazzo Grassi, elles sont exposées comme telles, souvent magnifiques, ou étonnantes comme cette photographie prise en rue de la première femme portant un pantalon dans l’espace public !

On retrouve les plus grands photographes qui tous ont travaillé pour les magazines du groupe Condé Nast : Edward Steichen, Berenice Abbott, Cecil Beaton, Lee Miller que l’on retrouve comme mannequin sublime photographié par Edward Steichen en 1928 et ensuite comme photographe de guerre. Et encore, André Kertész, Diane Arbus, Irving Penn, Helmut Newton, …
Marlène Dietrich
Ils ont photographié la mode, les stars, mais aussi la société américaine, ses sportifs, ses artistes, des inconnus.
On peut retrouver de nombreuses photographies devenues si célèbres comme le portrait de Marlène Dietrich par Irving Penn en 1948, mais aussi de Greta Garbo, Catherine Deneuve, Jeanne Moreau, Jane Birkin toute jeune, des Beatles, etc.
Devenues tout aussi iconiques, on découvre des photographies publiées à l’époque dans ces magazines, de Matisse dans sa volière, de Calder allongé sous son petit cirque de métal, de Max Ernst et Dorothea Tanning à côté de la sculpture du Capricorne, de Francis Bacon portant deux immenses morceaux de viande, de Pollock peignant sa toile au sol, dans une danse frénétique, de Brancusi, de Gilbert and George…
Beaucoup de ces photographies sont des chefs-d’œuvre die composition comme celle d’Edward Steichen photographiant pour Vanity Fair, en 1927, L’oiseau dans l’espace de Brancusi avec un savant jeu d’ombres.

L’exposition permet aussi de questionner notre rapport au temps, de voir à travers ces images de magazines comment la société se reflète et évolue : d’abord composée d’Américains blancs, les Noirs n’apparaissent que tard, et d’abord via les chanteurs et les sportifs.
On peut suivre les trajectoires de grands noms de la photographie comme Irving Penn Il fut d’abord célèbre dès les années 50 pour le glamour de ses photos de mode. Il réinvente le genre, stylisant les modèles, dépouillant l’image, faisant des mannequins des œuvres d’art minimalistes en noir et blanc. C’est un plaisir de voir comment ses images n’ont pas vieilli et restent merveilleuses. Son modèle fut le plus souvent Lisa Fonssagrives, premier top-modèle de l’histoire, qui devint sa femme. Edmonde Charles-Roux, alors chez Vogue, disait qu’un portrait par lui demandait quatre heures de pose ! Sa marque de fabrique est la photo de studio, sobre, avec la belle lumière qu’il y créait.
Le contraire des photos sur le vif ou des photos vivantes et rugueuses de Diane Arbus qu’on voit aussi à l’exposition. La photo pour Vogue d’Irving Penn de deux petits enfants indiens de Cuzco posant pour lui, pieds nus et l’œil grave reste superbe.

Comme à la Punta della Dogana, et même si elles sont si différentes, cette exposition interroge aussi le statut de l’image : reflet d’une époque, elles ont en retour, façonné le siècle et sont devenues des mythes.
Chronorama, Trésors photographiques du XXe siècle, Palazzo Grassi, Venise, jusqu’au 7 janvier 2024