Comment s'animent Wallace, Gromit et Cie

PAR ALAIN LORFÈVRE

COULISSES

À BRISTOL

Bristol, 2 février 2005. Le moment est solennel: nous allons passer de l'autre côté de l'écran, découvrir l'envers du décor d'un film de Wallace et Gromit (cf.LLB du 9/04/05). Comment donc prennent vie les deux célèbres héros de pâte à modeler créés par Nick Park en 1989? Comme pour n'importe quel film, tout commence avec une (bonne) idée. «Elle traînait depuis sept ans, explique Nick Park, avant même «Chicken Run». Nous devions écrire un livre pour la BBC avec Wallace et Gromit. Nous avons imaginé que Wallace et Gromit avaient des problèmes avec des lapins voleurs de légumes. On avait appelé ça «Wallace et Gromit et les voleurs végétariens». La BBC a rejeté l'idée, mais nous l'avons conservée. Nous avons pensé que ce serait bien d'en faire un film de loup-garou transposé dans un contexte végétarien.»

TESTER LE SCÉNARIO

Une fois le scénario écrit, il faut le tester: un film d'animation exigeant 24 images à animer par seconde, mieux vaut être sûr de l'intérêt et du rythme d'une scène avant de la tourner. D'où l'étape importante du story-board, sorte de version en bande dessinée du scénario, et de «l'animatique» :

«Nous montons le story-board comme un film, explique Nick Park, sur lequel nous enregistrons des voix témoins et une musique témoin. Cela nous permet de nous faire une idée générale du résultat avant de commencer le tournage proprement dit.» A partir de cette étape, et moyennant corrections, le story-board devient la «bible» des animateurs. «Mais pendant le tournage, nous gardons encore une certaine flexibilité qui nous permet même de changer encore un gag ou de rassembler deux scènes en une...», poursuit Nick Park dont le travail de réalisateur avec son partenaire Steve Box consiste à vérifier chaque jour le travail des animateurs.

Il faut auparavant confectionner les décors - mesurant jusqu'à trois mètres de haut comme le château de Lady Tottington - et les figurines de 25 à 30cm de chaque personnage. Certaines existent en plusieurs exemplaires, comme Wallace, cloné trente-cinq fois. Il y a aussi les innombrables bouches, qui permettent d'adapter le mouvement des lèvres au dialogue préenregistré par les acteurs.

LES DENTS D'HELENA

Ce «Wallace et Gromit» est le premier à compter autant d'humains, en tout une quarantaine «de seconds rôles». «Lady Tottington a nécessité un immense travail, compte tenu de sa garde-robe notamment. Nous voulions un personnage différent de Wendoline dans «Rasé de près». On a joué devant une caméra vidéo avec une perruque afin que les animateurs se fassent une idée des mouvements (NdlR: il n'est pas rare de voir un animateur faire des grimaces horribles pour se mettre dans la «pâte» de son personnage). Nous nous inspirons beaucoup de films pour créer les personnages -comme Julie Christie dans «The Go-Between». Les acteurs qui font les voix y contribuent aussi. Helena Bonham Carter a appelé son mari Tim Burton et lui a demandé de lui envoyer la prothèse dentaire qu'elle portait dans «La Planète des Singes» ! Une fois mise, c'était tout à fait Lady Tottington!»

Au final, cinq années de labeur. «Cela va vous surprendre, mais le film achevé, je ne savais pas quoi en penser. Après cinq ans, on ne sait vraiment plus si les gags fonctionnent. Après la première projection publique, j'étais totalement soulagé d'entendre les gens rire au bon moment!»

© La Libre Belgique 2005

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