Des baisers, s’il vous plaît

Depuis "Changement d’adresse" et jusqu’à "Un baiser s’il vous plaît", Emmanuel Mouret poursuit une exploration du badinage plutôt jubilatoire. Trop rapidement (et erronément) assimilé à du théâtre filmé, son art relève de l’entomologie : la caméra de Mouret chasse les contradictions et les pulsions de la geste amoureuse avec une gourmandise communicative quand ses scénarios, ciselés, font de fariboles de délicieuses joutes verbales.

A.Lo.

Depuis "Changement d’adresse" et jusqu’à "Un baiser s’il vous plaît", Emmanuel Mouret poursuit une exploration du badinage plutôt jubilatoire. Trop rapidement (et erronément) assimilé à du théâtre filmé, son art relève de l’entomologie : la caméra de Mouret chasse les contradictions et les pulsions de la geste amoureuse avec une gourmandise communicative quand ses scénarios, ciselés, font de fariboles de délicieuses joutes verbales.

Empruntant son titre à un antique traité d’Ovide, "L’art d’aimer" débute sur une citation : "Il n’y a pas d’amour sans musique." Celle de Mouret, reconnaissable entre mille, offre une variation sur le mode de la fugue. Son récit se décompose cette fois en une suite d’historiettes vaguement entrelacées les unes dans les autres, et dont on suit le déroulement en parallèle - occasion pour l’auteur de maintenir un certain suspense. Malicieux, Mouret s’ingénie une fois de plus à placer ses personnages dans des situations pratiquement vaudevillesques. Une bourgeoise (Judith Godrèche, dans son élément) s’inquiète du célibat longue durée de sa timide amie (Julie Depardieu). Parallèlement, son meilleur ami (Laurent Stocker), libraire, follement épris d’elle, la supplie de lui accorder ses faveurs, ne serait-ce qu’une fois : bonne pâte, elle finit par accepter, puis s’ingénie à trouver une échappatoire. Une épouse fidèle (Ariane Ascaride) avoue à son mari (Philippe Magnan) qu’elle désire le quitter parce qu’elle l’aime trop et craint, un jour, de le tromper. Un quadra (François Cluzet), que sa libido travaille, est mis dans tous ses états par une blonde voisine (Frédérique Bel, actrice fétiche de Mouret), récente célibataire, aguicheuse, mais indécise. Une jeune femme (Pascale Arbillot) obtient de son petit ami de longue date (Gaspard Ulliel) le droit de satisfaire le désir charnel d’un collègue (Mouret) avant le départ de celui-ci pour le bout du monde.

Chaque situation débouche évidemment sur une impasse ou des quiproquos, et, puisque l’ombre d’Ovide plane, s’accompagne d’une maxime - et ne pas prendre, évidemment, au premier degré. Et si Mouret est moral, il l’est dans la légèreté et, naturellement, le plaisir. Même si, à l’instar de son premier conte, aimer est aussi, parfois, une maladie qui rime avec gravité.

Réalisation et scénario : Emmanuel Mouret. Avec Judith Godrèche, Frédérique Bel, François Cluzet, Julie Depardieu, 1h46.

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