"Guy", avec un Alex Lutz roi de la transformation, bluffant
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/5fe4e627-8f76-40cd-8b84-1471638c0a7a.png)
Publié le 29-08-2018 à 14h09
:focal(828x421.5:838x411.5)/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/Q2ACSVIJD5E4DK5NSVDUWFCEOA.jpg)
Alex Lutz devant et derrière la caméra dans un portrait attachant d’un vieux chanteur sur le retour.La transformation est absolument saisissante. Face à la caméra, Alex Lutz apparaît en vieux beau, les cheveux blancs, la peau ridée et burinée, tandis que sa chemise ouverte laisse apparaître des taches de vieillesse sur son torse. "Guy" devrait logiquement recevoir le César du meilleur maquillage (pour Laetitia Quillery et Geoffroy Felley). Rarement en effet a-t-on vu à l’écran quelqu’un d’aussi bien vieilli. Au point que rapidement, on ne se pose plus la question du maquillage. Alex Lutz est Guy Jamet, cette ancienne gloire de la chanson française aux faux airs de Belmondo et de Sardou, dont le comédien capte magnifiquement les tics : la bouche à demi ouverte, les regards inquiets, les interjections…
Entre les années 60 et 90, Guy a été une star, façon Claude François, Gérard Lenormand ou Adamo, selon les clips vintage que met en scène avec gourmandise Lutz. Aujourd’hui condamné aux tournées en province, il tente de revenir sur le devant de la scène en sortant un double best of ("avec quelques inédits quand même"), passe sur "Europe numéro 1", s’assied sur le divan rouge de Drucker. C’est la raison, aussi, pour laquelle il a accepté de se laisser suivre par un jeune journaliste souhaitant réaliser un portrait du vieux crooner sur le retour. Ce que Guy ne sait pas, c’est que le jeune homme qui le filme est son fils illégitime..
Dévoilé en mai à Cannes, en clôture de la Semaine de la critique, "Guy", le second long métrage d’Alex Lutz (après "Le talent de mes amis" en 2015), est un film étonnant atypique. Quelle idée en effet pour un jeune acteur de vouloir incarner un vieil homme dont la vie est derrière lui ? Et le comédien made in Canal est plutôt ébouriffant dans cette performance. Mais justement, "Guy" se résume par moments un peu trop à une performance, à un film programmatique où se lit le projet un peu égocentrique d’un acteur en mal de défi après avoir incarné durant des années une femme plus vraie que nature dans la pastille "La revue de presse de Catherine et Liliane".
Conçu comme un faux documentaire capturant sur le vif des moments de vie de l’artiste, sur scène, dans les coulisses, dans sa maison isolée d’Aix-en-Provence avec ses chevaux, "Guy" est cependant très bien écrit et croque avec justesse le milieu du show-business, notamment à travers d’amusants caméos. Tandis que Lutz surprend par la tonalité mélancolique (sur la relation au temps qui passe, au père que l’on n’a pas eu) qui émerge de son film à mesure qu’au-delà de sa caricature initiale, se révèle le personnage. Car, malgré son côté agaçant, Lutz conserve à Guy une forme d’honnêteté. A l’image de ces chansons d’amour un peu stupides ("Passionnément", "Tendresses", "Caresses", "Un slow avec la Lune"…), que Lutz a imaginées et qu’il interprète comme autant de pastiches et non de parodies. Dans une comédie atypique, qui fait rire sans réellement se moquer de son héros pourtant pathétique…
Réalisation : Alex Lutz. Scénario : Alex Lutz, Thibault Segouin & Anaïs Deban. Musique : Vincent Blanchard et Romain Greffe. Avec Alex Lutz, Tom Dingler, Nicole Calfan, Pascale Arbillot, Dani, Elodie Bouchez, Brigitte Roüan, Bruno Sanchez… 1 h 41.
