Fespaco : que faut-il retenir du palmarès de cette 26e édition mouvementée?
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- Publié le 03-03-2019 à 19h13
- Mis à jour le 04-03-2019 à 18h46
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Cette année, le Festival panafricain du cinéma et de la télévision (Fespaco) fêtait son 50e anniversaire. Sa 26e édition s’est clôturée, ce samedi à Ouagadougou. Avec l’Étalon d’or remis à la coproduction belgo-franco-rwandaise "The Mercy of the Jungle". L’histoire du Festival panafricain de cinéma et de télévision de Ouagadougou (Fespaco) retiendra cette belle ironie : le Rwanda a remporté le prix le plus prestigieux de la catégorie fiction avec son tout premier film présenté en compétition au Burkina Faso, la Mecque du cinéma africain. Et cela, sans que le pays des 1000 collines soit doté d’une véritable industrie du cinéma, ni ne dispose d’aucun fonds dédié. Cette victoire est due à la ténacité d’une poignée d’hommes et de femmes rwandais, mais surtout à la mobilisation de deux producteurs, un Belge et un Français, et à l’engagement d’un acteur belge originaire de RDC, Marc Zinga, sacré meilleur interprète masculin samedi soir à Ouaga.
Située à cheval sur la frontière de ces deux pays toujours sous tension, l’histoire de The Mercy of the Jungle , le film de Joël Karekezi, s’affiche résolument antimilitariste. Censée se dérouler dans le Kivu (RDC), elle a en réalité été tournée dans la partie ougandaise de cette forêt incroyablement dense, qui se moque bien de la folie des hommes et de la notion de frontière.
Un palmarès qui reflète les menaces du XXIe siècle
Le palmarès de la 26e édition du Fespaco est porteur de plusieurs heureux rappels à la raison, à la tolérance et au bon sens élémentaires trop souvent bafoués, pas seulement en Afrique mais à travers le monde. Il pointe les menaces qui pèsent sur notre quotidien : dangers de la radicalisation ( Fatwa , film belgo-tunisen de Mahmoud Ben Mahmoud sorti en salles le 20 février dernier), ravages des guerres ( The Mercy of the Jungle , Rwanda ; Desrances , Burkina Faso), violences contre les femmes et homophobie ( Rafiki de Wanuri Kahiu, Kenya), lutte pour la justice (Whispering Truth to Power, Afrique du Sud), exploitation des ressources naturelles et travail des enfants ( Le Loup d’or de Balolé d’Aïcha Boro Leterrier, Burkina Faso) mais aussi intégrisme et menaces contre les artistes ( Au temps où les Arabes dansaient de Jawad Rhalib, Maroc). Autre clin d’œil de l’Histoire : deux des films ayant reçu les plus hautes récompenses lors de cette édition du 50e anniversaire du Fespaco (Étalon d’or de la fiction et Étalon d’argent du documentaire) ont été coproduits par la petite Belgique.
Tout palmarès est toujours sujet à discussions et à controverses. Celui de cette 26e édition ne fait pas exception à la règle, notamment dans la catégorie documentaire. De nombreux spectateurs et cinéphiles ont en effet regretté que le palmarès fasse si peu écho à une thématique pourtant bien présente parmi les 21 films présentés en compétition : celle de la mobilisation de la jeunesse et des soulèvements populaires à travers l’Afrique, hier comme aujourd’hui. Des films dont on espère qu’ils trouveront leur chemin jusqu’aux écrans européens, en festivals ou ailleurs : Fahavalo, Madagascar 1947 (Madagascar) ; Kinshasa Makambo (RDC), Par tous les moyens nécessaires (Afrique du Sud), On a le temps pour nous (Burkina Faso, Sénégal), Silas (Kenya)…
Le festival
Créé en 1969 à l’initiative d’une poignée de cinéphiles et de cinéaste africains, le Festival panafricain du cinéma et de la télévision de Ouagadougou se déroule tous les deux ans dans la capitale du Burkina Faso. Devenu au fil des ans l’un des principaux rendez-vous de cinéma en Afrique noire, le Fespaco a pour mission de favoriser la diffusion du cinéma africain mais aussi de permettre des contacts et des échanges entre professionnels. La principale récompense du festival, l’Étalon d’or de Yennenga, est une référence à cette princesse guerrière fondatrice du royaume mossi (la principale ethnie du Burkina Faso). En son hommage, la cérémonie d’ouverture du Fespaco s’ouvre tous les deux ans par la traditionnelle parade des cavalières.
Le palmarès
Fiction
Étalon d’or de Yennenga : The Mercy of the Jungle de Joël Karekezi (Rwanda/France/Belgique)
Étalon d’argent : Karma de Khaled Youssef (Égypte)
Étalon de bronze : Fatwa de Mahmoud Ben Mahmoud (Tunisie/Belgique)
Meilleure actrice : Samantha Mugotsia dans Rafiki de Wanuri Kahiu (Kenya)
Meilleur acteur : Marc Zinga dans The Mercy of the Jungle de J. Karekezi (Rwanda)
Documentaire
Étalon d’or : Le Loup d’or de Balolé d’Aicha Boro Leterrier (Burkina Faso)
Étalon d’argent : Au temps où les Arabes dansaient de Jawad Rhalib (Belgique/Maroc)
Étalon de bronze : Whispering Truth to Power de Shameela Seedat (Afr. du Sud)
Animation
Prix du jury : Da Tsysy Da de Tojo Niaina Rajaofera (Madagascar)
1er Prix : Briska de Nadia Rais (Tunisie)
2e Prix : Un Kalabanda a mangé mes devoirs de Raymond Malinga (Ouganda)
Séries TV africaines
Premier Prix : Petites histoires, grandes vérités d’Ambrose B. Cooke (Ghana)
Deuxième Prix : Blog de Melyou Akré Loba Diby (Côte d’Ivoire)