"Vacancy": Dans les coulisses de l’Amérique invisible
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Publié le 03-04-2019 à 11h14 - Mis à jour le 03-04-2019 à 12h18
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Dans les motels miteux, à la rencontre des perdants du rêve américain dans un magnifique documentaire qui vient de décrocher le prix de la critique au Festival Millenium.
A l’écran, les images d’une Amérique déglinguée, avec ses cafés abandonnés, le vent qui souffle le sable ocre, sont magnifiques. En un instant, nous voilà plongés dans un univers évocateur, celui du cinéma américain, de ce grand Ouest, où tout est possible, selon le mythe fondateur états-unien. L’image même de la liberté ! Mais on n’est pas dans une fiction… L’Amérique que filme ici la Française Alexandra Kandy Longuet est celle des déclassés. Celle qui, depuis la crise de 2007, a perdu 8,5 millions d’emplois, celle dont 15 % de la population survit grâce aux bons alimentaires.
Auteure de documentaires radiophoniques pour la RTBF ou France Culture (notamment Katrina, 10 ans après) mais aussi de l’excellent Nouvelle-Orléans, Laboratoire de l’Amérique (Etoile de la Scam en 2017), la cinéaste connaît bien les Etats-Unis. Dans Vacancy, elle propose un autre regard sur une icône de la pop culture : le motel.

Décor de cinéma emblématique (de Bagdad Café à Stranger than Paradise, en passant par Psychose ou le récent Sale temps à l’hôtel El Royale), le motel est ici filmé comme un marqueur social. Comme Sean Baker dans The Florida Project , la Française utilise le motel comme une porte d’entrée pour se glisser dans l’envers du rêve américain. Ils s’appellent Beverly, Manuel ou Vern. Ils sont plutôt âgés, drogués, ex-taulards ou au chômage. Tous habitent dans des motels miteux, posés au bord d’une route, d’une ligne de chemin de fer, en plein désert de Californie, l’Etat le plus inégalitaire du pays, où les ultra-riches de la Silicon Valley ou de Beverly Hills ne croisent jamais les plus pauvres du pays…
Ce que filme Alexandra Kandy Longuet, grâce à une photo superbe, souvent évocatrice et poétique, c’est le quotidien de ces exclus, ces journées qui se ressemblent, où, tous les matins, on se réveille dans la peur de ne pas pouvoir payer sa nuit de motel. Grand prix du jury au dernier festival Millenium, Vacancy rend visible des êtres brisés, qui tentent pourtant de se raccrocher, sans trop y croire, à un dernier rêve : retrouver leurs enfants, leur femme, mener une vie normale... Au sein du pays le plus riche du monde.
Vacancy Documentaire social De Alexandra Kandy Longuet Durée 1h20

Le film sort au cinéma Galeries à Bruxelles. La cinéaste rencontrera le public le 11 avril au Quai 10 à Charleroi, le 16 mai au Cinéma Ecran à Couvin, le 4 juin aux Grignoux à Liège, le 5 juin au Caméo à Namur... A noter également une projection-débat, le 23 avril aux Galeries, sur le thème “La Belgique, pays inégalitaire ?”, en présence du philosophe et économiste de l’UCL Philippe Van Parijs.
