"Gloria Bell": un "auto-remake" admirablement réussi avec une Julianne Moore flamboyante
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- Publié le 30-04-2019 à 18h28
- Mis à jour le 30-04-2019 à 18h30
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Julianne Moore défie le temps dans l’auto-remake du film qui a fait découvrir Sebastián Lelio. Divorcée depuis 12 ans, Gloria Bell (Julianne Moore), agent d’assurance à Los Angeles, approche de la soixantaine de façon rayonnante. Le soir, après le boulot, elle écume les bars et les boîtes de nuit pour profiter de la vie, pour, sur la piste de danse, dans le regard des hommes, se sentir jeune et désirée. La journée, elle est une mère et une grand-mère modèle, toujours disponible pour son fils et sa fille. Ou pour sa mère, qui lui conseille de profiter de la vie.
Un soir, dans un bar, elle tombe sur Arnold (John Turturro), divorcé depuis un an. "C’est récent", commente Gloria. "Enfin !", répond-il du tac au tac. Le courant passe. Ils finissent la nuit ensemble. Et il la rappelle quelques jours plus tard…
Remake américain
En 2013, Sebastián Lelio, déjà remarqué avec Navidad en 2009, faisait une entrée remarquée sur la scène internationale avec Gloria, superbe portrait de femme qui refuse de se résigner à vieillir. Un rôle fort, intense, qui valait le prix d’interprétation féminine à la Berlinale à Paulina García. C’est Julianne Moore qui succède à l’actrice chilienne dans le second film en anglais du cinéaste chilien après Obedience en 2017, avec Rachel Weisz et Rachel McAdams.
Comme toujours (y compris dans l’épatant Une femme fantastique , Oscar du meilleur film étranger), Lelio dresse ici le portrait d’une femme qui cherche à se libérer du carcan que lui impose la société. Si le thème est le même, et s’il s’essaye au périlleux exercice de l’auto-remake, le réalisateur s’en sort admirablement. Car si l’on retrouve ici toutes les scènes fortes de son film original (les tubes pop des années 80 sur lesquels Gloria danse en boîte et qu’elle fredonne au volant de sa voiture, le carrousel du casino, la marionnette en forme de squelette…), la Gloria de L.A. n’est qu’une lointaine cousine de celle de Santiago.
Cela tient évidemment en partie à l’actrice. Julianne Moore porte en effet la cinquantaine de façon flamboyante. L’idée n’est donc plus ici de savoir si elle est toujours capable de séduire, mais d’observer les frustrations intimes d’une femme qui n’ose pas se libérer totalement, qui reste prisonnière de sa famille, de son milieu social, de l’univers dans lequel elle évolue…
Danser sur le pont du Titanic
Ce n’est évidemment pas un hasard si Lelio a choisi de transposer l’histoire à Los Angeles, ville par excellence de l’image, du paraître, des corps jeunes à tout prix. Toujours produit par son compatriote Pablo Larraín, le Chilien pose un regard beaucoup plus cruel sur son héroïne, qu’il présente comme une femme qui, jusqu’au bout, alors que le monde s’écroule, que la planète flambe, veut continuer à danser sur le pont du Titanic. Pour autant, il n’y a aucun cynisme ou mépris dans l’œil de Lelio, plutôt de la bienveillance pour une femme déprimée par sa vie terne, qui, incapable de donner un sens à son existence, continue de chercher à s’évader dans la musique, l’alcool, la drague… Point de libération donc, mais une tonalité beaucoup plus grave...
Gloria Bell Comédie dramatique De Sebastián Lelio Scénario Sebastián Lelio Musique Matthew Herbert Avec Julianne Moore, John Turturro, Michael Cera, Jeanne Tripplehorn… Durée 1h42.
