"Frères de sang": Naples, Rome... même mafia

"Frères de sang": Naples, Rome... même mafia

Les frères D’Innocenzo proposent une immersion dans l’organisation criminelle. Une de plus. Ça sent les épinards ! Dans leur petite camionnette, les deux ados livreurs se marrent en rentrant chez eux, dans la nuit quand, "Boum !", ils ont percuté quelque chose. Coup d’œil dans le rétro. Un passant est allongé sur le sol. Le conducteur est paniqué, son ami lui dit de ne pas s’arrêter. C’est la fuite en avant.

N’importe où, cet accident et cette réaction suffiraient à bousiller une vie entière. Pas dans ce quartier de la banlieue nord de Rome. C’est que la victime est un mouchard dont la mafia locale voulait se débarrasser. Le père d’un des jeunes s’empresse de signaler au parrain du coin que son fiston vient de lui rendre ce fier service. Cela vaut aux deux garçons de recevoir leur ticket d’entrée dans l’organisation criminelle. Ils se faisaient péniblement 30 euros par soirée et voilà que leurs poches ne sont plus assez grandes pour les milliers d’euros qu’ils gagnent désormais. Plus le temps de fréquenter l’école, trop occupés à organiser le travail des prostituées et à devenir des tueurs à gages.

Le décor est en place, le film peut commencer. On le croit, quand mère et fils qui s’épaulaient, jusque-là, dans l’adversité, s’engueulent désormais violemment depuis qu’elle a découvert les nouvelles activités de son fiston. Fausse piste, on aura droit à la traditionnelle odyssée criminelle.

Sous la barre

Matteo Garrone a placé la barre tellement haut dans Gomorra que les frères D’Innocenzo passent largement en dessous. D’abord, parce que dès la scène d’ouverture, l’influence de Garonne saute aux yeux, même si par la suite, le duo va prendre ses distances avec le réalisme pour proposer un récit de plus en plus stylisé avec un travail chromatique très chiadé, peut être trop.

Ensuite, parce qu’ils font les mauvais choix. En concentrant leur attention sur le protagoniste qui a la tête de l’emploi plutôt que celui qui a un visage d’ange. Puis, parce qu’ils refusent d’explorer les rapports avec les parents aux profils intéressants, la mère courage de l’un et le père loser de l’autre.

Enfin, ce récit est aussi celui de la découverte de la face cachée et brutale d’une organisation criminelle par des jeunes éblouis par l’argent facile et le pouvoir des armes. On pense à At Close Range de James Foley et l’extraordinaire confrontation entre père et fils, entre Christopher Walken et Sean Penn. Rien de tout de cela, ici, aucun nœud dramatique ne parvient à se tendre.

Ce premier film témoigne de la capacité des frères D’Innocenzo à mener un récit. En revanche, entre l’authenticité, la pose et la stylisation, ils n’ont pas encore choisi leur direction.

Frères de sang / La terra dell’abbastanza Chronique mafieuse De Damiano et Fabio D’Innocenzo Avec Andrea Carpenzano, Matteo Olivetti et Luca Zingaretti Durée 1h35.

"Frères de sang": Naples, Rome... même mafia
©IPM
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