Monica Vitti, une icône du cinéma italien
L’actrice fétiche de Michelangelo Antonioni, qui l'avait révélée dans L'Avventura en 1960, s’est éteinte ce mercredi à l’âge de 90 ans, des suites de la maladie d'Alzheimer, qui était déclarée à la fin des années 1990.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/5fe4e627-8f76-40cd-8b84-1471638c0a7a.png)
- Publié le 02-02-2022 à 14h41
- Mis à jour le 02-02-2022 à 20h07
/cloudfront-eu-central-1.images.arcpublishing.com/ipmgroup/Q4VZGFXARZD4VHYKUSO4ZQCV3I.jpg)
À 90 ans, Monica Vitti s’est éclipsée discrètement, ce mercredi 2 février à Rome, où elle était née le 3 novembre 1931. Elle avait 90 ans. Mais cela fait près de deux décennies que, atteinte de la maladie d’Alzheimer, la star italienne avait disparu de la vie publique.
Pour le grand public italien, c'est un monument national qui s'en va, une icône du cinéma populaire des années 1970. En dix ans, de La Fille au pistolet de Mario Monicelli en 1969 (photo ci-dessous) à Amori miei de Steno en 1979, en passant par Poussière d'étoiles d'Alberto Sorti en 1973, "la Vitti" décrocha ainsi cinq David di Donatello (l'équivalent d'un César) de la meilleure actrice! Pour les cinéphiles du monde entier, le nom de Monica Vitti restera à jamais lié à celui de Michelangelo Antonioni, dont elle fut la muse et la compagne.

Cinq films avec Antonioni
Leur rencontre a lieu en 1957. Le maestro repère la comédienne sur les planches, où cette jeune diplômée de l'Académie nationale d'art dramatique de Rome fait ses débuts en 1953 - durant sa carrière théâtrale, Vitti jouera des classiques comme Machiavel, Molière ou Shakespeare, mais aussi Brecht ou Ionesco. Alors qu'il vient d'achever le tournage de son sixième long métrage Il grido (Le Cri), le cinéaste l'engage pour enregistrer, en post-synchronisation, la voix de l'actrice Maria Luisa Mangini (alias Dorian Gray). D'abord séduit par sa voix légèrement éraillée, Antonioni craque pour la jeune femme de 26 ans. Trois ans plus tard, il lui confie de rôle de Claudia dans L'Avventura (photo ci-dessous).
Monica Vitti y incarne une jeune femme qui, lors d’un voyage en bateau sur une petite île désertique de l’archipel éolien, devient la maîtresse du fiancé de sa meilleure amie, suite à la disparition de celle-ci. Blonde, l’actrice incarne plus le trouble, le mystère et le désir, dans un film aujourd’hui encore d’une éclatante modernité.
Le coup de foudre cinématographique entre Antonioni et Vitti se poursuit avec La Nuit (1961) — qui vaudra sa première grande reconnaissance à l'actrice, un Ruban d'argent du meilleur second rôle —, L'Éclipse (1962) et Le Désert rouge (1964). Le couple se sépare en 1967, au lendemain du triomphe à Cannes d'Antonioni avec Blow up, qui lui ouvrira les portes d'Hollywood. Même si, à son retour en Italie, le cinéaste lui confiera un cinquième et dernier rôle, celui de la reine dans Le Mystère d'Oberwald, d'après Cocteau en 1980.

Avec les plus grands
Révélée par Antonioni, Monica Vitti va inspirer les plus grands metteurs en scène de son époque. René Clair la fait ainsi tourner dans un des sketch des Quatre vérités en 1962, Roger Vadim dans Château en Suède (d'après Françoise Sagan en 1963), Joseph Losey la place face à Terence Stamp et Dirk Bogarde dans Modesty Blaise en 1966. Elle tourne également aux côtés de Jean-Claude Brialy dans Le Fantôme de la liberté de Luis Buñuel (1974) et de Jean Yanne dans La Raison d'État d'André Cayatte (1978).
En Italie, elle collabore avec des cinéastes comme Franco Rossi, Alberto Sordi, Ettore Scola (qui la fait jouer face à Marcello Mastroianni dans Drame de la jalousie en 1970) ou Dino Risi, qui lui confie pas moins de 11 rôles dans Moi, la femme en 1971. Mais c'est Mario Monicelli qui lui offrira l'un de ses rôles les plus marquants, celui d'Assunta, une jeune Sicilienne à la recherche de son fiancé en Angleterre dans La Fille au pistolet en 1968. Un rôle qui lui vaudra le prix d'interprétation à Saint-Sébastien, mais aussi un Ruban d'argent et un David di Donatello.
Dans les années 1980, Vitti continue de tourner pour Sergio Corbucci, Mario Monicelli ou Alberto Sordi. Et elle décide de passer derrière la caméra en 1989 avec Scandale secret, son seul film en tant que réalisatrice et son dernier rôle à l'écran, aux côtés de la comédienne belge Catherine Spaak (photo ci-dessous).
Récompensée d'un Lion d'or d'honneur à la Mostra de Venise en 1995, Monica Vitti passera le restant de ses jours aux côtés du cinéaste Roberto Russo, qui l'avait rencontrée sur le tournage son premier filmFlirt en 1984, qui avait valu à l'actrice un Ours d'argent à la Berlinale.
