"Belle": une relecture façon anime japonais du conte de "La Belle et la Bête"

Avec beaucoup d’humanité, Mamoru Hosada relit le conte à l’heure des réseaux sociaux.

Jeune lycéenne peu sûre d’elle, Suzu vit seule avec son père dans une petite ville de province japonaise. À l’école, elle se désole de ne pas être aussi populaire que la belle Luka et a toujours le béguin pour son ami d’enfance, un as du basket sur qui craquent toutes les filles. Surtout, depuis la mort de sa mère, qui lui a appris la musique, Suzu n’est plus capable de chanter… Alors, quand sa copine lui propose de s’inscrire à U, un monde virtuel réunissant 5 milliards d’utilisateurs à travers le monde, la gamine décide de franchir le pas…

Dans ce monde parallèle "où une nouvelle vie est possible", comme le clame la publicité, Suzu devient Belle. Généré automatiquement grâce à des capteurs biométriques, son avatar est une séduisante jeune fille. Et, dans l'anonymat numérique, elle est à nouveau capable de chanter. Dès sa première chanson, dédiée à sa mère disparue, Belle séduit le cœur de millions de personnes, devenant instantanément une immense star, enflammant la curiosité de la toile quant à l'identité de celle qui se cache derrière cet avatar. Lors de l'un de ses concerts, débarque le Dragon, un monstre détruisant tout sur son passage. Et là encore, le monde entier se demande qui est cette Bête cruelle, avec laquelle Suzu se sent pourtant une connexion si profonde…

À l’écoute du mal-être des jeunes Japonais

Avec Les Enfants loups, Ame et Yuki en 2012, Le Garçon et la Bête en 2015 et surtout Miraï, ma petite sœur en 2018, Mamoru Hosada s'est imposé comme l'un des grands noms de l'animation nipponne. Avec son sixième long métrage (le quatrième produit par le Studio Chizu, qu'il fondait il y a 10 ans), le cinéaste signe une réinterprétation de La Belle et la Bête à l'heure du numérique et des réseaux sociaux, en s'intéressant à nouveau à la difficile période de l'adolescence.

Visuellement magnifique - avec ce contraste entre les décors ultra-réalistes du Japon d'aujourd'hui et la mise en images totalement libre et fantasque du monde virtuel dans lequel évoluent les avatars des personnages -, Belle est un conte d'apprentissage a priori classique. Mais s'il en reprend les codes, c'est pour développer des thèmes très matures sur l'adolescence, l'insécurité, le deuil, le suicide, le harcèlement…

Hosada frappe par un humanisme profond, qui transcende les passages a priori les plus sentimentaux. Surtout, il emporte le spectateur par son lyrisme, notamment dans quelques numéros musicaux renversants. Abordant des questions profondes de façon légère et colorée, maniant l’humour avec la même facilité que l’émotion, il accouche d’un film d’une grande puissance dramatique. Un film qui fait chaud au cœur par sa volonté de voir et faire ressortir le meilleur en chacun de ses personnages.

Belle / Ryu to sobakasu no hime Conte musical Scénario & réalisation Mamoru Hosoda Musique Taisei Iwasaki, Ludvig Forssell & Yuta Bandoh Montage Shigeru Nishiyama Durée 2h02.

"Belle": une relecture façon anime japonais du conte de "La Belle et la Bête"
©D.R.
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