"Animals": le film choc sur le premier meurtre homophobe reconnu en Belgique
Nabil Ben Yadir revient, de façon brutale mais nécessaire, sur l’affaire Ihsane Jarfi, tué à Liège en 2012 parce qu’homosexuel.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/5fe4e627-8f76-40cd-8b84-1471638c0a7a.png)
Publié le 09-03-2022 à 09h43 - Mis à jour le 11-03-2022 à 10h50
Ce soir, Brahim (Soufiane Chilah) fête avec toute sa famille et leurs amis l’anniversaire de sa mère, une Belge qui a épousé un Arabe et fait de beaux enfants. Sa famille a beau être ouverte, le jeune homme est quand même stressé à l’idée d’inviter son petit copain Thomas, qu’il a décidé de présenter comme un simple "ami". D’ailleurs, le frère de Brahim empêche Thomas d’assister à la fête. Dégoûté, Brahim décide de partir rejoindre son homme au centre de Liège. Mais à la sortie d’un bar gay, il fait une mauvaise rencontre…
Découvert avec Les Barons, irrésistible comédie bruxelloise en 2009, Nabil Ben Yadir n'a pas vraiment le cœur à rire pour son quatrième long métrage (après La Marche en 2013 et Angle mort en 2017). Tourné dans la plus grande discrétion, Animals revient sur une histoire vraie, celle d'Ihsane Jarfi, jeune homme de 32 ans sauvagement assassiné dans ce qui fut reconnu pour la première fois par la justice belge comme un meurtre homophobe (cf. ci-contre).
Montrer l’ultra-violence
Coécrit avec Antoine Cuypers (réalisateur de Préjudice avec Nathalie Baye en 2015), le scénario d'Animals retrace avec minutie, quasi en temps réel, le calvaire de ce jeune homosexuel. Côté mise en scène, Ben Yadir colle au plus près de son personnage, en cadrant son dos, sa tête, dans un format 4/3, qui renforce le sentiment d'oppression du spectateur. Mais le cœur de son film, c'est la reconstitution du crime lui-même. Là, le cinéaste choisit le point de vue des agresseurs, qui filment leur passage à tabac avec leurs téléphones portables. On a beau savoir qu'on est au cinéma, la violence est glaçante, quasi insupportable. Et pourtant, il faut pouvoir regarder en face ce déchaînement de haine et d'intolérance…
Très dur, Animals aborde frontalement le poison de l'homophobie, qui transcende les milieux sociaux et culturels. Brahim en est la victime dans sa famille musulmane - qui ne peut accepter son orientation sexuelle -, mais aussi de la part de jeunes de son âge bien décidé à "casser du PD"… On peut d'ailleurs souligner le courage de Nabil Ben Yadir, cinéaste bruxellois d'origine marocaine, de s'attaquer au sujet de l'homophobie, qui continue, sans doute un peu plus qu'ailleurs, d'être tabou dans sa communauté d'origine.
Découvert dans Black d'Adil El Arbi et Bilall Fallah en 2015, puis revu dans Angle mort de Ben Yadir, le jeune acteur Soufiane Chilah est impressionnant. Il prête ses traits et son corps martyrisé au personnage principal d'Animals, victime expiatoire de la haine de barbares ignares…
Animals Film d'horreur De Nabil Ben Yadir Scénario Nabil Ben Yadir et Antoine Cuypers Photographie Frank Van Den Eeden Avec Soufiane Chilah, Gianni Guettaf, Lionel Maisin… Durée 1h40.
