"La panthère des neiges": un complément visuel nécessaire au livre de Sylvian Tesson

Voyage initiatique envoûtant au Tibet, en compagnie du photographe Vincent Munier et de l’écrivain Sylvain Tesson.

"Vincent m'avait invité au Tibet, à la poursuite d'un être qui je croyais disparu : la panthère des neiges. Pour moi, c'était un rêve, pour lui, un rendez-vous…" Dans son récit La Panthère des neiges, qui décrocha le Prix Renaudot en 2019, Sylvain Tesson retraçait son épopée tibétaine, en compagnie du photographe animalier Vincent Munier, sur les traces de la mythique panthère des neiges. Récent César du meilleur documentaire, le film homonyme de Marie Amiguet et Vincent Munier - connu notamment au cinéma pour son travail aux côtés de Luc Jacquet sur L'Empereur en 2017 et pour son propre film Abyssinie, l'appel du loup, coréalisé avec Laurent Joffrion en 2012 - n'est pas l'adaptation du livre de Tesson. C'est plutôt son making of. Même si le terme est très réducteur. Disons plutôt que La Panthère des neiges est un complément visuel nécessaire au livre de Sylvian Tesson (dont l'essai Dans les forêts de Sibérie avait déjà été porté à l'écran par Safy Nebbou en 2016).

Retraçant ce périple dans le froid, la neige et l'humidité, dans l'espoir d'entrapercevoir une bête invisible, La Panthère des neiges est un grand film, qui mêle la quête du photographe, les mots et le regard de l'écrivain voyageur et le travail de documentation de cette expédition par la cinéaste Marie Amiguet (qui reste, elle, invisible à l'écran). Sans oublier la musique envoûtante de Warren Ellis et de son complice Nick Cave. Bref, tout est réuni pour conférer à ce documentaire une dimension toute particulière.

Voyage introspectif

La Panthère des neiges ne se résume pas en effet à un simple documentaire animalier. Porté par des images somptueuses et la voix off de Tesson (parfois un peu trop bavard), le film propose une réflexion sur la nature profonde de l'humanité. De tels paysages, une nature aussi intacte suscitent forcément un foisonnement intérieur chez ceux qui en sont les témoins privilégiés. Ce que proposent Munier et Aminguet ici, c'est donc une balade méditative et contemplative sur la place de l'homme dans la nature et sur l'affolement d'une modernité délétère. Thème cher à Tesson.

En mettant en scène le patient affût de la très discrète panthère des neiges, le film place le spectateur dans la même position, celle de l'attente, peut-être déçue, de ce fantôme caché dans la roche, qui ne peut faire à ses traqueurs que le cadeau de son apparition, furtive. Même si sa présence est partout, dans les traces qu'elle laisse, mais surtout dans le fol espoir qu'elle fait naître chez Munier et Tesson. "Au tout tout de suite de l'épilepsie moderne, s'opposait le sans doute rien, jamais, de l'affût", résume joliment ce dernier…

Si La Panthère des neiges propose de nous reconnecter avec la nature, de redécouvrir des notions comme la beauté, la patience ou la poésie, il offre également une méditation sur la présence de l'invisible, sur cette nature qui nous regarde sans que nous la voyions réellement… Autant de réflexions totalement en phase avec les angoisses environnementales de notre temps.

La Panthère des neiges Documentaire De Vincent Munier et Marie Amiguet Photographie Vincent Munier, Marie Amiguet et Léo-Pol Jacquot Musique Warren Ellis et Nick Cave Montage Vincent Schmitt et Marie Amiguet Durée 1h32.

"La panthère des neiges": un complément visuel nécessaire au livre de Sylvian Tesson
©D.R.
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