"Dalva" : retrouver l'innocence de l'enfance

En salles ce mercredi 22 mars, un premier film belge très sensible sur le thème de la pédophilie, réalisé par la Française Emmanuelle Nicot.

Présenté à la Semaine de la Critique à Cannes en mai 2022, où il a décroché le prix de la presse internationale, Dalva d’Emmanuelle Nicot est un premier film très fort. La jeune cinéaste française installée à Bruxelles y évoque en effet la pédophilie.

Emmanuelle Nicot : “Comment redevient-on soi-même quand on sort de l’emprise ?”

Le film s’ouvre sur une intervention de police au domicile d’un homme. Dalva (Zelda Samson), sa fille, hurle : “Jacques ! Jacques ! Laissez-le… ” Robe de soirée, bas nylon, colliers autour du cou… La gamine de 12 ans s’habille et agit comme une femme, et non comme une fille de son âge. Et être séparée de l’homme avec lequel elle vit lui semble la plus cruelle des injustices !

Placée dans un foyer pour enfants en difficulté de Givet, à la frontière belge, Dalva va devoir se laisser apprivoiser par Jayden (Alexis Manenti), son éducateur référent. Tandis qu’elle se rapproche de Samia (Fanta Guirassy), une ado au caractère explosif avec qui elle partage sa chambre. À leurs côtés, Dalva va, petit à petit, sortir de son déni concernant l’expérience révoltante qu’elle a vécue auprès de son père…

Dalva, un film coup de point sur une ado abusée par son père.
"Dalva", un film coup de poing sur une ado abusée par son père campée par l'excellente Zelda Samson. ©D.R.

Redevenir une enfant

Ce sujet douloureux de l'inceste, Emmanuelle Nicot l’aborde avec une grande sensibilité, trouvant le parfait équilibre entre le drame et la lumière. Si la cinéaste ne cache rien du traumatisme subi par sa jeune héroïne — notamment dans une scène très forte d’examen gynécologique au début du film —, elle ne tombe jamais dans le voyeurisme ou le sensationnalisme.

En effet, Dalva ne décrit pas la pédophilie en soi — le film s’ouvre au moment où la gamine est ôtée à son père —, mais les conséquences de celle-ci sur une enfant de 12 ans. Ce que filme Emmanuelle Nicot, de façon assez légère — en s’offrant même quelques scènes de comédie —, c’est un parcours de reconstruction, un retour à l’enfance pour une gamine étant devenue femme malgré elle.

À l’écran, cela passe par une grande attention de la cinéaste aux vêtements, au maquillage, à la façon de marcher de Dalva. Le tout à travers une mise en scène naturaliste et un format d’écran 4/3 qui renforce le sentiment d’enfermement du personnage, que la caméra suit au plus près pour décrire son évolution intérieure.

"Dalva", un premier film coup de poing d'Emmanuelle Nicot sur une ado abusée par son père.
"Dalva", un premier film coup de poing d'Emmanuelle Nicot sur une ado abusée par son père. ©Caroline Guimbal / Helicotronc / Tripode

Une jeune comédienne très mature

Pour camper cette jeune fille en quête d’innocence, Emmanuelle Nicot a trouvé une jeune comédienne épatante, Zelda Samson. Laquelle fait preuve d’une grande maturité pour aborder ce rôle complexe et nous faire vivre ce parcours psychologique douloureux.

Face à elle, dans le rôle de l’éducateur, on retrouve le très singulier Alexis Manenti, César du meilleur espoir masculin 2020 pour son rôle dans Les Misérables de Ladj Ly. Lequel incarne, physiquement, cette figure paternelle que la petite Dalva doit apprendre à reconnaître comme celle d’un adulte et non comme celle d’un égal…

"Dalva", un premier film coup de poing d'Emmanuelle Nicot sur une ado abusée par son père.
Pour se reconstruire, Dalva (Zelda Samson) va devoir notamment apprendre à faire confiance à son éducateur, campé par le très singulier Alexis Manenti. ©Caroline Guimbal / Helicotronc / Tripode

Dalva Drame De Emmanuelle Nicot Scénario Emmanuelle Nicot, Jacques Akchoti et Bulle Decarpentries Photographie Caroline Guimbal Musique Frédéric Alvarez Montage Suzanne Pedro Avec Zelda Samson, Alexis Manenti, Fanta Guirassy… Durée 1h23

étoiles Arts Libre cinéma
©LLB
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