"Godland" : un film époustouflant qui questionne l’homme, la religion et la nature
L’Islandais Hlynur Pálmason signe un drame historique visuellement magnifique sur le passé de son pays.
/s3.amazonaws.com/arc-authors/ipmgroup/5fe4e627-8f76-40cd-8b84-1471638c0a7a.png)
Publié le 22-03-2023 à 09h18
Jeune pasteur danois envoyé en Islande par sa congrégation, Lucas (Elliott Crosset Hove) est chargé d’aller construire une église dans une communauté reculée de l’île. À la fin du XIXe siècle, le voyage à cheval à travers ce pays à la nature sauvage s’annonce périlleux. L’équipée est guidée par le vieux Ragnar (Ingvar E. Sigurðsson), un autochtone qui n’apprécie que modérément la présence sur le sol islandais de ces Danois, dont il parle à peine la langue…

Un troisième film époustouflant
Découvert à la Semaine de la Critique avec l’impressionnant Un jour si blanc en 2019, Hlynur Pálmason était de retour à Cannes en mai 2022, cette fois en sélection officielle, du côté d’Un Certain Regard, avec Godland. Son troisième long métrage, le jeune cinéaste islandais l’a imaginé, précise-t-il en ouverture, à partir de sept plaques de verre photographiques découvertes dans un vieux coffre en bois, soit les premières photos de la côte sud-est de l’Islande. Mais faut-il le croire ? Le film baigne en effet dans une atmosphère de mystère.
Son personnage de jeune prêtre qui va se confronter pour la première fois à un environnement hostile — jusqu’à, face à une nature très impressionnante, questionner sa propre foi —, Pálmason en fait un passionné de photographie, bringuebalant son lourd matériel sur le dos… Son film, le cinéaste le tourne d’ailleurs dans un format 4/3 aux bords arrondis, qui rappelle les premiers temps de la photographie. L’effet visuel est époustouflant, permettant au film de baigner dans une atmosphère d’étrangeté anachronique, hors de toute réalité.

Un film habité
Godland a deux titres au générique : un en islandais et un en danois… Hlynur Pálmason revient en effet ici sur l’occupation danoise du pays, pour confronter les êtres raffinés venus du continent aux habitants rustres de cette terre hostile, peu enclins à se laisser bercer par les illusions de la civilisation.
Pour illustrer cette opposition, le cinéaste choisit le thème de la religion, signant un film habité par une grande spiritualité, mais dont, malgré la nature du héros, la figure de Dieu est totalement absente, rendue invisible, ou en tout cas pas à sa place dans un environnement aussi sauvage. Glaciers, volcan en éruption, vastes étendues de neige, rivières sauvages… La nature est ici tellement puissante qu’elle éclipse toute possibilité d’autre chose. Ce que Hlynur Pálmason met en scène en montrant la mort, omniprésente, mais aussi à travers de très beaux plans aériens. Dans lesquels l’humanité, toute petite, se résume à des vulgaires insectes écrasés par la majestuosité de paysages à couper le souffle.
Soignant sa reconstitution historique, le cinéaste islandais signe un drame à la beauté éclatante, mais d’une grande aridité, d’une austérité toute protestante qui risque de laisser à la porte du film une grande partie du public…

Godland Drame habité Scénario et réalisation Hlynur Pálmason Photographie Maria von Hausswolff Musique Alex Zhang Hungtai Montage Julius Krebs Damsbo Avec Elliott Crosset, Ingvar E. Sigurðsson, Jacob Lohmann, Vic Carmen Sonne… Durée 2h18
