Triplement primé à Locarno, “Tengo sueños eléctricos” est un magnifique premier film belgo-costaricain

Ce film est signé Valentina Maurel.

San José, Costa Rica. Eva (Daniela Marín Navarro), 16 ans, vit mal le divorce de ses parents. À la maison, elle est insupportable avec sa petite sœur et avec sa mère (Vivian Rodriguez), une ancienne danseuse. La jeune fille s’agace de voir celle-ci flirter avec l’ouvrier venu faire des travaux. Et elle ne supporte pas que sa mère s’en prenne à son chat qui, depuis la séparation de ses parents, pisse partout dans l’appartement.

Valentina Maurel: “Ce n’est pas très à la mode de parler d’une jeune femme qui est fascinée par le père ou par la virilité”

Eva ne rêve que d’une chose: aller vivre avec son père Martín (Reinaldo Amien Gutiérrez), qui a pourtant le sang chaud. Rongé par des démons intérieurs qui le rendent parfois violent avec son entourage, celui-ci vivote, squatte chez un ami (José Pablo Segreda Johanning), suit un atelier de poésie… Cette vie à la marge attire beaucoup l'adolescente, qui visite des appartements avec son père et se laisse séduire par l’ami de celui-ci…

 Tengo Suenos Electricos, de Valentina Maurel, qui, comme Emmanuelle Nicot (Dalva) et Eve Duchemin (Temps mort) a été formée dans une école de cinéma belge…
"Tengo sueños eléctricos" révèle le talent de la jeune Daniela Marín Navarro (au centre), éclatante de naturel face à la caméra de Valentina Maurel. ©COM

Drame sensible

Formée à l’Insas à Bruxelles, la Costaricaine Valentina Maurel avait décroché, en 2017, le premier prix de la Cinéfondation à Cannes pour son film de fin d’études Paul est là. Deux ans plus tard, elle présentait son court métrage Lucia en el Limbo à la Semaine de la Critique. Dévoilé cet été à Locarno, son premier long métrage Tengo sueños eléctricos a fait sensation, décrochant trois prix majeurs : meilleure réalisation, meilleure actrice et meilleur acteur.

Des prix amplement mérités. La jeune Daniela Marín Novarro est épatante, explosive de naturel face à Reinaldo Amien Gutiérrez. Les deux comédiens donnent chair à une relation père-fille d’une profonde complexité, notamment par la psychologie de ces deux êtres incapables de s’inscrire pleinement dans le réel et de s’adapter aux règles de la vie sociale.

"Tengo Sueños Eléctricos" de Valentina Maurel, avec Daniela Marín Navarro et Reinaldo Amien.
Dans "Tengo sueños eléctricos", Valentina Maurel met en scène la relation entre un père (Reinaldo Amien) et sa fille (Daniela Marín Navarro). ©Cinéart

Dévorés par la vie

Nous racontant cette relation du point de vue d’une jeune fille de 16 ans, travaillée par l’adolescence, par la montée du désir, Valentina Maurel livre un drame vibrant, qui refuse de juger ses personnages, qu’elle met en scène dans leur plus profonde humanité. C’est-à-dire totalement honnêtes, fragiles, capables du meilleur comme du pire.

D’une grande sensualité, la mise en scène de la jeune cinéaste ne quitte pas la réalité quotidienne : ennui face à la télévision, fêtes arrosées, escapade à la campagne… Mais, en faisant appel aux rêves, à la poésie – en écho aux Rêves électriques de Philip K. Dick –, aux coïncidences et autres correspondances, Maurel livre un film profondément évocateur. Elle esquisse avec brio le portrait de deux êtres qui dévorent la vie, autant qu’ils sont dévorés par elle…

"Tengo Sueños Eléctricos" de Valentina Maurel, avec Daniela Marín Navarro et Reinaldo Amien.
"Tengo sueños eléctricos" de Valentina Maurel, avec Daniela Marín Navarro et Reinaldo Amien Gutiérrez. ©Cinéart

Tengo Sueños Eléctricos Drame Scénario et réalisation Valentina Maurel Photographie Nicolás Wong Díaz Montage Bertrand Conard Avec Daniela Marín Navarro, Reinaldo Amien Gutiérrez, Vivian Rodriguez, José Pablo Segreda Johanning… Durée 1h42

étoiles Arts Libre cinéma
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