“Dogman” : le “Joker” de Luc Besson à la Mostra de Venise 2023
Ce jeudi soir, la Compétition vénitienne a applaudi le nouveau film de Luc Besson, porté par la performance d’un Caleb Landry Jones habité dans le rôle d’un psychopathe travesti et maître des chiens.
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- Publié le 31-08-2023 à 22h00
- Mis à jour le 05-09-2023 à 22h59
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Jeudi en fin de soirée, la 80e Mostra de Venise accueillait sa première figure problématique (avant Roman Polanski samedi et Woody Allen lundi), celle de Luc Besson. Même si, s’exprimant pour la première fois sur le sujet, le cinéaste français a rappelé, à Venise, avoir été acquitté à quatre reprises par la justice française (la dernière fois en juin dernier) des accusations de viol à son encontre.
Pour sa première apparition en Compétition d’un festival majeur, Besson a dévoilé Dogman, un récit d’outsider tourné en catimini, qui a été très applaudi, jeudi matin, à l’issue de la projection de presse.
Un autoportrait de Besson ?
Arrêté par la police au volant d’un camion rempli de chiens, travesti en Marilyn Monroe, Doug (Caleb Landry Jones) est emmené, dans un sale état, dans une unité psychiatrique de la police du New Jersey. Réveillée en pleine nuit, Evelyn (Jojo T. Gibb), psychiatre mère d’un jeune bébé, est chargée de l’interroger, pour tenter de découvrir qui est cet étrange paralytique aux jambes serties de fer qui semble sortir de nulle part.
Une fois sa perruque blonde enlevée, Douglas lui raconte son enfance traumatisante, auprès d’un père et d’un frère organisateurs de combats de chiens. D’une rare cruauté, ces dévots bas de plafond finiront par l’enfermer dans la même cage que les molosses. Privé de l’amour des hommes, l’enfant va se retourner vers les meilleurs amis de ceux-ci. Au fil des ans, le jeune homme va développer avec les chiens une relation très particulière, un véritable amour, doublé d’une capacité surnaturelle à communiquer avec eux, qui vont le transformer en Dogman.
Étonnant de voir Luc Besson, le Mogul du cinéma français, se projeter dans un personnage aussi déclassé, vivant en marge de la société. Depuis l’échec retentissant de son très ambitieux Valérian et la Cité des mille planètes qui, en 2017, a failli couler sa société de production EuropaCorp, le cinéaste a ceci dit dû revoir ses prétentions à la baisse.

L’ombre du Joker
Après Anna, thriller d’espionnage sans âme en 2019, le réalisateur du Grand Bleu et du Cinquième élément est de retour avec un film nettement plus personnel, où l’on sent que se jouent des problématiques autobiographiques fortes. Face à cet antihéros, tueur sans états d’âme, on pense forcément à Léon (1994). Mais Dogman est plus encore le Joker de Luc Besson…
Avec son sourire exagéré, sa propension au déguisement, son goût de la comédie – il a appris tout Shakespeare par cœur, la lecture étant, avec ses chiens, son seul refuge –, Dogman apparaît en effet comme un double du Arthur Fleck de Todd Philips. D’autant que, lui aussi, se fait le porteur d’un discours social sur la redistribution des richesses. Même si, en l’occurrence, il vole aux riches pour son propre compte…

Caleb Landry Jones, sur les traces d’Heath Ledger
Côté interprétation, Caleb Landry Jones va plutôt puiser son inspiration du côté d’un autre Joker, celui du regretté Heath Ledger dans The Dark Knight : Le Chevalier noir de Christopher Nolan. Très habité, le jeune acteur texan campe un psychopathe en quête de vengeance contre une société qui l’a rejeté qui a marqué les esprits sur le Lido, deux ans après avoir décroché le prix d’interprétation à Cannes pour son rôle de tueur de masse dans Nitram de Justin Kurzel (resté inédit chez nous).
Porté par une mise en scène assurée – notamment dans les scènes d’action avec les chiens – et par une bande-son tonitruante signée par le fidèle des fidèles de Besson Éric Serra, Dogman fait aussi la part belle aux standards de la chanson française, de Charles Trenet à Edith Piaf, dont “Non, je ne regrette rien” vient clore un film où, le cinéaste français, semble pourtant faire amende honorable en abordant les questions de genre, d’identité, de violence et de harcèlement. Un film à découvrir en salles dès ce 4 octobre.
Dogman Thriller psychologique Scénario et réalisation Luc Besson Photographie Colin Wandersman Musique Éric Serra Avec Caleb Landry Jones, Jojo T. Gibbs, Christopher Denham, Marisa Berenson… Durée 1h54